« Ca allait de haut en bas et les occasions de but succédaient aux occasions de but. Je pense que, pour ceux qui aiment le football, ça a été un match fantastique. » A la sortie du terrain, euphorique, dans un état second comme l'ensemble de ses partenaires et la colonie de supporters, Tomas Rosicky, le jeune meneur de jeu de la sélection, transmettait autour de lui la fièvre qui l'avait agitée, samedi soir, sur le terrain après la renversante victoire (3-2) des siens contre les Pays-Bas. Après la Lettonie, ce deuxième succès en deux matchs propulsait les Tchèques en quarts de finale du Championnat d'Europe portugais.
La Tchéquie qualifiée pour les 1/4 de finale après sa victoire renversante contre les Pays-Bas (Photo : CTK)
« Après toutes les critiques qui nous sont tombées dessus dans les jours qui ont suivi notre courte victoire contre la Lettonie, alors que nous avons été menés et que les Allemands n'ont pu faire mieux que 0 à 0 contre cette même Lettonie, cette fois-ci nous avons réussi à l'emporter contre les Pays-Bas qui avaient pourtant deux buts d'avance. Seules les grandes équipes sont capables de telles performances et nous avons prouvé que nous avons un grand esprit d'équipe », poursuivait celui que l'on surnomme le « petit Mozart » pour ses facultés à diriger le jeu à coups de baguette magique.
Pavel Nedved et Karel Bruckner (Photo : CTK)
Après une entrée en matière quelque peu balbutiante dans la compétition et un premier succès arraché à la force du poignet dans le dernier quart d'heure contre la modeste Lettonie, mardi, l'équipe tchèque de football, face à des « Oranges » néerlandaises qui avaient pourtant retrouvé tout leur jus, a, une nouvelle fois, fait une démonstration de la force de caractère qui anime son collectif. Après avoir offerts, dans les vingt premières minutes du match, deux buts sur un plateau à un adversaire qui n'en demandait pas tant, les joueurs du sélectionneur Karel Bruckner se sont resaissis pour finalement renverser la vapeur et l'emporter. Du coup, la Tchéquie, que le tirage au sort avait pourtant placée dans le groupe dit « de la mort », est la seule équipe à s'être qualifiée pour les quarts de finale de l'Euro après seulement deux matchs. Déjà assurée, avec six points, de terminer à la première place du groupe D, elle rencontrera, dimanche prochain, à Porto, au stade du Dragon, le deuxième du groupe C, soit la Suède, le Danemark ou l'Italie.
Photo : CTK
« Ces Tchèques sont épatants », titrait, donc, ainsi, faussement surpris, le quotidien L'Equipe en première page de son édition de dimanche. Pour la référence en matière de presse sportive en France, la rencontre fut un spectacle grandiose au cours duquel, en deuxième mi-temps, les spectateurs ont pu admirer le « festival tchèque ». Plus généralement, c'est toute la presse du Vieux continent qui s'est émerveillée non seulement devant l'exploit de la bande à Pavel Nedved, mais aussi devant un match que d'aucuns n'ont pas hésité, aussitôt le coup de sifflet final, à ranger parmi les plus beaux de l'histoire du jeu. « Attaque. Attaque. Attaque. Les puristes de football ont dû se sentir au septième ciel », commente le journal britannique The Observer. En Belgique, La Dernière Heure, à l'évocation des individualités tchèques Nedved, Baros, Poborsky ou Koller, parle d'une « équipe sexy » dont elle se demande déjà si la victoire finale dans le tournoi, le 4 juillet prochain, constituerait bien une surprise. Même la bible italienne Gazetta dello Sport n'est pas la moins avare en éloges : « Des Tchèques féériques et un match magnifique. Ce Onze tchèque a le caractère de son capitaine Pavel Nedved : il n'abandonne et ne s'avoue jamais vaincu ». Enfin, le commantateur portugais d'A Bola, a qualifié le but égalisateur à deux partout de Milan Baros de « véritable hymne au football ».
Milan Baros (Photo : CTK)
Pourtant, malgé la fin heureuse, rien n'a été simple pour les Tchèques. Sans l'immense talent de leur gardien Petr Cech et l'indispensable réussite, ils auraient d'ailleurs très bien pu retourner aux vestiaires à l'issue des 45 minutes initiales avec plus d'un but de retard au tableau d'affichage. C'est que leur entame de match sur le plan défensif a été castatrophique, comme le reconnaissait l'arrière latéral gauche, Marek Jankulovski :
« Le début de match n'a pas été conforme à nos attentes. Surtout le premier but que nous avons encaissé sur un coup de pied arrêté. Nous leur avons donné, puisqu'il n'y avait personne au marquage au deuxième poteau. Le deuxième but a été identique à celui que nous avions déjà pris contre la Lettonie avec une perte de balle au milieu de terrain qui a entraîné une contre-attaque avec une balle en profondeur dans le dos des défenseurs. Mais je pense qu'ensuite nous avons relevé la tête. Le fait de revenir rapidement au score a été déterminant. Après, la deuxième mi-temps a été excellente et je pense que nous méritons de nous qualifier en terminant à la première place. »
Pavel Nedved et Jan Koller (Photo : CTK)
Quatre minutes à peine après le deuxième but néerlandais, c'est l'avant-centre Jan Koller qui a remis les siens sur le droit chemin en réduisant le score à 2-1. Pour le doux géant de deux mètres et 103 kilos, cela faisait huit mois qu'il n'avait plus marqué sous le maillot de l'équipe nationale :
La Tchéquie qualifiée pour les 1/4 de finale après sa victoire renversante contre les Pays-Bas (Photo : CTK)
« Avant le match, je m'étais dit que si je ne marquais pas contre les Hollandais, ça deviendrait vraiment inquiétant puisque contre eux ça me réussit toujours plutôt bien. Normalement, lorsque nous les rencontrons, j'inscris un but. Cette fois encore j'y suis parvenu. Mais la passe de Milan Baros était superbe, le but était devant moi presque vide, je ne pouvais pas ne pas marquer. Ca a été un moment important, un des tournants du match. Nous sommes revenus à leur contact, nous étions de nouveau en jeu après ce début de match difficile. Par la suite, le football qui a été pratiqué était fantastique. »
Après cette performance fantastique, donc, les Tchèques peuvent aborder sans pression leur prochain affrontement contre le voisin allemand, mercredi. Un match qui constituera une revanche de la finale perdue (2-1, but en or) à Wembley, en Angleterre, lors de la finale de l'Euro 1996. Et si Karel Bruckner compte faire tourner son effectif pour que se reposent ses éléments majeurs, nul doute que ceux qui entreront sur la pelouse du stade José Alvalade de Lisbonne auront à coeur de priver les Allemands du bonheur de se qualifier qui fut le leur. Ne serait-ce aussi que pour consoler et remercier les Néerlandais du spectacle qu'ils ont fourni ensemble samedi.