L’avenir du photovoltaïque tchèque s’assombrit
On aurait tendance à l’oublier en ce début de printemps pluvieux, mais le soleil est une source d’énergie prometteuse. Beaucoup y voient une des meilleures options pour préparer l’après-pétrole et concurrencer le nucléaire toujours plus remis en question. C’est donc en toute logique que le secteur de l’énergie solaire se développe à toute vitesse à travers le monde. Mais difficultés financières obligent, le gouvernement tchèque a décidé d’y mettre un coup de frein.
Mais l’actuel gouvernement ne cache pas sa préférence pour le nucléaire, également très coûteux mais bien plus rentable. On le sait en train de préparer une nouvelle loi qui prévoit tout simplement des coupes draconiennes dans les aides publiques allouées au développement du photovoltaïque, lequel concerne en République tchèque 22 000 entreprises et 120 000 personnes.
Les installations bénéficiaires après la première décennie de fonctionnement ne pourraient plus être subventionnées durant 20 ans, comme c’est le cas actuellement, mais seulement pour ces dix premières années. L’objectif est d’éviter de subventionner des investisseurs qui assurent un rendement de l’ordre de 3 ou 4%. Le gouvernement souhaiterait également qu’à partir de 2014, aucune centrale photovoltaïque nouvellement construite ne reçoive de deniers publics en guise de subventions.
Martin Kuba, le ministre de l’Industrie et du Commerce, affirme que c’est également dans l’intérêt du consommateur, car l’énergie photovoltaïque serait responsable de l’augmentation de la facture mensuelle. On l’écoute :« Parmi les différentes sources d’énergie disponibles en République tchèque, le photovoltaïque est celle qui a connu la hausse de prix la plus importante. L’électricité venant des énergies renouvelables a subi une augmentation qui a pu aller de 50 couronnes à environ 600 couronnes par mégawatheure. »
On pourrait en être surpris au premier abord, mais cette mesure ne suscite pas de débat politique, l’opposition ne taclant pas le gouvernement sur le fond de sa décision. Bohuslav Sobotka, leader du parti social-démocrate, est même prêt à applaudir, tout en laissant poindre le regret qu’une telle annonce arrive peut-être un peu tard : « On en est arrivé à une situation où investir dans le domaine du photovoltaïque permettait de profiter d’avantages importants, et l’inaction du gouvernement ainsi que du Conseil de régulation énergétique ont laissé la voie à des faveurs trop importantes. »Si les partis politiques sont presque unanimes sur la question, c’est en effet que les aides allouées au photovoltaïque avaient engendré des abus, et des affaires de corruption impliquant ces fonds ont éclaté encore très récemment.
En revanche, la grogne peut se faire sentir du côté des investisseurs. Les banques sont au premier plan des opposants à ce projet. Un chiffre permet de le comprendre : 4 milliards, c’est en euros le montant qu’elles ont investi dans le photovoltaïque tchèque. Et avec le plan gouvernemental, beaucoup craignent la liquidation de nombreuses sociétés. On écoute Jan Matoušek, de l‘association bancaire tchèque :
« A partir du moment où il y a des modifications dans le soutien qui est accordé à ce secteur, cela signifie, pour nous les banques, qu’il faut faire une réévaluation du risque de tous les investissements. »Et puis, d’un point de vue purement environnemental, le photovoltaïque ne fait plus nécessairement office de Saint Graal dans la lutte contre l’empreinte climatique. Certes, la production d’énergie en elle-même est complètement propre, ce qui pousse la plupart des associations écologistes à défendre ce mode de production, mais des critiques s’élèvent quant à la conception des panneaux solaires, qui peut s’avérer très nocive pour l’environnement.
De son côté, le gouvernement tchèque avait l’an dernier annoncé un plan de relance du nucléaire dans le pays, passant le nombre de réacteurs de 6 à 9 et prolongeant la durée de vie de ceux existant déjà. Cette décision n’était pas au goût du voisin autrichien, mais Prague a fait fi des critiques. Au moins, des atomes, il y en a même quand il pleut.