Le monde de la culture à nouveau mobilisé contre les réductions de budget
Après le conflit opposant les milieux culturels pragois et la municipalité de la capitale au printemps dernier, une partie du monde culturel tchèque se mobilise à nouveau contre les réductions de budget prévues par le ministère de la Culture. A l’occasion du « Forum pour une Europe créative », conférence ministérielle organisée dans le cadre de la Présidence tchèque du conseil de l’UE, environ 300 personnes se sont rassemblées devant le Musée de la musique de Prague où se tenait la conférence.
Entre des pantins, des marionnettes géantes et un « lancer de chaussures » symbolique contre le ministère, la manifestation organisée par l’initiative « Pour une Tchéquie culturelle » ne cachait pas ses sarcasmes en affichant des slogans tels que « les artistes tchèques savent être créatifs avec moins 35% ». Les manifestants venaient ainsi souligner le paradoxe entre la tenue d’une conférence européenne entendant promouvoir la créativité de la culture et une baisse des subventions allant jusqu'à -35%, touchant principalement les arts vivants et la culture indépendante. Anna Pravdová était parmi les manifestants et explique les raisons de sa présence :
« Je suis venue dans cette manifestation pour soutenir la culture indépendante en RT, parce que déjà le gouvernement avait une attitude très méprisante par rapport à la culture. Il a fait un pas de plus encore en coupant le budget de la culture de 6% et en plus, le ministre de la Culture qui a vu son budget diminuer, a enlevé 35% à tous les budgets de la culture indépendante vivante. C’est donc complètement scandaleux et c’est un pas qui liquide plein de sociétés de théâtre indépendant, beaucoup de revues littéraires indépendantes etc. C’est important que les gens se mobilisent et je voie un signe très bon dans le fait que les Tchèques se mobilisent enfin, et qu’on ne peut pas laisser les choses se faire de cette manière. »
L’initiative « Pour une Tchéquie culturelle », qui reprend donc la formule inventée l’année dernière par les artistes pragois en colère, avait entamé le mouvement de protestation avec une lettre ouverte datée du 13 mars dernier et signée par environ 70 personnalités de la culture tchèque. Parmi elles, l’actrice et ancien députée Táňa Fischerová:
« C’était une lettre ouverte où il s’agit de la culture et du fait qu’elle est encore une fois diminuée. Cette fois-ci, cela vient du ministère, alors que l’année dernière, cela venait de la ville. A chaque fois, les gens doivent se rassembler pour protester. Avec la ville, cela s’est au moins un peu arrangé mais le ministère soutient toujours sa position. Et c’est vraiment une liquidation. Certains domaines ne peuvent vraiment pas continuer comme les revues littéraires ou les arts de la danse. Et pour les autres, cette réduction est tellement importante que la culture meurt dans ce pays. »
Le ministre de la Culture, Václav Jehlička, a soutenu que le gouvernement de Topolánek avait augmenté ces dernières années les moyens de la culture mais que la raison principale des réductions de budget est la crise actuelle. Dans ce contexte, la priorité est donnée aux institutions comme le Théâtre national, l’Opéra d’Etat ou la Philharmonie tchèque. Les négociations s’annoncent donc difficiles. Táňa Fischerová :
« Jusqu’à présent, ils se comportent de façon très dure. Quand ils ne veulent rien entendre, ils commencent à se comporter comme à l’époque du régime marxiste et ils commencent à nous traiter comme des ennemis de classe. Ils oublient que c’est notre argent qu’ils administrent et non pas leur propre argent qu’ils nous donnent. Mais c’est difficile de leur expliquer ».
Parallèlement, la conférence ministérielle « Forum pour une Europe créative » se tient à Prague jusqu’au vendredi 27 mars.