Grève des transports : des embouteillages, oui, mais sur les pistes cyclables
La grève des transports publics qui s’est tenue jeudi laissait craindre le pire quant à la circulation sur les routes tchèques. Aucun train ne circulant dans tout le pays et les transports en commun fonctionnant en service très limité, on s’attendait à d’interminables embouteillages. A Prague en premier lieu, où le métro, qui assure plus de 40 % des trajets et transporte plus de 1,5 million de passagers chaque jour, est resté fermé toute la journée pour la première fois de son histoire. Finalement, loin d’un jeudi noir, la capitale tchèque a vécu une journée comme elle aimerait en vivre plus souvent. Les « banlieusards » avaient en effet pris leurs précautions et beaucoup ont préféré rester chez eux pour profiter du temps ensoleillé, tandis que les Pragois ont été très nombreux à se rendre au travail à pied ou à vélo. Une petite révolution !
Soleil radieux aidant, un air de week-end estival régnait dans les rues du centre-ville jeudi. Là où habituellement l’omniprésence des voitures empêche pratiquement tout cycliste potentiel normalement constitué de s’aventurer sur les mêmes voies de circulation, les vélos régnaient en maîtres cette fois. Chiffres à l’appui, Vítek Masare confirme :
« Selon les statistiques, un peu plus de 10 000 personnes à Prague se rendent chaque jour à leur travail à vélo. Ce matin, rien qu’entre sept et huit heures, c’est-à-dire à l’heure de pointe, les appareils de mesure sur les pistes cyclables ont recensé près de dix fois plus de cyclistes. Mais comme ces appareils de mesure ne sont pas installés partout, on peut estimer qu’il y avait plus de 100 000 personnes à vélo ce matin à Prague. »Par crainte d’embouteillages monstres, nombreux sont les Pragois vivant à l’écart du centre-ville qui ont préféré laisser leur voiture au garage. Mais pour les usagers des transports en commun, qui comptent parmi les plus nombreux en Europe (45 % de la population à Prague utilisent les transports en commun), le vélo a été un choix, certes agréable mais forcé, comme l’admet cette jeune femme, cycliste occasionnelle :
« Normalement, je me déplace d’abord en bus, puis en métro avant de prendre encore un tram jusqu’à mon lieu de travail. Aujourd’hui, je me suis rendue jusqu’à cet arrêt de bus à vélo et j’espère qu’un bus va bientôt passer, même si je ne sais pas combien de temps je vais devoir attendre. Ensuite, si le bus passe bien et une fois que j’en serai descendue, il faudra que je remonte sur mon vélo et que je me débrouille pour me rendre au travail, car je vais me retrouver dans un coin que je ne connais pas bien. Mais si le bus ne passe pas, je ne sais pas ce que je ferai. Je ne suis pas habituée aux longues distances et je ne serais pas capable de faire tout le trajet uniquement à vélo. »Les partisans d’une Prague mieux adaptée à la pratique du vélo espèrent que la grève de jeudi contribuera à faire évoluer les mentalités des habitants de la capitale, et d’abord celles des cyclistes potentiels, qui se plaignent souvent des mauvaises conditions, notamment de sécurité. Vítek Masare estime que c’est d’abord aux amateurs de vélo de se mobiliser :
« Je pense que plus que le nombre de voitures dans les rues, ce qui importe, c’est le nombre de vélos. Les gens qui se déplacent à vélo se sentent rassurés quand ils voient qu’ils ne sont pas seuls et qu’il y a d’autres cyclistes autour d’eux. Et surtout ils n’ont pas le sentiment de gêner ou de ne pas être à leur place. »Jeudi, c’est sûr, les dizaines de milliers de cyclistes n’ont gêné personne, et surtout pas ceux qui regrettaient presque qu’il n’y ait pas plus souvent de grève des transports à Prague.