Covid-19 - Couverture vaccinale : de fortes disparités entre les régions tchèques

Des données récentes du ministère de la Santé ont révélé des disparités significatives quant au nombre de primo-vaccinés entre les régions tchèques, soulevant des interrogations sur les raisons de tels écarts. Pour enrayer le phénomène, le gouvernement entend miser sur la proximité et la sensibilisation.

Alors que le nombre journalier de nouvelles injections tend à diminuer ces dernières semaines, des données de l’Institut tchèque des informations et de la statistique sanitaires (ÚZIS) font état de contrastes régionaux majeurs concernant le nombre d’adultes ayant reçu au moins une dose de vaccin.

Les territoires enregistrant pour le moment la plus haute proportion d’adultes primo-vaccinés sont Prague, la Bohême centrale, l’est de la région de Plzeň, le nord de la Bohême du Sud et la région de Vysočina, dans le centre du pays.

A l’inverse, la couverture vaccinale est la plus faible majoritairement dans les territoires transfrontaliers et ceux situés autour des limites des régions administratives. Selon cette même base de données, au 13 juillet, la couverture vaccinale avoisinait à peine 50 %, dans près de 800 communes de République tchèque, quand d’autres territoires dépassaient eux déjà 65% de primo-vaccinés.

Source: ÚZIS ČR

Plusieurs facteurs peuvent expliquer de telles disparités. Les régions affectées par ce retard sont souvent des zones d’exclusion sociale ou des secteurs ruraux où les contacts sont rares et qui ont été relativement épargnés par les vagues successives de l’épidémie.

C’est le cas par exemple de Vyškovec, un village d’une centaine d’habitants à la frontière avec la Slovaquie qui, selon les statistiques nationales, est la localité la moins vaccinée de Tchéquie avec seulement treize personnes ayant été inoculées. Un employé de la mairie s’est confié à la Radio tchèque :

Vyškovec | Photo: RomanM82,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 4.0 DEED

« Beaucoup de gens sont à l’aise ici, ils n’en veulent pas. Il n’y a pas de raison de faire 30 ou 40 kilomètres. Pour quoi faire ? Cela leur est égal, ils ne vont nulle part. Ils vous diront qu’ils ne seront infectés nulle part, alors pourquoi devraient-ils se déplacer ? »

La sensibilisation de ces pans de la société reste un des principaux enjeux pour les pouvoirs publics. Ce sont généralement des personnes qui ne suivent que peu ou pas les actualités quotidiennes et qui, par conséquent, ne sont pas nécessairement informées sur les possibilités de vaccination près de chez elles et sur les démarches à suivre.

L’éducation apparaît être le facteur déterminant des disparités observées entre les régions. Selon diverses études, il existe une corrélation notable entre le niveau d’instruction et l’assentiment à se faire vacciner, comme le soulignait Jakub Lysek de l’Université Palacký d’Olomouc, pour le site Seznam Zprávy le 20 juillet : « Un faible taux de vaccination est associé à un niveau d’instruction plus faible et à un indice d’exclusion sociale. Inversement, la vaccination est logiquement plus importante dans les grandes villes et dans les localités présentant un niveau d’éducation plus élevé ». Toujours selon le politologue, la carte des régions où la proportion de primo-vaccinés est la plus faible calque approximativement les délimitations de l’ancienne région des Sudètes. Ces territoires sont marqués par un tissu social beaucoup plus dégradé que celui d’autres régions.

Petr Globočník | Photo: Zelení

Dans ces espaces, les autorités sanitaires devront donc redoubler d’efforts pour tout à la fois convaincre la population du bien-fondé de la vaccination et lutter contre la désinformation à son sujet. La tâche est loin d’être facile comme le rapporte Petr Globočník, de l’association Romano Jasnica à Trmice, une petite ville des environs d’Ústí nad Labem, en Bohême du Nord, touchée par ce désintérêt pour la vaccination :

« La désinformation circule notamment sur les réseaux sociaux. J'ai personnellement rencontré des gens qui me soutenaient qu'ils pouvaient contracter le magnétisme ou d’autres choses similaires après la vaccination. C'était curieux. »

La question des disparités territoriales n’a pas échappé au gouvernement qui entend bien résoudre ces carences. L’objectif pour l’exécutif est de ne laisser personne de côté et d’aller au contact des populations afin de les sensibiliser et de faciliter les démarches pour recevoir le vaccin.

Adam Vojtěch | Photo: Vladimír Pryček,  ČTK

Parmi les stratégies retenues figure l’ouverture des centres de vaccination sans inscription préalable, qui ont remporté un franc succès à Prague, Brno et Ostrava, les trois plus grandes villes tchèques, et qui vont désormais s’étendre à l’ensemble des régions. C’est d’ailleurs ce qu’a confirmé le ministre de la Santé, Adam Vojtěch, mercredi, lors de l’ouverture de l’un de ces centres à Brno :

« Nous voulons impliquer au maximum les équipes mobiles de vaccination pour aller au plus près des gens, jusque dans les petits villages, afin que ces centres ne soient pas réservés uniquement aux habitants des grandes villes comme Brno. Il faut que le vaccin soit accessible à tous, y compris donc dans les zones transfrontalières où le niveau de vaccination est effectivement plus faible. »

Ústí nad Labem | Photo: Michaela Danelová,  iROZHLAS.cz

La partie n’est cependant pas gagnée pour le gouvernement. Les pouvoirs publics locaux se heurtent à la réalité du terrain, comme l’explique Petr Severa, directeur de l’antenne régionale de santé d’Ústí nad Labem :

« A Trmice, par exemple, la couverture vaccinale est d'environ 45 % seulement. […] Je ne me vois pas aller dans une localité socialement exclue avec un vaccin à deux doses. S’y rendre et vacciner en une fois 200 ou 500 personnes est une chose, y retourner vingt-et-un jours après et réunir ces 200 à 500 mêmes personnes en est une autre. »

Centres de vaccination sans inscription préalable, unités mobiles, vaccins à dose unique ou encore recours élargi aux médecins généralistes, les pistes ne manquent pas pour assurer au mieux la stratégie du gouvernement. Reste néanmoins à savoir si la population répondra présente.

Photo: Václav Šálek,  ČTK

Pour l’heure, le nombre de primo-vaccinés en République tchèque s’élève à environ 5,35 millions, soit juste un peu plus de la moitié de la population, tandis que la moyenne de l’Union européenne s’établit, elle, à 56 %. Malgré ce retard, jeudi, lors d’un déplacement à l’hôpital de Náchod, le Premier ministre, Andrej Babiš, a annoncé qu’il n’y aurait pas d’obligation vaccinale sous sa législature, pas même pour les professionnels de la santé et le personnel soignant.