Le Mémorial Vojna ou la vie dans un "goulag" tchèque

Les anciens prisonniers au Mémorial Vojna, photo: CTK
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Un Mémorial dédié aux victimes de la dictature communiste a été inauguré mercredi dernier, à l'emplacement de l'ancien camp de travaux forcés Vojna, près de Pribram, en Bohême centrale. Un des rares musées du genre en République tchèque qui jette une lumière crue sur les conditions très dures des prisonniers politiques des années 1950, soumis aux travaux dans des mines d'uranium locales.

Les anciens prisonniers au Mémorial Vojna,  photo: CTK
A une heure de route de Prague, au fin fond d'une forêt et au pied d'une colline du même nom (en tchèque Vojna signifie aussi "la guerre") se trouvent les restes d'un des 16 camps de travail dans le pays, instruments de la répression communiste. Des centaines de détenus, parmi eux des prêtres, écrivains, philosophes, athlètes et héros de la Seconde Guerre mondiale, tous condamnés pour des délits politiques qu'ils n'avaient jamais commis, y ont passé les années les plus noires de leur vie, pour ceux qui ont survécu... Au début des années 1950, ils ont succédé, dans le camp et dans les mines, aux prisonniers de guerre allemands. Pourquoi l'Etat tchèque a-t-il décidé de reconstruire et d'ouvrir au public justement le camp Vojna ? Explication de Josef Velfl, en tête du Musée minier de Pribram qui gère le Mémorial :

"En 1961, l'exploitation de l'uranium dans les trois mines, Vojna 1, 2 et 3, a été terminée et le camp a été fermé. Ensuite, c'est l'armée qui a pris possession de ce complexe et, heureusement, elle n'avait pas les moyens de le rénover. Par conséquent, presque tous les bâtiments de l'époque ont survécu jusqu'à nos jours. C'est assez exceptionnel. Par exemple, le camp voisin de Bytiz a été transformé en un centre pénitencier moderne qui n'a plus rien à voir avec le passé. Et c'est le cas de beaucoup d'anciens camps tchèques et étrangers."

Les anciens prisonniers au Mémorial Vojna,  photo: CTK
Des barbelés, des baraquements aménagés comme à l'époque, des miradors, une minuscule cellule d'isolement souterraine où ont été enfermés, par dizaines et pendant plusieurs jours, les "désobéissants"... Autant de vestiges du passé communiste auquel le public est confronté. Mercredi matin, dans la grisaille et sous une pluie tenace, les rescapés de Vojna ont été parmi les premiers à visiter le Mémorial fraîchement ouvert. Miloslav Beranek, 77 ans, a été détenu à Vojna pendant cinq ans. Etait-il en contact sa famille, pouvait-il, au moins pour quelques jours, quitter le camp ?

"Eh non, pas du tout ! Là, à l'entrée, il y avait un bâtiment où l'on recevait les visites. A moi, on a pu me rendre visite une seule fois durant ces cinq ans. Et quitter le camp ? Il suffisait de s'approcher des barbelés et les gardiens ouvraient le feu !... Vous savez, ce n'est pas ma première visite du camp, on est venu, avec mes amis, quand l'armée était encore là. Si ça a beaucoup changé par rapport aux années 50 ? Oui, effectivement. Si à l'époque ça avait été aussi beau que maintenant... Il ne manque plus que le vendeur de glace!"

Les témoignages d'autres prisonniers de Vojna dans notre émission de vendredi.

Auteur: Magdalena Segertová
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