Festival du film français : François Truffaut tel qu’en lui-même
Présenté dans le cadre de la section compétitive du Festival du film français, Choix de la critique tchèque, le film « François Truffaut, le scénario de ma vie » met en lumière la façon dont la vie et les films du réalisateur français sont étroitement entremêlés. Le documentaire est né à partir d’un récit autobiographique interrompu par la mort du cinéaste de la Nouvelle vague, comme le raconte le réalisateur David Teboul.
« J’avais envie de faire un film sur Truffaut mais un film intime qui faisait lien entre l’œuvre de François Truffaut et sa vie. Il se trouve que j’ai eu la chance d’avoir accès à des documents dont le projet inachevé de son autobiographie. J’ai construit le film à partir de là. »
Le film est construit dès le départ via la parole de Truffaut lui-même, puis celle des gens autour de lui comme son père. Le montage et la manière dont vous avez scénarisé le film montre que et tous ses films sont totalement imbriqués avec sa propre vie évidemment, bien au-delà du de l’alter ego qu’est Antoine Doinel. On se rend compte que tous ses films sont ainsi même ceux qui pour lesquels ce n’est pas apparent au premier abord…
« Dans le cinéma de Truffaut, il y a toujours une part biographique : certains paraissent très loin de sa biographie comme Fahrenheit 451 ou Les deux Anglaises et le continent. Mais dans le cinéma de Truffaut interviennent toujours des fragments, des liens, des échos de son propre récit. Et ce texte inachevé m’a permis d’appuyer ce lien étroit entre sa vie et ses films. »
Avez-vous découvert des choses surprenantes pour vous, en construisant le film ?
« Surprenantes non. Il faut dire que je ne recherchais pas quelque chose de surprenant. Ce qui m’intéressait, c’est la manière dont Truffaut a écrit une œuvre. Or cette œuvre, il l’a écrite en fonction de sa vie. La place qu’occupe sa vie dans son œuvre est extrêmement importante. Evidemment ce n’est pas un cinéma d’autofiction, un terme qui n’existait d’ailleurs pas à l’époque mais la part de fiction et la part biographique ont des liens très intenses. Je voulais aussi que le public rencontre l’œuvre de François Truffaut et regarde peut-être autrement ses films : c’est un élément important qui a été un moteur pour moi avec l’idée au fond de revisiter l’œuvre de Truffaut en m’appuyant sur l’homme. »
En effet, aujourd’hui il est considéré comme une icône évidemment, un « monstre sacré du cinéma » selon l’expression consacrée. Mais on se rend compte en fait en voyant votre film que ce n’était pas quelque chose d’évident au départ car il a eu cette enfance très difficile. Il a véritablement fait ses 400 coups…
« Oui mais ce n’est pas quelqu’un qui était ni dans la plainte, ni dans la souffrance. Les 400 coups, c’est à la fois un film dur à la fois un film tendre. »
Ce qu’on voit dans votre documentaire, c’est la place prépondérante que prennent les enfants dans ses films. Et puis il y aussi ce moment crucial où il découvre qui est son potentiel père et donc aussi son rapport à sa potentielle judéité après qu’un détective a découvert l’existence de l’homme qui devait être son père biologique…
« Tout à fait. Au fond, le film que j’ai fait est un roman familial. La part de fiction permet à Truffaut de vivre et de survivre. Quand on y pense, il aurait très bien pu inventer le scénario de sa vie. »
Avant de faire ce film, que représentait pour vous François Truffaut pour vous en tant que cinéaste ?
« C’est une figure très importante. Il y a des films qui m’ont davantage marqué que d’autres. Mais ce qui est important pour moi, c’est la place qu’occupent les enfants, et puis évidemment le thème de l’amour sous différentes formes. Truffaut, c’est le cinéaste de l’enfance et c’est le cinéaste des passions sentimentales. »
Je vais vous poser une question que j’avais posée à Serge Toubiana ici même en 2022. Nous avions parlé de la Nouvelle vague française et de la Nouvelle vague tchécoslovaque évidemment. Dans les deux cas, il n’y a pas forcément les mêmes enjeux mais comment est-ce que vous expliquez ces deux petits miracles cinématographiques au même moment ?
« Je ne suis pas un historien du cinéma. La Nouvelle vague française est liée à la guerre : c’est une génération qui a connu la guerre or le cinéma français était enfermé, conformiste, lourd et bourgeois. Au fond, c’était un cri pour rompre avec les conventions, un désir de transgresser, de montrer la vie autrement que par la fabrication que l’artifice. Truffait est un cas particulier car c’est un cinéaste romanesque : il est donc très sa part dans ce groupe. C’est un cinéaste qui est à la fois non-conventionnel dans la forme mais qui reste quand même attaché au récit ce qui le distingue de nombreux cinéastes de la Nouvelle vague. »