Euro : Le président tchèque met en doute la stratégie de la banque centrale

Miloš Zeman, photo: Filip Jandourek

Le débat sur l’entrée de la République tchèque dans la zone euro n’a pas fini de faire couler de l’encre, d’animer les dîners en ville et de diviser les politiciens. Cette semaine, le président Zeman est monté au créneau en critiquant le comportement de la banque centrale (ČNB) et son intervention qui a affaibli le cours de la couronne ces derniers mois.

Miloš Zeman,  photo: Filip Jandourek
« Je ne peux écarter la possibilité que les initiatives prises par la banque centrale en vue de dévaluer la monnaie tchèque soient motivées également par la perspective de prolonger la période qui précédera l’entrée de la République tchèque dans la zone euro et ainsi conserver toutes ses compétences actuelles », a déclaré jeudi Miloš Zeman.

Les dirigeants de la banque centrale ont refusé de commenter ces critiques formulées par le chef de l’Etat. En cas d'adoption de la monnaie unique, le fait est que les prérogatives de la ČNB seront réduites.

Les membres du conseil d’administration de la banque centrale sont, selon les termes de la constitution tchèque, nommés par le président de la République.

Le gouverneur et plusieurs autres membres ont été nommés par l’ancien président, Václav Klaus, dont les positions hostiles à l’intégration européenne sont de notoriété internationale.

Photo: Štěpánka Budková
Miloš Zeman a nommé un des sept membres du conseil en février dernier en la personne de Jiří Rusnok, fidèle allié qu’il a ainsi remercié d’avoir assuré l’intérim à la tête du gouvernement.

Quelques semaines après la dévaluation de la couronne, l’économiste auprès de Moody's Analytics, Martin Janíčko estimait déjà sur Radio Prague que le rôle de la ČNB était crucial dans le processus qui doit mener le pays vers l’eurozone :

« La dévaluation réalisée à l’automne dernier rend impossible l’adoption de l’euro, car il s’agissait d’une dévaluation de 5%. Tout le processus dépend énormément aussi de la banque centrale. Il est certain que la ČNB coordonne ses actions avec le gouvernement, et continuera à le faire, notamment si la décision est prise d’adopter l’euro à l’horizon 2019. Mais, dans ce cas-là justement, il ne faut pas que la ČNB soit trop active en ce qui concerne les dévaluations ou réévaluations, sinon on ne pourra jamais remplir les critères de Maastricht. »

L’économiste Jiří Šteg comptait parmi les experts ayant critiqué la dévaluation décidée par la ČNB:

ČNB,  photo: Štěpánka Budková
« Le poids de la ČNB est fixé par la loi. C’est une institution très indépendante qui détermine la situation économique du pays. Il faut espérer pouvoir à l’avenir renouveler les membres du comité de la ČNB pour y nommer des gens plus constructifs et non pas prédéterminés par des théories monétaristes. Potentiellement, la ČNB pourrait empêcher l’adoption de l’euro, mais je pense qu’après l’expérience des interventions sur devise que nous avons vécue, des actions similaires ne se reproduiront plus. Au moins, elles ne devraient pas se répéter si le conseil d’administration de la ČNB n’est pas devenu fou. »

Folle ou pas, la banque centrale a récemment indiqué vouloir maintenir sa statégie au moins dans l’année à venir. Selon le chef de la diplomatie tchèque Lubomír Zaorálek cité par la télévision publique, l’entrée du pays dans la zone euro est à prévoir dans « environ six ans ».