La Radiodiffusion tchèque fête ses 85 ans
"Allô, allô, ici la station radiophonique du Radiojournal à Kbely près de Prague. " Le 18 mai 1923, 20 H 15, tente militaire campée à Kbely, banlieue de Prague : c’est ce jour-ci, il y a 85 ans, qu’à partir de cet endroit, la parole tchèque retentit pour la première fois sur les ondes radiophonique. La Tchécoslovaquie devenait alors l’un des premiers Etats en Europe, après la Grande-Bretagne et la France, à commencer ses émissions radiophoniques régulières. Ce dimanche, 85 ans se seront écoulés depuis : l’occasion de consacrer cette émission aux débuts de la radiodiffusion dans notre pays et de feuilleter nos archives sonores.
Deux noms restent liés aux débuts de la radiodiffusion chez nous : ceux de Miloš Čtrnáctý et Eduard Svoboda, qui fondent, le 7 juin 1923, la société à responsabilité limitée Radiojournal, le nom que la première chaîne de la Radio tchèque, société d’intérêt public, utilise aujourd’hui. Les débuts mêmes sont plus que modestes et même illégaux vu l’absence de législation appropriée. On diffuse une heure par jour, de 20 H à 21 H, où les conditions de réception sont les meilleures. Or, déjà à la fin de la première année d’existence de la radio, la diffusion de la tente de Kbely est arrêtée et on ouvre les studios dans le bâtiment de la Bourse des Postes, avenue Foch, nom à l’époque de l’actuelle rue Vinohradská.
Présenter toute l'histoire de la radio demanderait des heures. Illustrons cet anniversaire par des voix d’hommes qui ont parlé sur ses ondes. Dans les archives sonores j’ai choisi pour vous des interlocuteurs français - personnalités politiques et culturelles qui, lors de leurs séjours à Prague, ont parlé au micro de la Radio publique tchécoslovaque. Les enregistrements datent des années 1930 et la présence de ces personnalités à Prague témoigne des liens franco-tchèques très étroits, à l’époque :
« Je suis heureux que la dernière étape de mon voyage d’amitié ait été Prague, noble capitale d’un grand pays si riche de souvenirs, de réalisations présentes et d’espérances d’avenir. »
La voix que vous écoutez est celle de M. Yvon Delbos, qui fut notamment ministre des Affaires étrangères et ministre de l’Education nationale. Il est le chef de la diplomatie dans le cabinet Léon Blum lorsqu’il arrive, en décembre 1937, à Prague, pour fêter le 20e anniversaire de la fondation des Légions tchécoslovaques en France :
« Avant de quitter votre patrie dont je n’oublierai jamais l’incomparable accueil, je tiens à vous dire ma certitude accrue que la solidarité qui nous unit est inaltérable car elle repose, plus encore que sur nos intérêts communs, sur la fraternité de nos armes et de nos cœurs. Cette fraternité a reçu des preuves des siècles. Jadis, un roi de Bohême et un roi de France la sanctionnèrent par un traité. Nous avons renoué ce lien qui est aujourd’hui plus fort que jamais car nous nous sentons, au-delà des souvenirs historiques, étroitement associés dans le culte des mêmes valeurs morales. J’ai, durant mon bref séjour, particulièrement admiré l’intensité des efforts déployés et les succès remportés par la Tchécoslovaquie dans tous les domaines. J’ai été non moins vivement frappé de l’intérêt profond que portent toutes les classes de votre pays à l’extension des relations intellectuelles qui unissent la Tchécoslovaquie et la France. Soyez assurés qu’aucun effort ne sera négligé par le gouvernement français pour rendre ces liens spirituels toujours plus étroits. Du fond du cœur, j’adresse à tous les amis tchécoslovaques qui m’écoutent le message affectueux de la France. »M. Pierre Cot, ministre de l’Air et du Commerce est une autre personnalité politique française qui a parlé sur les ondes de la Radio tchécoslovaque. M. Cot s’est rendu à Prague le 1er septembre 1938. Bien étrange sentiment d’entendre ses propos pleins d’espoir accordés à la Radio tchécoslovaque à la veille de la conférence de Munich :
« Je suis heureux de l’occasion qui m’est donnée de saluer le noble peuple tchécoslovaque. Les Français sont très reconnaissants à votre gouvernement de l’esprit de conciliation dont il fait preuve au cours des négociations actuelles. Nous admirons et nous aimons surtout M. le président Benes qui a rendu non seulement à la République tchécoslovaque, mais à la cause de la paix dans le monde entier tant de services. Comme vous, nous Français, nous sommes prêts à faire les plus grandes concessions à la paix. Nous sommes convaincus que tout vaut mieux que la guerre. Tous les hommes sérieux et responsables en France sont partisans de la sécurité collective. Il n’est pas en Europe une seule démocratie qui pourrait toute seule assurer sa propre sécurité. En terminant je vous adresse une parole d’espoir : malgré vos difficultés, je considère que l’entente des démocraties sauvera la paix. »
Voici à présent un extrait du discours non pas d’un politicien, mais d’un ecclésiastique, le cardinal et archevêque de Paris, Jean Verdier, adressé le 1er juillet 1937 au 1er congrès national des catholiques tchécoslovaques :
« Chers catholiques de la Tchécoslovaquie, le cardinal légat veut vous dire à vous tous et notamment à ceux qui n’avaient pas pu assister à nos fêtes le salut le plus paternel et les vœux les plus ardents. Ce congrès a été vraiment magnifique. Le nombre des catholiques présents a atteint des chiffres gigantesques. L’enthousiasme de tous était émouvant. Les réunions particulières avaient un charme qu’on ne trouve qu’en Tchécoslovaquie. Chaque groupe avait sa langue, ses chants, ses costumes si caractéristiques. Mais, quand tous les fils de la grande Tchécoslovaquie furent réunis sur la place Saint-Venceslas et sur l’immense stade ensemble, ils offraient le plus beau spectacle qu’il soit possible de voir sur cette Terre. »
Terminons cette page d’histoire consacrée au 85e anniversaire de la Radiodiffusion tchécoslovaque avec un salut prononcé sur ses ondes le 13 décembre 1933 par M. Léon Noël, personnalité politique française, député, ministre, ambassadeur, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, président du Conseil constitutionnel français :« La radio particulièrement répandue dans votre beau pays, en me permettant de faire entendre ma voix, me fournit une possibilité dont je veux profiter. De votre grande capitale, à vous tous, Tchécoslovaques qui m’écoutez, je suis heureux d’adresser, au nom de la démocratie française, sœur aînée de la vôtre, un fraternel et cordial salut. »