Des verriers tchèques ont créé un sarcophage pour Margrethe de Danemark
Il y a une semaine, la nouvelle a fait le tour du monde : le sarcophage de la reine Margrethe II de Danemark a été installé dans la cathédrale de Roskilde, l’ancienne capitale du royaume. D’ores et déjà, le tombeau est prêt à l’usage, et en dépit du fait que l’une des souveraines les plus populaires en Europe ait fêté ses 78 ans le 16 avril dernier et qu’elle soit en bonne santé. Le sarcophage en verre qui pèse pas moins de sept tonnes est une création originale du sculpteur Bjørn Nørgaard. Mais c’est à Pelechov, un petit village tchèque d’une centaine d’habitants, que cette œuvre spectaculaire a été fabriquée.
« Elle ressemble à un bathyscaphe, à un sous-marin transparent. A l’intérieur, on voit deux personnes vêtues de toile blanche, elles représentent Sa Majesté Margrethe II et le prince Henrik. »
Cette gangue de verre est posée sur trois piliers en granit danois, en marbre du Groenland et en basalte des îles Féroé. L’ensemble repose sur un socle de grès de France, pays d’origine du prince consort. Les piliers sont décorés de trois têtes d’éléphants moulées en argent qui évoquent l’ordre de chevalerie de l’Eléphant.
Par diverses allégories et symboles en bronze doré posés à son sommet, le sarcophage rend hommage à la vie et au travail conjoint du couple royal durant un demi-siècle. Une œuvre hors du commun, moderne et futuriste dirait-on, installée en la chapelle Sainte-Brigitte de la cathédrale de Roskilde, au milieu des sépultures des monarques danois qui y sont enterrés depuis le XIVe siècle. Une œuvre telle que la reine, elle-même artiste aux talents multiples, l’a souhaitée, comme nous le raconte Zdeněk Lhotský :
« La reine a apprécié le sarcophage. Je sais qu’elle s’y est rendue en compagnie de l’auteur de l’œuvre et qu’elle a tout voulu voir en détails. Personnellement, je trouve cette œuvre très belle, justement parce qu’elle est atypique et courageuse. C’est d’ailleurs ainsi que la reine l’a voulue. Au milieu des sarcophages anciens et inspirés de l’Antiquité, ce monument apparaît comme un ovni. »Le sarcophage est composé de six parties qui pèsent presqu’une tonne chacune. Dans l’atelier du verrier Zdeněk Lhotský, il a fallu les cuire au four, les laisser refroidir et les tailler. Un travail qui a pris plus de deux ans, comme l’explique le tailleur Robert Hušek :
« Il nous a fallu beaucoup de courage. On a construit une nouvelle halle spécialement pour ce travail. J’y ai été pratiquement enfermé pendant deux ans. On avançait lentement, mais finalement, le résultat était là. Le montage des six pièces dans la cathédrale était un moment crucial, car ici, dans l’atelier, nous ne pouvions pas le faire. Je savais à 99% qu’on arriverait à monter le tout ensemble, à un demi-millimètre près. »
En réalité, les maîtres verriers tchèques n’ont pas créé un sarcophage, mais un cénotaphe, c’est-à-dire un tombeau vide. Car la reine Margrethe reposera dans une crypte située en-dessous du monument. Si, dans l’Antiquité, le cénotaphe était une demeure de l’âme détachée du corps, ce sera d’autant plus vrai dans le cas de cette « sépulture imaginaire » : disparu en février dernier, le prince Henrik, lui non plus, n’y sera pas inhumé. Celui qui entretenait un rapport compliqué avec son titre de prince consort et le statut royal de son épouse a souhaité ne pas reposer dans la nécropole aux côtés de la reine.
Le sarcophage restera inaccessible au public jusqu’à la disparition de la souveraine actuelle du Danemark. S’il est pour l’instant couvert, les visiteurs de la cathédrale peuvent néanmoins y voir sa maquette.