Karlovy Vary 2016 : la promotion du cinéma d’auteur « un peu plus radical »
Acteur emblématique du cinéma indépendant américain, Willem Dafoe sera l’invité majeur de la 51e édition du festival international du film de Karlovy Vary. Il y aura aussi le scénariste Charlie Kaufman, oscarisé pour « Eternal Sunshine of the Spotless Mind » ou encore l’acteur Sergi López, révélé dans « Harry, un ami qui vous veut du bien ». La ville thermale de Karlovy Vary accueille le plus important festival de cinéma en Europe centrale du 1er au 9 juillet prochain. Pour en parler, Radio Prague a contacté. Eva Zaoralová, la conseillère artistique de l’événement :
« Comme vous dites, il n’y a pas beaucoup de films français en compétition. Il n’y a qu’un film en compétition dans la section des documentaires. Il s’appelle ‘La Permanence’. Il a été fait par quelqu’un qui s’appelle Alice Diop. Mais pour les autres sections, bien sûr nous avons plusieurs films. Nous avons par exemple pris un film que nous avons vu, mon successeur au poste de directeur artistique Karel Och et moi-même, l’année passée à Venise. C’est ‘L’Hermine’ de Christian Vincent. Nous sommes contents de l’avoir dans la section ‘Horizons’, où l’on montre les films importants montrés dans les autres festivals. Nous avons cherché à ramener le maximum de films français du festival de Cannes et nous avons obtenu le film de Bruno Dumont, ‘Ma Loute’. Mais nous avons également d’autres films, par exemple le film de Bouli Lanners, ‘Les Premiers, les Derniers’. C’est un film assez important pour moi car c’est vraiment le type de films qui correspond au goût actuel de notre comité de sélection. »
« Les Premiers, les Derniers », c’est un film qui a d’ailleurs gagné une récompense à la Berlinale. Il y a par ailleurs deux films tchèques en compétition, « Vlk z Královských Vinohrad » du réalisateur Jan Němec, décédé en mars dernier, et Učitelka, de Jan Hřebejk. Qu’est-ce que cela dit sur le cinéma tchèque contemporain ?« Nous cherchons à avoir tous les ans le cinéma tchèque en compétition. Nous avons cette année aussi des films tchèques en compétition dans la section ‘East of the West’. Quant à Jan Hřebejk, il a déjà été plusieurs fois invité par le festival et il a déjà remporté un prix assez important. Mais ce que je voudrais souligner, c’est le film de Jan Němec. Jan Němec a été quelqu’un de très important pour le cinéma tchèque. C’était peut-être le plus grand nom de la Nouvelle vague tchèque. Ce qui est très étonnant, c’est qu’il est resté pratiquement le seul réalisateur très actif même au temps du cinéma de marché. Parce qu’il n’était pas facile pour les cinéastes de la Nouvelle vague de se réadapter à faire des films dans les années de la liberté. C’était vraiment assez bizarre parce que, au moment du socialisme, ils avaient l’argent, ils n’avaient pas liberté. Tandis qu’après 1989, ils ont eu la liberté mais ils n’avaient plus l’argent. »
Ce n’est pas un film tchèque mais il parle de l’histoire tchèque : c’est le long-métrage « Anthropoid », avec Jamie Dornan ou encore Charlotte le Bon, qui sera présenté en avant-première mondiale en ouverture du festival. Vous pouvez nous dire quelques mots sur ce film qui parle de l’attentat à Prague contre Reinhard Heydrich en 1942 ?« Je dois vous dire que je n’ai pas vu le film mais bien sûr je connais l’épisode dont il parle. Donc pour nous, c’est un film très important parce que c’est un épisode historique traité par un réalisateur de l’Ouest. Ce qui est très marquant, non seulement pour notre cinéma, mais pour notre histoire en général, c’est que quelqu’un en Angleterre a trouvé cet épisode si important, pas seulement pour la République tchèque ou le peuple tchèque, mais aussi pour la lutte contre le nazisme, la lutte contre le fascisme durant la Seconde Guerre mondiale. »
Vous avez parlé du film de Bouli Lanners qui correspond à l’orientation artistique que vous voulez donner à la programmation de Karlovy Vary. Quelle est cette orientation artistique ?
« Si vous venez à Karlovy Vary et que vous regardez notre compétition, vous vous rendez compte que ce sont des films qui disent quelque chose d’assez important et ils le disent d’une façon très originale. On peut dire que c’est le cinéma d’auteur. Mais le cinéma d’auteur peut être un peu plus radical que celui qu’on me montre par exemple en France pour faire la sélection. Vous savez, c’est très difficile de faire la sélection parce que, après les films qui vont à Cannes, qui vont à Venise, il est difficile de trouver un film qui correspond à nos goûts, à notre idée du cinéma d’auteur actuel. »