Inquiétante montée de l'extrémisme en Tchéquie

Extrémisme et criminalité raciste en progression inquiétante en Tchéquie, depuis 1996. Le ministre de l'Intérieur, Stanislav Gross, fait le point, ce mercredi, en conseil des ministres, tandis que les experts divergent sur les moyens d'éponger le phénomène. Omar Mounir.

En 1996, les personnes poursuivies pour délits et crimes racistes étaient 152. En 1997, ils étaient 229, puis 434 en 1999, puis 449 en l'an 2000. Les experts du ministère de l'Intérieur estiment que le traitement pénal du phénomène est inopérant, puisqu'il s'attaque aux conséquences, à l'exclusion des causes, et que le meilleur moyen serait la prévention, doublée d'une large information. Le sociologue Jan Keller n'est pas de cet avis. Pour lui, contre l'extrémisme, rien ne vaut la répression. "Dans la pratique, a-t-il dit, je ne vois pas en quoi on pourrait convaincre des skinheads en leur organisant une visite dans un camp de concentration". Et d'ajouter que les vraies causes de l'extrémisme, aussi bien de gauche que de droite, résident dans les mauvaises conditions sociales, le chômage et le flux de main-d'oeuvre non qualifiée de l'est. Il y a même, à son avis, pour l'opinion publique, de quoi sympathiser avec l'extrémisme dans ces conditions.

Le politologue Zdenek Zboril a une autre opinion. De son point de vue, le problème n'est pas la répression mais la manière de l'exercer contre des gosses de quinze, seize ans. Il estime que l'état doit mettre son argent plutôt dans l'observation de l'extrémisme et la prévention, selon des méthodes éprouvées dans d'autres pays.

A s'en référer aux données de la police, les mouvements extrémistes totalisent 10.000 membres en Tchéquie, soit une progression de 36% par rapport à 1999, où ils n'étaient que 7500. La plus grande concentration d'extrémistes se trouve surtout à Prague, en Moravie du nord et en Bohême du nord, des régions connues par leurs taux de chômage élevés. Les anarchistes sont estimés à 4300 et les skinheads à 6200.

Un nouveau facteur est apparu, qui inquiète à son tour la police : "le tourisme extrémiste". Ils s'agit de jeunes skinheads, qui viennent en vacances en Tchéquie, principalement d'Allemagne, et qui se sont déjà fait arrêter pour avoir perpétué des agressions racistes contre des Arméniens, des Bulgares, des Soudanais, des Irakiens ou des Libyens. Le rapport du ministère de l'Intérieur tire la sonnette d'alarme, en particulier, en raison d'une attaque raciste perpétrée en Moravie du nord, par 8 ressortissants allemands, contre des Tchèques, ce qui n'est pas sans rappeler les affres du protectorat allemand, lors de la Deuxième Guerre mondiale.

Auteur: Omar Mounir
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