Les négociations post-électorales ralenties par les luttes d’intérêts au sein de la social-démocratie
Ceux qui espéraient que les élections législatives anticipées de vendredi et samedi derniers permettent de mettre fin à l’imbroglio politique ont de quoi être déçus. Même s’il a entamé, mercredi, les premières discussions d’approche avec les potentiels partenaires afin de former une coalition gouvernementale, le parti social-démocrate (ČSSD), court vainqueur du scrutin avec un peu plus de 20 % des suffrages, s’enlise surtout dans une crise interne qui complique encore un peu plus la situation.
« Il n’y a eu aucune réunion. J’ai vu monsieur le président Zeman lundi lors de la cérémonie de la remise des décorations d’Etat. Mais samedi soir, il n’y a eu aucune réunion avec monsieur le président. »
Ces propos, Michal Hašek les a tenus mardi soir, en direct, devant des centaines de milliers de téléspectateurs, lors d’une interview accordée à la Télévision tchèque. Au total, le numéro deux du ČSSD a répondu à onze reprises par la négative aux questions répétées de la journaliste cherchant à savoir s’il avait bien rencontré en catimini le président de la République Miloš Zeman samedi soir, quelques heures donc seulement à peine après la fermeture des bureaux de vote.
Ses propos mensongers, Michal Hašek pourrait bientôt amèrement les regretter. Mercredi, le vice-président du principal parti de gauche du pays a été contraint de reconnaître qu’il avait bien rencontré Miloš Zeman deux jours avant la fête nationale. « Compte tenu du fait qu’un des participants n’a pas respecté l’accord qui avait été passé (à savoir que la rencontre avec le chef de l’Etat ne serait pas évoquée en public), nous confirmerons la tenue de cette rencontre », a ainsi fait savoir Michal Hašek sur le réseau social Facebook. En effet, quatre autres représentants du ČSSD ont également participé à la réunion avec Miloš Zeman, et l’un d’entre eux, le second vice-président, Milan Chovanec, a, lui, admis s’être rendu au Château de Prague.
C’est dans ce contexte trouble que la direction de la social-démocratie s’est réunie ce jeudi matin afin de déterminer qui allait mener les tractations post-électorales. A cette occasion, Bohuslav Sobotka, mal vu du président de la République, a été confirmé dans sa position de principal négociateur. Une mission que le leader de la social-démocratie n’entend plus mener avec ceux qu’il a qualifiés de « putschistes » :« Une décision claire et définitive doit être prise. La social-démocratie se doit de se présenter à la table des négociations comme un parti politique uni. Notre parti peut difficilement prétendre être crédible en étant représenté par des gens qui mentent en public de façon répétée. Or, le ČSSD entend être un partenaire sérieux et digne de confiance pour les autres partis. »
Malgré les excuses publiques de Michal Hašek, Bohuslav Sobotka a donc réclamé la démission de ses collègues. Son appel restant pour l’heure lettre morte, une décision définitive devrait être prise lors de la réunion du comité exécutif central de la social-démocratie, le 10 novembre.
En attendant, toujours ce jeudi, le mouvement ANO (Action des citoyens mécontents) du milliardaire Andrej Babiš et le parti chrétien-démocrate (KDU-ČSL), les deux autres composantes d’une possible coalition gouvernementale tripartite, ont publié une déclaration commune dans laquelle leurs représentants ont fait part de leur volonté de composer ensemble un gouvernement. Avec les sociaux-démocrates, ce cabinet disposerait d’une nette majorité à la Chambre des députés avec 111 des 200 sièges. Si toutefois les négociations avec le ČSSD ne devaient pas aboutir, aucun des deux partis, qui estiment avoir des priorités semblables dans leurs programmes, n’intégrerait la coalition. Dans ce cas de figure, ANO et les chrétiens-démocrates seraient néanmoins prêts également à soutenir un gouvernement social-démocrate minoritaire.