Industrie de l’habillement : des salaires proches du seuil de pauvreté en Europe orientale
Les salaires dans l’industrie de l’habillement en Europe orientale ont fait l’objet récemment d’un rapport de l’initiative Clean Clothes Campaign, une ONG néerlandaise dont l’interlocuteur tchèque est l’association Na Zemi (Sur Terre) basée à Brno, en Moravie. Le nouveau rapport complète les études portant sur les conditions du travail dans les pays du Sud et montre que le bas niveau des salaires dans ce secteur constitue une règle globale.
Cette relocalisation se fait non seulement depuis l’Europe de l’Ouest, mais aussi les pays du Sud. Après l’accident de Rana Plaza au Bangladesh, où un immeuble abritant plusieurs ateliers travaillant au service de grandes marques de prêt-à-porter s’est effondré en avril 2013, causant la mort de plus d’un millier de personnes, plusieurs compagnies ont annoncé leur volonté de produire ailleurs, notamment dans les PECO. Cependant, le rapport de Clean Clothes Campaign révèle que les conditions du travail, notamment salariales, ne sont guère meilleures en Europe. Membre de l’ONG Na Zemi (Sur Terre), Petr Mareš présente la principale conclusion du rapport :
« L’étude démontre que l’existence de meilleures conditions salariales à l’Ouest est un mythe. Au contraire, il apparaît que les travailleurs dans les PECO ou dans l’Europe du sud-est sont confrontés à des conditions de travail similaires. »Au niveau des salaires, le rapport confirme que les rémunérations dans l’industrie de l’habillement se situent partout à un niveau inférieur au seuil de pauvreté. Défini par l’UE, celui-ci représente 60 % du revenu médian. En Slovaquie, par exemple, pays dont le contexte est le plus proche du tchèque, le seuil de pauvreté est de 406 euros, si le salaire mensuel moyen net des employés dans l’industrie de l’habillement est de 392 euros, le salaire minimum légal est de 100 euros inférieur à cette somme.
Parmi les autres maux détectés lors de la rédaction du rapport figurent l’emploi des travailleurs indépendants, contraints de prendre eux-mêmes en charge leurs frais d’assurances, le non-respect du droit aux congés ou encore les pressions dissuasives exercées contre les syndicaux. Toutefois, quand on se penche sur la situation en République tchèque, les recherches restent vaines. Petr Mareš explique pourquoi :
« La raison est assez terre à terre. Pour des raisons financières, nous n’avons pas pu réaliser une telle recherche au niveau national, ce qui ne nous a pas permis de faire partie de ce rapport. Néanmoins, selon les données dont nous disposons, en République tchèque, un peu plus de 11 000 personnes travaillent dans l’industrie de l’habillement. En prenant en compte les employés de l’industrie du textile, nous parlons d’environ 30 000 personnes. Dans les années 1990, le nombre de postes dans l’habillement a rapidement baissé. Aujourd’hui, le secteur stagne. Le salaire moyen est de 14 000 couronnes (520 euros). On peut en déduire que les travailleurs tchèques, en majorité des femmes, n’atteignent pas, eux non plus, le salaire minimum vital qui les protégerait du risque de la pauvreté. »
Par ailleurs, le souvenir de l’écroulement de la production tchèque de vêtements est encore vif. Il y a quinze jours à peine de cela, les usines de ce qui était le plus grand producteur tchèque du prêt-à-porter, OP Prostějov, ont été dynamitées après la faillite de l’entreprise suite à sa privatisation dans les années 1990. Le procès en justice pour fraude et corruption impliquant les anciens responsables d’OP Prostějov n’est toujours pas achevé.Néanmoins, pour ne pas devoir extraire les conclusions des rapports régionaux et afin de disposer de données exactes et récentes sur les conditions de travail dans l’industrie de l’habillement en République tchèque, un rapport national est nécessaire. L’ONG Na Zemi prévoit son lancement pour la fin de cette année avec un budget de 3 000 euros et plusieurs mois de recueil et d’analyse des données.