Festival de Karlovy Vary : le film tchèque « Borders of Love » explore les limites de la monogamie
Plus grand rendez-vous de cinéma en République tchèque, le Festival international du film de Karlovy Vary sera clôturé le samedi 9 juillet. Sélectionné en compétition officielle, le film tchèque « Hranice lásky » (« Borders of Love ») qui explore d’autres formes de relations au sein d’un couple que la monogamie, est l’un des événements de cette 56e édition du festival.
« Borders of Love », avec Hana Vagnerová et Matyáš Řezníček dans les rôles principaux, est le premier long-métrage du réalisateur tchèque d’origine polonaise Tomasz Wiński, 43 ans. Présenté en première mondiale avant sa sortie en salles en novembre prochain, son film a suscité beaucoup d’impatience du public festivalier et des médias, de par son sujet : il met en scène Hana et Petr, qui se posent la question des limites de la liberté dans leur vie de couple. Ils décident de réaliser leurs fantasmes érotiques et désirs secrets, et de s’aventurer au-delà des codes traditionnels.
Pour parler du film et, plus généralement, du Festival de Karlovy Vary, nous avons rencontré Laurent Danielou de la société parisienne Loco Films, chargée des ventes internationales de « Borders of Love » :
« D’une part ce film est un événement du festival, d’autre part il intéresse énormément les distributeurs. Nous voyons que lorsqu’un film parle à un public international, peu importe qu’il soit tourné en anglais, en français ou en tchèque, c’est le sujet qui en fait la valeur. »
Pensez-vous alors que « Borders of Love » a des chances de sortir en France ?
« Oui. La première était lundi et nous avons déjà six distributeurs signés. C’est le type de film dont le sujet intéresse tout le monde et qui peut, justement, franchir la barrière de la langue. C’est un film de qualité qui n’est ni art-et-essai ni tout à fait commercial : c’est d’ailleurs pourquoi il avait été sélectionné en compétition à Karlovy Vary. »
En tant que spectateur, vous l’avez donc apprécié ?
« Bien sûr, c’est pour cela que je l’ai pris. On nous propose beaucoup de films. Notre société a deux critères de sélection : il faut que les films nous plaisent et, surtout, qu’ils soient susceptibles de trouver des distributeurs. Car le marché du cinéma en salles est difficile. Le Festival de Karlovy Vary, où les salles sont archipleines, est une exception. Mais de façon générale, les spectateurs, mis à part le jeune public, ne sont pas vraiment revenus dans les salles de cinéma après la pandémie. »
Avez-vous une explication ?
« Probablement pour deux raisons. Les gens sont encore un peu prudents. Mais surtout, le public plus âgé, art-et-essai, a appris à se servir de nouveaux moyens et de regarder les films en ligne. Il ne voit plus trop l’intérêt d’aller voir un film au cinéma dans des qualités techniques un peu semblables, étant donné que pendant la pandémie, tout le monde s’est équipé d’appareils techniques peu onéreux, mais très performants. Ici au festival, les projections de Borders of Love étaient complètes quinze jours en avance. Je souhaite que ce soit la même chose quand le film sortira dans les salles tchèques en novembre ou plus tard dans les salles françaises. Mais la situation reste compliquée, notamment avec la hausse des cas de Covid et la nouvelle fermeture des salles en perspective. »
Pour revenir à « Borders of Love » qu’est-ce qui a retenu votre attention en particulier ? Le scénario, le sujet et la manière dont il a été traité ou les prestations des acteurs ?
« Tout à la fois. Le film est divisé en trois parties. D’abord, on suit un couple ordinaire. Ils sont beaux, jeunes et tout va bien. Dans la seconde partie, ils réfléchissent sur l’échangisme, expérimenté par leurs amis. De façon assez rapide, spontanée et rigolote, ils passent à l’action. Enfin, il s’avère que l’un des deux n’apprécie pas du tout ce mode de vie, tandis que l’autre l’aime trop. Cette intrigue fait la richesse du film, je pense. »
Pourriez-vous présenter également le second film que vous présentez au festival ?
« C’est le film brésilien Tinnitus qui fait partie de la section compétitive Proxima. C’est un film art-et-essai, où l’on suit une nageuse professionnelle. Elle souffre de la maladie Tinnitus, donc des bourdonnements dans les oreilles. C’est un très beau film, d’ambiance, atmosphérique. »
Profitez-vous du festival aussi en tant que spectateur ?
« Non, je travaille… J’accompagne les délégations des deux films, tchèque et brésilienne. Nous sommes beaucoup en ligne, car les distributeurs ne sont pas présents à Karlovy Vary. Depuis Los Angeles ou Tokyo, ils lisent la presse et c’est pour cela que nous essayons que les films soient visibles. Nous leurs parlons de l’accueil que le film a eu à Karlovy Vary. Je viens régulièrement à ce festival que j’aime beaucoup. C’est agréable de voir tant de monde, beaucoup de jeunes cinéphiles, des salles archipleines… C’est un festival qui a de l’énergie et une sélection assez ouverte. Elle n’est pas sombre, uniquement art-et-essai. Par exemple, le fait de sélectionner ‘Borders of Love’ en compétition officielle est assez courageux. Ce n’est pas un film pointu. A Karlovy Vary, on présente du bon cinéma, commercial ou d’auteur, ce qui fait la richesse de ce festival. Enfin, ce qui est important pour nous, c’est la présence de la presse internationale : tous les grands journaux sont-là, Variety, le journal britannique Screen etc. Si le film est bon, il est tout de suite remarqué. »
Quel sera le titre français de « Borders en Love », vous le savez ?
« Non, c’est le distributeur français qui le choisira. Probablement, ce ne sera pas ‘Les frontières de l’amour’. Cela sonne un peu mou, en français. »
Parmi les autres films en compétition, on trouve un autre film tchèque, « Slovo » de la réalisatrice Beata Parkanová, ainsi que le drame franco-lithuanien « Vesper » de Kristina Buožytė et Bruno Samper ou le long-métrage « America » du réalisateur israélien Ofir Raul Graizer.
Les Globes de cristal des meilleurs films seront distribués samedi soir.