« Islande année zéro » : un regard franco-tchèque sur la crise islandaise

'Islande année zéro', photo: MFDF Jihlava

Veronika Janatková est productrice de films documentaires. Elle travaille beaucoup dans le cadre de projets multinationaux. Elle a présenté cette année, dans le festival de films documentaires de Jihlava, un film franco-tchèque sur le vécu des Islandais face à la crise économique.

'Islande année zéro',  photo: MFDF Jihlava
« C’est un film documentaire que j’ai fait en collaboration avec le réalisateur Sigurður Hallmar Magnússon et Armande Chollat-Namy. Je les ai rencontrés il y a presque dix ans à Prague pendant nos études à la Famu. Puis ils sont rentrés en France et c’est de la France qu’ils ont eu cette idée de faire un film sur l’Islande. On a commencé à tourner après la crise en 2008 et le film parle de l’impact de la crise sur les gens. On n’a pas voulu faire une analyse de la crise économique, mais on voulait plutôt voir comment ça se répercute sur la vie des gens, sur une nation qui était une nation capitaliste, et voir comment cela changeait les gens, leurs façons de penser, leurs valeurs etc. »

Le projet est né en France selon tes propos. Il est vrai que la crise en l’Islande et la gestion de cette crise a attiré l’attention de certains économistes et intellectuels, parce que les Islandais ont essayé de prendre une voie différente pour résorber cette crise que d’autres gouvernements européens. La crise islandaise et la gestion de cette crise était-elle un sujet qui intéresse aussi en République tchèque ?

'Islande année zéro',  photo: MFDF Jihlava
« En fait cette crise se passait partout et on a pris l’Islande parce que c’est un pays très petit et ses impacts ont été clairs assez rapidement. Mais ça peut intéresser n’importe qui qui est frappé par cette crise. Et l’idée est venue de France parce que le réalisateur vit en France depuis huit ans et il a donc son regard un peu national (ndlr : le réalisateur est islandais) et étranger en même temps. Mais le film peut parler à tous les pays d’Europe. »

Quand j’évoquais la gestion particulière de la crise, c’est parce que l’Islande est le premier, et peut-être même jusqu’à présent le seul pays où le peuple islandais a refusé de renflouer lui-même les banques. L’Islande a donc réagi différemment des autres pays touchés par cette crise économique, venue de la crise dite des subprimes. Mais quand vous avez tourné le film, cela n’était peut-être pas encore d’actualité. Quelles étaient donc les conditions quand vous y étiez, en 2008 ?

« La crise n’est toujours pas finie mais depuis 2010, 1011, on commence à gérer ce « ice-safe » avec le Danemark et la Hollande. Mais quand on était là-bas, ce n’était pas encore d’actualité. Mais l’Islande est assez indépendant parce qu’il n’y a pas l’euro. Il y a une couronne islandaise donc l’Etat peut gérer assez bien indépendamment. »

'Islande année zéro',  photo: MFDF Jihlava
Sur ce travail cinématographique et sur la production, on peut remarquer à Jihlava ou ailleurs que les films documentaires sont la plupart du temps des coproductions internationales. Est-ce par choix ou par contrainte ?

« Pour la République tchèque, il faut dire qu’il faut presque toujours faire de cette façon parce que malheureusement, on n’a jamais assez de soutien pour faire des films documentaires de création. La réalisation du film a duré presque quatre ans et notre réalisateur n’est pas tchèque alors c’est vraiment presque impossible de trouver des financements. Mais en France, la coproduction s’est très bien passée. On n’a pas trouvé beaucoup d’argent pour faire le film mais le résultat est très bon et les financements principaux sont venus de la France. »

C’est aussi un film très beau, très esthétique. Le paysage islandais s’y prête sans doute très bien, avec son côté mystérieux. Comment travaillent les réalisateurs, Sigurður Hallmar Magnússon et Armande Chollat-Namy ?

'Islande année zéro',  photo: MFDF Jihlava
« Oui, les deux réalisateurs-auteurs viennent de la fiction et je crois que cela se voit dans le film. On utilise une narration cinématographique qui est plutôt utilisée dans la fiction. Et ce film, Islande année zéro, était le premier film documentaire des deux auteurs. Sinon, ils sont tous les deux très expérimentés dans la fiction et dans les films expérimentaux qui utilisent beaucoup l’expression cinématographique. Et je crois que ça se voit bien dans le film, ce sont de très belles images. »

Le film a été présenté à Jihlava, dans le cadre du festival du film documentaire. Comment s’est passée la projection et que cela représente-t-il pour ce film d’être projeté à Jihlava ?

« Pour nous, être à Jihlava, c’était vraiment important parce qu’on avait déjà présenté ce projet en 2009 et cette année j’ai eu le plaisir de pouvoir faire la première à Jihlava. Ca s’est très bien passé parce que la salle de projection était complètement pleine, le public était content et j’ai eu plein de questions après la projection. C’était super. Et le prochaine projection va se passer dans un mois à Jarkarta en Indonésie. »

'Islande année zéro',  photo: MFDF Jihlava
Et je peux rajouter qu’il a été nommé pour la compétition Sylver eye…

« Oui, on a été nominé dans la compétition Sylver eye et aussi on a été accepté pour le East Silver Caravan où chaque année sont choisis les meilleurs trente films d’Europe de l’Est. Bon, notre film n’a pas vraiment d’autre relation avec l’Europe de l’Est que moi, mais quand même, on a été choisi ! »