Gérard Berréby : « Je ne suis pas plus artiste que photographe ou vidéaste, je fais simplement des choses »
Poète, fondateur et président des Editions Allia, considérées comme une des maisons d’édition les plus innovantes et les plus fécondes en France, Gérard Berréby est venu cette semaine à Prague à l’occasion de l’ouverture de son exposition d’installations, vidéos et photographies. Présentée en 2015 à Marseille, celle-ci se tient pour la première fois à l’étranger. L’exposition se divise en deux parties. La galerie d’art contemporain DOX accueille les installations de Gérard Berréby, présentées sous le titre ‘ Les Tables du temps’, tandis que la Galerie 35 de l’Institut français héberge une exposition de ses photos et de vidéos, intitulée ‘Le paysage et le territoire, le laboratoire urbain’. Au micro de Radio Prague, Gérard Berréby revient sur ses motivations qui l’ont poussé à réaliser sa première exposition personnelle qui se démarque de ses activités traditionnelles.
Vous avez souhaité exporter cette exposition à l’étranger. Pourquoi avoir choisi Prague ?
« Il m’a paru naturel que ma première exposition à l’étranger soit accueillie à Prague, étant donné que je viens dans cette ville depuis plus de vingt-cinq ans. Je m’y suis énormément amusé et j’y ai observé certains changements, à l’image du ‘Buveur d’absinthe’ de Viktor Oliva qui montre les troubles de la vision et l’hallucination qui sont à l’origine, à mes yeux, de la création. Ces troubles m’ont durablement poursuivi et je les ai perpétués dans d’autres formes et surtout dans une autre époque à savoir la nôtre. »Vous exposez ici dans deux lieux différents. Est-ce qu’il y a un fil conducteur entre les deux expositions ?
« Il y a obligatoirement un fil conducteur à partir du moment où ma préoccupation principale est fondée sur le fait que rien de ce qui est humain ne m’est étranger, donc je fais feu de tout bois. L’idée de l’exposition de photographie en grand format m’est venue quand j’ai écouté différents discours sur la ville de sociologues et d’anthropologues qui disent que la ville est impossible à vivre, étouffante, sale, grise, mortifère… J’ai commencé alors à faire des photos de la saleté, c’est-à-dire de macadam, de murs, de tags sur les murs, d’objets du quotidien jetés à même le sol, des poubelles… Quand je suis rentré chez moi travailler ces photographies, je me suis aperçu qu’en les assemblant entre elles, je réussissais à créer une véritable palette chromatique par instant impressionniste qui allait à l’encontre de tous ces discours. Donc ce qui me plaît et ce qui m’intéresse dans ce que je fais, c’est de mettre en relief les contradictions entre ce qui est et ce qui se dit sur ce qui est. Je ne suis pas plus artiste que photographe ou que vidéaste, je ne vous cache pas que ces appellations me pèsent. Je dirai tout simplement que je fais des choses. Ce qui me terrorise et me fait extrêmement peur, c’est lorsqu’on tente de caser mon travail dans une orientation précise, une tendance, une école… Je fais cela et demain je ferai autre chose, j’écris également de la poésie. On créé en fonction de ce qui nous habite et en fonction du moyen que l’on trouve pour l’exprimer.»
Les installations de Gérard Berréby sont exposées à la galerie DOX jusqu’au 11 septembre prochain, tandis que ses photographies sont à voir jusqu’au 1er juillet à l’Institut français de Prague.