Le logement social, clé pour résoudre le problème de l’exclusion,n’a toujours pas de loi propre

Photo: ČT24

Le nombre de localités défavorisées, devenant des ghettos, ne cesse d’augmenter en République tchèque. Estimé à un peu plus de 300 en 2006, il a largement doublé depuis. En cause, selon les ONG spécialisées dans les problématiques du logement social et de l’intégration, l’immobilisme des pouvoirs publics.

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« Les gouvernements successifs depuis les années 1990 ont d’abord complètement ignoré le problème de l’exclusion sociale et n’ont pas cherché de solutions. Plus tard certains hommes politiques ont utilisé le problème de manière populiste. Dans la plupart des déclarations de programme des gouvernements, on entend toujours que la solution se trouve dans telle ou telle restriction, mais jusqu’à présent personne n’est arrivé à rien. »

Martin Šimáček est à la tête d’un organisme indépendant, l’Institut pour l’inclusion sociale. Ancien directeur de l’Agence gouvernementale pour l’intégration sociale, il avait été limogé par le ministre en charge des droits de l’Homme de l’époque en raison, entre autres, de différends sur la manière d’approcher cette problématique de l’exclusion sociale. Il avait ensuite été à l’origine de la création de ce nouvel institut qui vise à conseiller politiques et administrations locales sur cette question.

Car en République tchèque, parler de ghettos et d’exclusion sociale est immédiatement associé à la question de la minorité rom et donc, c’est un sujet qui coince. Or, tout le travail de Martin Šimáček et de son institut, tout comme celui de nombreuses ONG, c’est de sensibiliser l’opinion et les pouvoirs publics au fait que l’exclusion sociale peut être une menace pour tout un chacun : même si une grande partie de la communauté rom est concernée, c’est aussi le cas des seniors, des personnes handicapées, des personnes sans emploi, des mères célibataires, quelle que soit leur origine. Une population fragilisée, victime facile des marchands de sommeil, et susceptible d’être touchée par des problèmes de drogue, d’endettement, de pauvreté, et de petite délinquance.

Martin Šimáček,  photo: Jana Šustová
Le gouvernement actuel, par la voix de son Premier ministre en démission, Andrej Babiš, envisage, entre autres, de limiter les allocations au logement. Pour Martin Šimáček, ce n’est toutefois pas une solution au problème :

« Il faut se rendre compte qu’à l’heure actuelle plus de 250 000 foyers sont dépendants de ces allocations, et pas seulement dans ces zones d’exclusion sociale. Toute tentative de changer ce système aura des conséquences sur les personnes les plus pauvres et les plus menacées, comme les familles avec enfants. Sans toucher les soi-disant ‘profiteurs’, dont le ministère du Travail ne connaît même le nombre. Donc oui, une loi sur le logement social peut aider, mais il ne faut pas faire table rase de ce qui existe. Je rappelle aussi que le logement est certes primordial à toute intégration sociale, mais qu’il faut aussi s’attaquer aux domaines de l’emploi et de l’endettement qui s’hérite de générations en générations. »

Autre projet gouvernemental, la construction de logements destinés à ces populations défavorisées. Mais pour les travailleurs sociaux sur le terrain, ce qu’il manque toujours c’est une loi régulant la question du logement social :

« Avec le gouvernement précédent, nous étions sur le point d’avoir enfin une loi. Selon moi, l’actuel gouvernement a présenté un projet qui envisage tout bonnement de recréer des ghettos. Il prévoit des foyers dits sociaux, capables d’accueillir de nombreuses personnes. On ne sait pas à l’heure actuelle de quelle manière ils seront construits. On sait juste qu’ils seront coûteux et sous surveillance. Ce sont les maires qui seront censés déterminer qui ira dans ces foyers. Or, souvent, certains maires ont tendance à essayer de forcer ces populations à quitter leur commune. Donc si ce projet est adopté, il est clair que ces foyers seront des ghettos potentiels créés par l’Etat lui-même. »