La chronophotographie de Johel Mitéran à Prague

Photo: Johel Mitéran

Photographe, enseignant et chercheur à l’Université de Bourgogne à Dijon, Johel Mitéran aka Karleener, son pseudonyme, dévoile à Prague ses œuvres les plus récentes dans le cadre de la série intitulée « Portraits fugaces ». Jusqu’au 4 janvier prochain au café Mlýnská kavárna sur l’île de Kampa, les visiteurs peuvent venir apprécier cette exposition, dont l’auteur a répondu aux questions de Radio Prague à l’occasion de son vernissage.

Photo: Johel Mitéran
L'artiste crée et le savant découvre. Johel Mitéran est passionné par le traitement de l’image, une activité qu’il développe dans le cadre de son travail universitaire et qui semble prévaloir sur sa démarche artistique :

« Mon métier principal, c’est plutôt l’enseignement et la recherche dans le domaine du traitement de l’image, du traitement informatique par exemple, pour faire de la reconnaissance automatique de forme. Il s’agit aussi de faire de la détection de problème, comme la détection du cancer. C’est donc une activité relativement variée. La photographie est pour moi une activité secondaire. »

L’artiste trouve l’inspiration dans son travail de chercheur en s’appuyant sur ses connaissances techniques et en y ajoutant une pincée d’émotions. Depuis 2009, « Portraits fugaces » est déjà sa cinquième exposition en République tchèque. L’artiste français a un lien particulier avec la République tchèque et nous lui avons demandé pourquoi :

Photo: Johel Mitéran
« Je suis marié à une femme tchèque depuis déjà un certain nombre d’années. Ma fille est française et tchèque, elle est scolarisée en République tchèque, donc je viens très régulièrement ici. J’expose aussi bien en France qu’en République tchèque, à Prague ou à Český Krumlov notamment. »

Le style de ses photos répond aux critères typiques de l’art postmoderne : la fragmentation, le collage, les réminiscences. Il fait des liens entre des courants modernes, comme le surréalisme, et l’art classique, ce qui crée un nouvel univers de l’imaginaire :

« Il y a pas mal de photographes qui travaillent en mélangeant effectivement leur culture liée à la peinture, à la photographie classique et aux effets qu’on peut obtenir grâce à l’art digital ou à la transformation numérique de l’image. Il est donc vrai que c’est un courant ou au moins une technique. Ensuite, les représentations peuvent être extrêmement diverses, on peut avoir tellement de choses différentes que c’est difficile de donner une idée générale. En ce qui me concerne, je m’inspire de la peinture classique et de la photographie pour obtenir une sorte de mélange des deux. »

Photo: Johel Mitéran
Le pseudonyme de l’artiste, Karleener, vient du nom du quartier pragois où habite sa famille. Johel Mitéran, ou Karleener donc, a partagé avec Radio Prague l’idée qu’il voulait transmettre par le biais de cette exposition :

« L’idée principale, c’est le mouvement, saisir le mouvement avec différentes techniques issues notamment de la photographie. Un photographe du nom d’Étienne-Jules Marey a inventé au début du XXe siècle la chronophotographie pour des raisons scientifiques, pour l’analyse du mouvement et ça a été repris depuis pour pas mal d’œuvres artistiques. Comme par exemple Duchamp et son Nu descendant un escalier. Donc, j’ai réutilisé cette technique comme d’autres photographes ont pu le faire par ailleurs. C’est-à-dire mélanger avec d’autres techniques qui permettent de saisir des expressions corporelles et de traduire des émotions à la fois spontanées et contenant l’intégralité du mouvement. Cela permet aussi de voir aussi plusieurs images dans un même mouvement pour raconter une petite histoire. »

Sur les murs du café, certaines photographies apparaissent floues voire imprécises. Johel Mitéran explique :

« Le cliché où on a plusieurs personnages dans la même image est réalisé grâce à cette technique de la chronophotographie : plusieurs flashs au sein d’une même pose. Donc il n’y a pas de montage numérique. Ensuite, les autres sont des poses longues avec un seul flash qui permettent d’avoir à la fois le filet du mouvement et en même temps de figer le mouvement à un instant donné. Il faut arriver à saisir la pose intéressante en plein milieu du mouvement et en même temps avoir cette intégralité qui donne la fluidité. C’est un peu comme en bande dessiné où les dessinateurs tracent des traits autour des personnages, mais là c’est donné naturellement par la pose longue. »

Pour plus d’informations sur le photographe français Johél Mitéran, rendez-vous sur son site officiel www.karleener.fr.