Des perspectives meilleures pour le cinéma national

En mai dernier, le président Vaclav Klaus a apposé son veto à la loi sur la cinématographie et le développement du cinéma national. Une loi, dont ce dernier a fortement besoin s'il veut survivre et s'épanouir. Comment se porte donc le cinéma tchèque dans une situation où son soutien est faible et où il n'est pas doté d'un cadre législatif approprié ? Le regard du critique Pavel Mandys qui s'est interrogé dans les pages d'une récente édition de l'hebdomadaire Tyden sur la situation du film tchèque en l'an 2006, est assez sceptique. « On n'a vu depuis bien longtemps réunir en une seule année autant de films, dont les auteurs auraient pour seule ambition de gagner du fric ». Le titre de son article - « Comment le film tchèque a tenté d'être une marchandise » - est éloquent.

En 2006, plusieurs films médiocres et plusieurs très mauvais films tchèques auraient été réalisés et distribués en salle. Selon le magazine, ce serait le fruit de la participation des télévisions commerciales à la production des films. Une situation bien différente de celle qui existait récemment encore, où l'on a vu réaliser en Tchéquie des films d'auteur, soutenus tant bien que mal par l'Etat et, surtout, par la Télévision tchèque qui est une télévision publique.

Les producteurs et les télévisions commerciales misent sur un nouveau type de public : les jeunes qui aiment la culture des multiplex et qui, très probablement, ne se rendraient jamais dans une salle mono écran, ainsi que sur les enfants. Ce sont effectivement des films destinés à cette catégorie de spectateurs - on ne citera que les « Pirates des Caraïbes » - qui sont en tête du top ten. Une légère augmentation en 2006 du taux de fréquentation des salles de projection, certes en raison du phénomène mentionné, se présente comme un constat positif.

Jan Hrebejk
L'article met en relief que la liste des films qui ont été réalisés cette année, n'ayant pour objectif que d'offrir une distraction simple, est plus longue que d'habitude. Certains d'entre eux ont été vus par un demi million voire 700 000 spectateurs ce qui est un chiffre considéré comme « vertigineux ». Jan Hrebejk et David Ondricek sont cités dans ce contexte comme des réalisateurs qui font des films « commerciaux », mais qui atteignent tout de même un niveau assez élevé et dont les qualités artistiques sont indiscutables.

« La beauté en difficulté », Kraska v nesnazich, est tourné avec aplomb et la légèreté dignes d'un vrai professionnel », peut-on lire à propos du dernier film de Jan Hrebejk qui a, en outre, remporté un assez beau succès auprès du public, comme ce fut le cas, aussi, lors de ses précédentes réalisations.

« L'année écoulée, rares ont été les films portant un regard inédit et audacieux sur notre présent. Il y en avait nettement moins qu'auparavant », constate le critique qui attribue cet état de choses au fait que le fond pour le soutien de la cinématographie dispose de moyens de plus en plus modestes, ainsi qu'à la politique de la Télévision tchèque qui produit elle-même de moins en moins de films.

M. Xavier Merlin, directeur des affaires européennes et internationales du CNC qui a récemment discuté à Prague du rôle du cinéma national, connaît bien la situation du cinéma tchèque.

« Bien sûr, je ne connais pas tous les films qui sont proposés, mais je sais qu'il y a une très bonne part de marché, puisqu'elle est un peu de 25%, ce qui est un très bon score, car à l'intérieur de l'Union européenne, c'est un score absolument respectable. Je pense que ce que pourrait apporter un financement publique de plus important, c'est sans doute un cinéma plus diversifié, c'est-à-dire un cinéma où il y aurait à la fois du cinéma commercial, mais également du cinéma d'auteur. Il s'agit peut-être de permettre aux jeunes cinéastes d'avoir la possibilité de réaliser leurs projets, et peut-être avoir un cinéma qui aurait une ambition internationale plus grande, c'est-à-dire avoir un cinéma qui puisse avoir accès à de grands festivals internationaux. Il est en même temps vrai que le cinéma tchèque se porte aujourd'hui correctement. Je comprends d'un autre côté l'inquiétude des cinéastes qui porte sur l'avenir. Aujourd'hui, ça fonctionne, mais il faut se poser la question sur demain et la relève de jeunes talents. Il est donc utile de travailler avec les politiques pour préparer l'avenir. »

Le cinéma tchèque connaîtra pourtant, peut-être, des temps meilleurs en 2007, en raison de la candidature de Helena Trestikova, réalisatrice de documentaires très appréciés, au poste de ministre de la Culture. C'est elle effectivement qui est l'un des promoteurs de la loi sur la cinématographie nationale. C'est elle également qui s'est toujours engagée en faveurs de l'amélioration des conditions du cinéma tchèque.