Les succès d'Alexandr Hackenschmied
Le doyen de la photographie tchèque Alexandr Hackenschmied, dit Hammid, n'est plus. Il vient de s'éteindre dans son appartement de New York à l'âge de 96 ans. Sa longue existence était riche en impulsions qu'il a données à l'art de la photo et du cinéma dans le monde.
Ce printemps on a organisé à Prague une série d'expositions et même un petit festival de films de ce photographe qui était aussi cinéaste. On se doutait que c'était le dernier hommage qu'on pouvait rendre à Alexandr Hackenschmied de son vivant. A cette occasion l'artiste a accordé à New York un entretien à David Korecky. Il a évoqué entre autres les débuts de sa carrière: "Je regardais beaucoup de revues, surtout allemandes, anglaises et américaines, qu'on trouvait dans les cafés, donc j'étais au courant de ce qui se passait dans le domaine de la photo. Et cela m'intéressait beaucoup. Je m'intéressais à la photo déjà quand j'étais très jeune. J'avais un oncle, un photographe amateur, je voyais ce qu'il faisait et j'étais très attiré par cela."
Né en 1907 à Linz en Autriche, Alexandr Hackenschmied passe sa jeunesse à Prague. A l'âge de quinze ans, sachant qu'il veut devenir photographe, il a déjà une chambre noire. Ses premiers succès datent de l'année 1930, lorsqu'il organise l'exposition "La Nouvelle photographie" et tourne son premier film "Une promenade sans motif" qui sera considéré comme une oeuvre classique de l'avant-garde du cinéma tchèque. En 1938 il réussit, avant son émigration de Tchécoslovaquie, à réunir le matériel pour le documentaire Crisis consacré à la situation dans les Sudètes. La première du film aura lieu à Paris et Hackenschmied passera quelques mois en France avant de partir pour les Etats-Unis. Il vivra à New York, ville aimée qui sera pour lui une source d'énergie inépuisable et lui permettra de poursuivre sa carrière de photographe et de cinéaste. En 1966 il obtient un Oscar pour le film To be alive (Vivre) réalisé avec Francis Thompson. Mais comme il n'aime pas l'atmosphère commerciale de ce concours, il refuse de participer à la cérémonie de la remise des prix.
La commercialisation de l'art est d'ailleurs le problème qui ne cessera de le hanter. A la fin de sa vie, il avouera à David Korecky sa prédilection pour ses oeuvres qui ont échappé à l'emprise commerciale: "Les films que j'ai fait avec Klein, dont celui que nous avons fait au Mexique. C'était un de ceux où je sentais que je m'exprimais davantage sur le plan artistique que dans d'autres films. Et ensuite, lorsque j'ai commencé à travailler à New York, dans l'Office pour les informations de guerre, où je faisais pendant la guerre des films de publicité sur l'Amérique, des films documentaires, je pense avoir réussi à mettre en valeur une vision d'artiste plasticien. Mais ensuite il fallait gagner mon pain, et je prenais donc des commandes les plus diverses. Ce n'est qu'après m'être marié avec Maya Deren, que nous avons fait le film Meshes. Je considère ce film comme mon oeuvre principale, où il n'y avait que le besoin de s'exprimer. Tout le reste était marqué un peu par le commerce."