Nataša Gollová (2ème partie)
Nataša Golllová est une grande vedette du cinéma tchèque des années trente et quarante.
En 1941, Nataša Gollová obtient donc le Prix national de cinéma et tombe amoureuse de Wilhelm Söhnel. Bel homme, ce dernier est chef du département juridique du bureau de coordination entre le Centre du cinéma tchèque et le bureau du protecteur du Reich. Il est intéressant de faire une parenthèse sur Wilhelm Söhnel qui était un Allemand, né à Ostrava en Moravie du Nord, et qui parle donc très bien le tchèque. Après la guerre, les autorités tchécoslovaques estime que Wilhelm Söhnel n’a pas commis de crime grave et qui puisse être prouvé contre la Tchécoslovaquie, qu’il avait une grand-mère juive, un frère communiste et n’était pas vraiment engagé dans le parti nazi. Vrai ou faux, cela est discutable. En tout cas, les autorités compétentes du pays lui attribuent la nationalité tchécoslovaque. Au cours de la nationalisation de la cinématographie tchécoslovaque, il est conseiller juridique dans le domaine. En 1948, la nationalité tchécoslovaque lui est retirée, et Wilhelm Söhnel part pour Allemagne de l’Ouest. Après quelques années, il devient un hôte régulier du festival du film à Karlovy Vary et même un représentant des droits d’auteurs de la cinématographie tchécoslovaque, paradoxe tout de même assez bizarre !
Vers la fin de la guerre, Nataša Gollová se fait engager comme infirmière bénévole au camp de concentration de Terezín où elle attrape le typhus. Cette grave maladie met sa vie en danger et, pendant six mois, l’actrice lutte entre la vie et la mort. La libération de la Tchécoslovaquie apporte des problèmes à l’actrice. Elle se fait renvoyer du Théâtre de Vinohrady dont la direction refuse de coopérer avec l’ex-maîtresse d’un nazi, donc Wilhelm Söhnel, tout en lui reprochant d’avoir joué dans les films allemands sous le pseudonyme d’Ada Goll. Il est à noter que l’actrice a tourné un seul film en Allemagne nazie et en ce qui est de Wilhelm Söhnel, Nataša était très amoureuse et ne se posait pas de questions. Elle ne pouvait guère ce douter des conséquences que son amour envers le fonctionnaire nazi pourraient lui apporter après la guerre. Le résultat est simple : sa carrière de vedette est détruite.
En 1947, elle épouse le metteur en scène Karel Konstantin et trouve un engagement dans le même théâtre que son mari, à České Budějovice en Bohême du Sud. Dans les années cinquante, elle réussit à trouver un engagement à Prague, au Théâtre Fidlovačka, puis en 1955, au Théâtre de la satire de Jan Werich (aujourd’hui Théâtre ABC). Au début des années cinquante, elle réussit à décrocher un rôle dans les films « Le boulanger de l’empereur » et « l’Empereur du boulanger » (Císařův pekař a Pekařův císař) de Jan Werich et « Sirael » de Martin Frič.
Dans les années soixante, Nataša Gollová rencontre pour la dernière fois Tristan Tzara. C’est l’animateur Aleš Cibulka que nous avons encore une fois à l’antenne qui nous dira plus de détails.
Que savez-vous de son amitié avec Tristan Tzara?
« J’oserais dire qu’il était le plus grand amour de sa vie. Il est vrai qu’après la guerre elle a épousé le réalisateur Karel Konstantin, néanmoins les témoins de l’époque et ses amis disent que s’était un peu un mariage de raison. Elle a rencontré Tristan Tzara en 1932, à Paris, et apparemment un grand amour est né. Nataša Gollová a même envoyé chez elle un message disant qu’elle partait avec lui dans les Pyrénées, et elle n’est pas rentrée du concours de danse auquel elle a assisté avec la troupe de Jarmila Kröschlová, qui à l’époque était une troupe très connue. Elle est restée avec Tzara et apparemment ils ont vécu un roman très passionné, mais la guerre a gâché leur relation. A ce que je sache ils se sont encore revus dans les années soixante, lorsque Tristan Tzara est venu par avion à Prague, et ils allaient bien ensemble même qu’il y avait une différence d’âge. Sa grande amie, l’actrice Stella Zázvorková, qui était avec Nataša dans les années soixante et soixante-dix presque chaque jour, m’a confié que l’actrice pensait souvent à Tristan Tzara et regrettait qu’en 1932 elle n’était pas restée avec lui en France. Il avait une très belle villa, projetée par l’architecte Los, qui jusqu’à nos jours se trouve à Montmartre. Mais d’autre part, il me faut dire, et là je suis égoïste, que si elle était restée en France, elle n’aurait pas pu tourner les films que nous aimons autant. »
Nataša Gollová a encore joué dans une vingtaine de film, mais il s’agissait pratiquement toujours de rôles secondaires. Son dernier film date de 1981. A l’époque l’actrice était déjà assez malade souffrant d’arthrose et d’osthéoarthrose. Elle s’est aussi mise à boire pour oublier et prenait des médicaments, un calmant pour dormir, un stimulant pour se réveiller, ce qui n’arrangeait pas sa maladie. La vedette du cinéma tchèque des années trente et quarante est décédée le 29 octobre 1988 dans une maison de retraite. Mais elle vit à travers ses films qui passent toujours à la télévision et se vendent bien sur DVD. La parole est encore une fois à Aleš Cibulka.
Est-ce que vous croyez que les films avec Nataša Gollová sont atemporels?
« Bien sûr, tous les films rétro ont été testés par le temps. Certains ne sont plus projetés, et il y en d’autres qui apparaissent sur à la télévision et sur DVD. Je crois que dans les années trente, personne ne pouvait se douter que le nouveau médium, le DVD enregistrerait ce genre de films, qu’ils seront vendus et qu’ils seront intégrés dans les heures de grande écoute de la télévision. Comme je l’ai dit ces films ont été testés par le temps et on ne peut pas dire si dans soixante-dix ans, il en sera de même pour les films qui ont été tourné à notre époque. Mais il y a des films qui sont atemporels et forment ainsi le trésor de la cinématographie tchèque. »