Entretien avec David Šmejkal, conseiller en surendettement
David Šmejkal est le fondateur d’un bureau de consultation consacré à l’aide et au conseil de personnes surendettées. Cette organisation s’appelle Poradna při finanční tísni. Ils sont des milliers chaque année à utiliser ses services pour tenter de sortir de la spirale de l’endettement. Nous avons d’abord demandé à David Šmejkal de nous présenter son organisation :
L’organisation de David Šmejkal en est seulement à sa troisième année d’activité. Trois ans au cours desquels la situation économique a pourtant fondamentalement changé. La crise est passée par là et le nombre de personnes en demande de conseils augmente rapidement.
« Lors de notre première année d’existence, en 2008, nous avons eu 4100 clients. L’année suivante, en 2009, nous avons 11300 clients, et nous nous attendons à un nombre assez similaire pour cette année 2010. Donc on peut dire qu’en trois ans le nombre de nos clients a presque triplé. C’est à cause de la crise économique avant tout et puis désormais les gens ont davantage de possibilités de se faire conseiller par une organisation qui travaille à titre gratuit. Avant cela n’existait pas à l’échelle nationale. »En trois ans, David Šmejkal a pu dresser une sorte de profil type du Tchèque surendetté, qui vient demander de l’aide pour tenter de s’en sortir.
« Notre client type est instruit, il a un revenu net compris entre 10 000 et 20 000 couronnes, donc entre 400 et 800 euros net. Il a donc un revenu en dessous de la moyenne et un niveau d’éducation faible. Agé d’environ une trentaine d’années, et en moyenne avec des dettes s’élevant en tout entre 300 000 et 600 000 couronnes. »
Les banques tchèques se sont vues reprochées ces dernières années de prêter trop facilement à tout le monde et à des taux assez élevé. Mais selon David Šmejkal, ce sont moins les dettes contractées auprès des banques qu’auprès du secteur non bancaire qui sont problématiques :
« Les problèmes les plus fréquents, nous les observons chez nos clients qui ont des dettes auprès de sociétés non bancaires qui n’ont pas de licence. Il y a maintenant un changement dans la législation et à partir de l’année prochaine, même ces sociétés seront obligées de s’enregistrer. Mais on ne s’attend pas que ces changements dans la loi sur les prêts à la consommation produisent beaucoup d’effets. »
Une fois plongé dans le gouffre financier et submergé par les remboursements et les intérêts, comment faire pour s’en sortir ? David Šmejkal concède prêcher pour sa paroisse, mais selon lui il n’y a pas 36 solutions, il faut de l’aide et de préférence de l’aide gratuite :
« Pour que le client puisse s’en sortir, il est d’abord important qu’il ne fasse pas de nouveau prêt, qu’il trouve de l’aide auprès d’amis ou encore mieux une aide professionnelle comme notre organisation, qui contrairement aux conseillers financiers ou aux avocats ne demande pas de contrepartie financière. Les services que nous proposons ou que proposent des organisations équivalentes sont le meilleur choix pour sortir du surendettement. »L’organisation d’aide aux ménages surendettés de David Šmejkal a pour l’instant des bureaux dans trois villes de République tchèque : Prague, Ostrava et Usti nad Labem. Les personnes intéressées par leurs conseils peuvent aussi obtenir des renseignements par téléphone et par internet. Ce sont des fonds privés qui financent l’organisation, comme le souligne David Šmejkal.
« Nous sommes un cas assez unique dans les pays de l’Union européenne car nous sommes financés par des sponsors privés comme les banques et les caisses d’épargne logement dans le cadre de leur politique de responsabilité sociale. Notre activité est surveillée par le conseil de surveillance de l’Université économique de Prague et par l’association tchèque des consommateurs. »David Šmejkal participe à des séminaires européens sur les solutions face au problème du surendettement. Il était récemment à Bruxelles pour participer à une conférence organisée dans le cadre de l'année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et il a pu comparer les situations dans les différents Etats-membres et d’après son expérience ce n’est pas en République tchèque que la situation est la plus catastrophique.
« En ce qui concerne les statistiques, l’endettement des Tchèques n’est pas tellement important si on le compare aux autres pays de l’Union européenne, donc on peut s’attendre à ce que l’endettement augmente encore. En ce qui concerne l’efficacité de notre législation sur la faillite personnelle, je dirais qu’elle est très progressiste et je dirais qu’elle permet à beaucoup de gens de recommencer à zéro, au bout de cinq ans. Pour l’instant, j’observe un faible engagement de la part des communes dans les tentatives de résolution des problèmes de surendettement et également un faible intérêt de l’Etat : nous n’avons aucune plateforme de dialogue pour discuter de ce problème. Malheureusement il n’y a pas pour l’instant de dialogue structuré chez nous. »