Les Nuits de la lecture s'exportent à Prague
Du 20 au 23 janvier 2022 se tiendra la sixième édition des Nuits de la lecture aux quatre coins de la France et pour la première fois aussi à l’étranger. Bibliothèques, théâtres, musées, institutions scolaires, et désormais les institutions culturelles françaises à l’étranger proposeront des soirées spéciales pour mettre à l’honneur la lecture. Cette année, ces Nuits de la lecture auront aussi lieu à l’Institut français de Prague. Florence Salanouve, attachée pour le Livre et le Débat d’idées et directrice de la médiathèque de l’Institut français de Prague, a accepté de nous présenter cet événement :
« Les Nuits de la lecture, ce sont des nuits qui sont organisées par le ministère de la Culture, et cette année par le Centre National du Livre, depuis six ans. Cette année, c’est donc la sixième édition des Nuits de la lecture. L’objectif de ces Nuits de la lecture est de faire lire toutes les générations et de partager des textes formidables lus par de magnifiques comédiens. Donc c’est une opération qui est là pour vanter la lecture en tant que plaisir et en tant que partage. »
Est-ce que l’Institut français de Prague a déjà participé aux Nuits de la lecture ?
« Nous n’avons jamais participé aux Nuits de la lecture parce que c’était tout d’abord une opération qui était dédiée au territoire français et pas à l’étranger. La réussite de l’événement fait que la manifestation peut désormais s’exporter à l’étranger et donc c’est la première fois qu’elle s’exporte à Prague à l’Institut français. Espérons que ce rendez-vous devienne un rendez-vous régulier. »
Comment faire en sorte que la programmation des Nuits de la lecture représente à la fois la communauté francophone et la communauté tchèque ? Comment allez-vous assurer l’équilibre du français et du tchèque dans la programmation ?
« Notre objectif à l’Institut français, et notamment au pôle Livre, c’est de mettre à disposition des traductions de textes français en tchèque mais également des traductions de textes tchèques en français. Je dirais néanmoins que la proportion des textes tchèques en français est beaucoup moins importante : 90% des textes que l’on a sont du français vers le tchèque. C’est cela que nous promouvons à l’Institut français de Prague. L’autre partie, nous la faisons avec des institutions comme CzechLit qui est une institution du département de la bibliothèque morave de Brno. Notre objectif avec les Nuits de la lecture, comme d’habitude pour le pôle Livre, est de travailler à la fois avec du français et du tchèque, car notre public est tchèque mais il est aussi en partie français. On doit donc travailler en quelque sorte sur les deux langues. C’est pour cela que tout notre programme de manifestations littéraires est toujours en traduction simultanée, donc soit du tchèque vers le français, soit du français vers le tchèque pour les personnes qui ne savent pas parler français. Donc tout le programme est en français et en tchèque que ce soit pour le jeudi 20 janvier pour la soirée de lecture qui commence à partir de 18h où l’on aura des textes français en traduction tchèque, ou pour le samedi 22 janvier pour le programme des animations qui aura lieu de 10h à 16h30 et qui s’adresse en particulier aux enfants, puisque c’est la « journée famille ». On aura également des lectures de contes en français et en tchèque, des ateliers créatifs en français et en tchèque pour toute la famille, et des ventes de livres en français et en tchèque. Le bilinguisme est donc assuré. »
Pouvez-vous nous en dire plus sur le programme de l’Insittut français de Prague pour ces Nuits de la lecture?
« Le programme se décline en deux temps. Le premier temps, c’est le jeudi 20 janvier à 18h. Il y a une soirée de lectures avec un comédien qui s’appelle Vladimír Polívka et qui est franco-tchèque. Il lira des textes sur la thématique de l’amour, car cette année, la Nuit de la lecture organisée par le Centre National du Livre a choisi comme thématique l’amour. Nous avons donc choisi des textes autour de l’amour : à la fois sur l’amour, le désamour, l’amour fuyant, le deuil de l’amour, l’amour sous forme romantique l’amour sous forme ironique, l’amour paternel… Il y en aura pour tous les goûts. C’est un événement de lecture. Il y aura la possibilité également à la fin de lire pour toutes les personnes qui souhaitent lire à la fois en français et en tchèque. On aura donc la possibilité de prêter le micro a toutes les personnes qui veulent lire.
La deuxième partie, le second temps, c’est le samedi 20 janvier avec tout un programme d’animations, comme je le disais tout à l’heure, de 10h à 16h30 à l’Institut français de Prague. On aura des lectures de contes pour les enfants de 3 à 7 ans, des ateliers créatifs pour les enfants à partir de 7-8 ans, des ateliers bandes dessinées pour l’après-midi et pour les parents, il y aura des ventes de livre en français et en tchèque, puisque nous avons le partenariat avec la librairie MegaBooks qui se situe à l’entrée de l’Institut français de Prague, avec la librairie Dvě veverky qui est une très belle librairie jeunesse et avec deux maisons d’édition que l’on apprécie particulièrement qui font des livres tchèques jeunesse de très grande qualité : la maison d’édition Meander et la maison d’édition Baobab. »
Vous nous avez parlé de la thématique de l’amour. Comment a-t-elle été choisie ?
« La thématique a été choisie par le Centre National du Livre à partir d’une citation de Victor Hugo qui est porteuse d’espoir qui dit ‘Aimons toujours ! Aimons encore !’. Cette thématique amoureuse est quelque part courageuse parce que l’on on est très rapidement ‘cucul la pralin’, si je puis dire, lorsque l’on évoque l’amour. Cette thématique nécessite donc un traitement à la fois sobre et courageux. Il ne faut pas tomber dans le panneau. C’est pour cela que je disais qu’on a choisi de poser l’amour, mais aussi le désamour, l’amour fuyant, etc., avec des textes et des auteurs qui ont une voix tout à fait différente. Alors là ce sera la surprise. Je ne devrais pas le dire, mais il y aura du Houellebecq, du Virginie Despentes, du Milan Kundera, du Victor Hugo, du Baudelaire et puis d’autres encore. »
Vous avez ouvert un concours qui s’est tenu jusqu’au 10 janvier afin d’inviter les personnes à participer au choix des textes qui seront lus pendant les Nuits de la lecture. Quelle a été l’ampleur de la participation ?
« C’est vrai qu’on a lancé cet appel à participation assez rapidement, fin novembre, car on ne voulait pas limiter l’opération de la lecture à un ou deux jours. La lecture, je dirais que c’est un peu comme la musique, si on veut vraiment progresser, si on veut vraiment apprécier, il faut s’entraîner un peu tous les jours régulièrement et donc c’est pour ça qu’on avait fait un appel pour encourager la lecture et également pour faire participer notre public. On a reçu 37 textes de très grande qualité qui et on a dû choisir, on a dû faire des choix. »
Quels ont été les critères de sélection des textes pour le jury de l’Institut français de Prague ?
« Ah surprise, surprise ! Pour savoir cela, il faut venir à la soirée du jeudi 20 janvier à 18h. Ce que je peux dire, c’est qu’il y aura de la poésie, des auteurs classiques, des plus contemporains. Ce que je peux aussi vous dire, c’est que beaucoup de personnes ont associé la thématique de l’amour à de la poésie, donc on a beaucoup de poèmes qui nous ont été envoyé. Ce que je voulais dire également, ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que des gagnants seront tirés au sort à la fin de la lecture de Vladimír Polívka. Les gagnants pourront gagner des livres, des places de cinéma, et d’autres surprises encore. »
Vous l’avez rappelé, vous aurez un invité exceptionnel, Vladimír Polívka. Pourquoi l’avoir choisi, lui, pour cet événement ?
« Vladimír Polívka, c’est un comédien qui aime monter sur les planches pour lire. Il participe très souvent à la Nuit de la littérature qui est organisée par le centre tchèque chaque année. C’est un comédien qui parle à la fois français et tchèque, parce qu’il est franco-tchèque, et puis, il n’aimerait pas trop qu’on le rappelle sans arrêt, mais tant pis, c’est tout à son honneur : c’est le fils de la grande comédienne et chanteuse Chantal Poullain qui est très connue en République tchèque et on est très fiers qu’il ait accepté notre invitation. »
Selon vos termes, les Nuits de la lecture ont pour vocation « de partir à la conquête de nouveaux lecteurs et réaffirmer, auprès de tous, la place essentielle du livre et de la lecture dans nos vie ». Pourquoi la lecture est-elle si importante selon vous ?
« La lecture est très importante de nos jours. Je dirais qu’il y a un paradoxe : il y a de plus en plus de livres qui sont publiés et en même temps, il y a de moins en moins de lecteurs. Ce que l’on dit également, c’est que la lecture est un bien essentiel. Emmanuel Macron, lorsqu’il choisit la lecture comme grande cause nationale, essaie de déployer cette valeur-là. Je vais vous répondre en tant que professionnelle du livre, puisque je suis conservatrice de bibliothèque.
Tout d’abord, pourquoi lire ? Il y a d’abord une visée éducative et même utilitariste, puisqu’il y a un lien entre réussite scolaire et lecture. Les parents qui ont fait lire leurs enfants le soir ont pour la plupart eu des enfants qui ont réussi à l’école.
Deuxièmement, il y a une vocation divertissante. Il y a un lien fondamental entre le déploiement de l’imaginaire chez l’enfant qui est lecteur et sa capacité de résilience, sa capacité à imaginer, sa capacité à développer de nouveaux mondes, sa capacité à maîtriser le vocabulaire et du coup la réalité, le monde dans lequel il vit.
Enfin, en tant que professionnelle du livre, je dirais que même si personne ne lit chaque soir des histoires à ses enfants en pensant à ça, il y a une vocation de la transformation du lecteur et de la lectrice en herbe en futur citoyen ou en future citoyenne. Il y a ce lien qui est très fort entre citoyenneté et lecture et je dirais que c’est peut-être ça la très grande ambition de la lecture. »
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