« Milostivé léto » : une opportunité de nouveau départ pour les particuliers endettés auprès de l’Etat

'Eté de clémence'

Les Tchèques ont actuellement une opportunité unique d’éviter la saisie-exécution et de rembourser les sommes qu’ils doivent à l’Etat et aux entreprises publiques. D’une durée de trois mois, une opération exceptionnelle d’amnistie des pénalités pour impayés est en cours.

Une nouvelle loi dite « Eté de clémence » a été adoptée cet été en République tchèque. Elle apporte certainement un grand soulagement aux personnes qui ont vu le montant initial d’une dette alourdi par les intérêts, pénalités et autres sanctions pécuniaires pour impayés.

Concrètement, la loi leur offre la possibilité de voir ces sommes supplémentaires effacées à condition qu’ils s’acquittent – dans la période du 28 octobre au 28 janvier – du principal (la somme initialement due) ainsi que d’une taxe de 908 couronnes (environ 35 euros) à l’huissier de justice.

Photo illustrative: Michaela Danelová,  ČRo

Précisons toutefois que cette loi concerne les dettes faisant l’objet d’une saisie et contractées auprès de l’Etat, des communes ou des régions, mais aussi des entreprises publiques. Les dettes contractées dans le secteur privé ne sont donc pas concernées. Dans la plupart des cas, il s’agit de dettes auprès de l’assurance maladie, pour des taxes d’enlèvement des ordures ménagères non payées ou pour des déplacements sans billet dans les transports en commun, mais également des sommes dues à des fournisseurs d’électricité ou de gaz.

Dans certains cas, des dettes au montant initial modeste ont atteint, au fil des années et au gré des intérêts, des dizaines de milliers de couronnes. C’est ce qui est arrivé à Jiří, qui a aujourd’hui 43 ans. Adolescent, il s’était fait contrôler dans les transports en commun alors qu’il voyageait sans billet. N’ayant pas payé les amendes, il a également ignoré les rappels à l’ordre, tant et si bien que ce sont quelque sept saisies-exécutions qui ont été lancées contre lui.

Photo illustrative: Ladislav Bába,  ČRo

« D’abord, je dois dire que jamais je n’aurais pensé que, d’un billet de transport à 20 couronnes, le montant grimpe pour atteindre un dû de 10 000 couronnes. C’est pour ça que je l’avais ignoré. Par la suite, je mettais de côté l’argent de mon salaire, pour qu’il ne puisse pas être saisi par les huissiers. Sauf que plus tard, ma copine et moi voulions acheter un appartement, et pour cela, il me fallait un crédit immobilier. Mais la banque est tombée sur mes saisies-exécutions, et elle ne m’a donc pas accordé de crédit, bien entendu. »

Le terme tchèque « Milostivé léto » utilisé pour désigner cette loi signifie littéralement « été de clémence ». Il fait référence au « jubilé » dans le sens biblique du terme, à savoir une année de libération générale, avec non seulement l’annulation des dettes, mais également le rendu des terres aliénées ou gagées, ainsi que la libération des esclaves.

Pas d’esclavage en République tchèque, mais cette opération unique – qui se ne reproduira sans doute pas – pourrait néanmoins largement soulager quelque 300 000 à 500 000 particuliers, selon les spécialistes. A condition qu’ils expriment formellement leur désir de bénéficier de cet « été de clémence » auprès de l’huissier de justice. Plusieurs associations se proposent d’aider les personnes concernées, afin qu’elles ne manquent pas cette opportunité de nouveau départ. Ainsi l’association humanitaire « Člověk v tísni » a mis en place une ligne téléphonique d’informations. Quant au projet « Nedlužím státu » (« Je ne dois pas d’argent à l’Etat », https://www.nedluzimstatu.cz/milostive-leto/), il explique très clairement le fonctionnement de l’opération dans le détail et propose même un modèle de lettre à adresser aux huissiers de justice.

Marek Výborný | Photo: Milan Kosina,  ČRo

Cette opération ne bénéficierait d’ailleurs pas qu’aux personnes endettées : selon Marek Výborný, du parti KDU-ČSL, « les deux parties vont tirer profit de cette période de trois mois. En effet, grâce au 'Milostivé léto', les communes, entreprises publiques et autres ont une grande chance de voir remboursé l’argent qui leur est dû ».

D’ailleurs, nombreuses sont les entreprises publiques à faire clairement la promotion de cette possibilité sur leur site. C’est notamment le cas du fournisseur d’électricité ČEZ, des transports en commun de la ville de Prague ou encore de la banque Česká spořitelna.

Par ailleurs, certaines banques ont annoncé qu’elles rallieraient également cette initiative et permettraient – sous certaines conditions bien précises – à leurs emprunteurs endettés de rembourser uniquement le principal de leur prêt immobilier, par exemple, et d’annuler les frais qui s’y sont cumulés.