Marie Mort brûle et l’hiver est fini
Salut à tous les tchécophiles de Radio Prague – Ahoj vám všem, milovníkům češtiny Radia Praha ! Cette semaine, fêtons ensemble la fin de l’hiver – toute formelle il est vrai, il vous suffit de consulter la météo pour vous en rendre compte – et accueillons le printemps en brûlant la Morena !
Comment faire ? Facile. Prenez un peu de paille, enfin un bon tas de paille – sláma. Donnez-lui autant que faire se peut une forme humaine, et fixez-là à un bâton – tyč– puis habillez-là de vêtements féminins, de préférence à base de blanc : vous pensez avoir fabriqué une marionnette – loutka ? Oui, bon, on peut dire ça comme ça, mais vous venez surtout de fabriquer, tenez-vous bien, une « Morena ». Vous avez peut-être reconnu le latin mors – la mort. La« Morena » représente la mort, trop fréquente en hiver, la mort, le froid, la maladie. On l’appelle aussi « Smrtka », « la chose de mort ». Moins attendu, on la surnomme parfois« Mařena », qui est une manière tout à fait classique de surnommer les « Marie » tchèques. De mors à Mařena, un tout petit pas, Morena…
Maintenant que vous avez votre Morena, il vous faut un groupe – tout le monde peut venir, mais n’oubliez pas les jeunes, les enfants – děti ! Le cortège peut démarrer – traverser le village ou la ville et sortir chercher une rivière –řeka, petite révision duř ! – ou un ruisseau – potok, plus facile à prononcer. On désigne une jeune fille vierge : c’est elle qui portera la Morena, en tête de cortège. En chemin, n’oubliez pas de chanter, réciter, jouer ! Inventez les comptines du printemps ou réutilisez celles des ancêtres slaves :
"Morena, Morena,má bolavý kolena,
do řeky ji hodíme,
nemocí se zbavíme.
Místo zimy chceme jaro,
už nás to s ní pěkně štvalo!"
Morena, Morena,
a le genou à plat,
dans la rivière nous la jetterons,
des maladies nous débarrasserons.
Au lieu de l’hiver on veut le printemps
Ca commençait à faire longtemps !
… Est-il nécessaire d’en dire plus ? Vous l’aurez compris, c’est dans la řeka ou le potok que se termine le sort de la Morena… Attention, avant de l’y jeter, n’oubliez pas de l’allumer ! Et de la regarder flotter en brûlant… Et en vous plongeant dans vos souvenirs d’hiver. Ou bien en continuant à chanter
Plav, zimo, plav,víc se nezastav!
Nage, hiver, nage, et ne reviens pas !
Il paraît qu’on peut aussi l’enterrer, ou la jeter du haut d’une falaise – tout un programme ! Quoi qu’on fasse, sur le chemin du retour, notre jeune vierge en tête de cortège se doit d’arborer cette fois une branche d’arbre représentant le retour de la vie, et le cortège se doit d’annoncer la nouvelle à tout le village ou toute la ville en chantant – et si vous manquez d’inspiration, nous avons pensé à vous :
Přišlo jaro do vsi,
kde jsi zimo kde jsi.
Byla zima mezi náma
a teď už je za horama,
hu hu hu, jaro už je tu!
Où es-tu hiver où es-tu, le printemps est dans nos campagnes. L’hiver était parmi nous, il est maintenant derrière les montagnes, youpi-là, le printemps est là !
Et c’est sur la suite de la fête, que nous vous laissons imaginer – l’arrêt obligatoire à la hospoda, la bière, les danses et les chants, que se referme ce « Tchèque du bout de la langue », consacré à la destruction de la Morena, en attendant de vous retrouver dès la semaine prochaine. Pour le reste, portez-vous du mieux possible – mějte se co nejlíp !, portez le soleil en vous – slunce v duši, salut et à bientôt – zatím ahoj!