Petr Vok
Aujourd'hui, je voudrais vous présenter l'une des familles nobles tchèques qui jouait un rôle important dans l'histoire de notre pays. Je parlerai des Rozmberk, parmi lesquels aussi un certain Petr Vok, homme politique, mort le 6 novembre 1611, il y a donc 390 ans.
Dès le début, les Rozmberk appartenaient incontestablement à la plus haute aristocratie tchèque, presque chacune des douze générations de la famille ayant son représentant privilégié à la cour royal. Outre les châteaux forts, ils firent construire aussi plusieurs monastères, dont le plus important celui de Vyssi Brod en Bohême du sud, avec l'église Notre-Dame-de l'Assomption, fut fondé avant 1259 par Vok de Rozmberk pour l'ordre des cisterciens. Au fur et à mesure, ce monastère devint le centre administratif et ecclésiastique des Rozmberk. Grâce à leur potentiel économique et militaire, la famille obtint progressivement une position dominante au sud du pays. Doté d'un esprit d'initiative peu commun, elle extrayait des métaux précieux et développait les premières verreries et brasseries, la pisciculture et l'élevage des moutons.
C'est à Oldrich II que la famille doit la reconnaissance légale de sa position privilégiée dans le royaume de Bohême au XVe siècle. Formé dans l'esprit de la doctrine de Jean Hus, cet homme politique ambitieux ne tarda pourtant pas de s'opposer aux hussites pour devenir le leader respecté des catholiques tchèques et influencer ainsi l'orientation religieuse de la famille. Puis arrive Vilém de Rozmberk. Reconnu majeur avant terme, il put entrer en possession d'un vaste héritage et eut une carrière brillante. Il fut successivement représentant des états tchèques, intendant et burgrave royal depuis 1570. A son époque, le domaine des Rozmberk représenta un complexe intégral de terres seigneuriales englobant Cesky Krumlov, Rozmberk, Trebon, Nové Hrady, Helfenburk et beaucoup d'autres villes, châteaux forts, étangs, moulins, brasseries et fermes. En dépit de ses quatre mariages, Vilém meurt sans héritier et tous les biens passent entre les mains de Petr Vok, son frère cadet.
Petr Vok, un homme intelligent de taille svelte et de tempérament impulsif vivait longtemps dans l'ombre de son frère aîné. Comme l'héritage de ce dernier ne représentait pas seulement le domaine familial mais aussi d'énormes dettes, Petr Vok se trouva dans l'obligation d'oeuvrer énergiquement pour sauvegarder au moins une partie des biens hérités. Il dût vendre des terres et, en 1602, il quitte même son château splendide de Cesky Krumlov pour s'installer définitivement à Trebon. En 1611, il décide de sacrifier le trésor d'argent familial pour en faire frapper les pièces de monnaie lui permettant de payer les mercenaires de Passau et de préserver la Bohême du sud des souffrances de leur pillage. Par ce don généreux en faveur du pays, Petr Vok s'inscrit profondément dans la mémoire des habitants reconnaissants. Alors que Vilém fut un grand admirateur de la musique et le fondateur du premier orchestre d'aristocrates chez nous, Petr Vok se fit séduire par le charme des belles-lettres et réunit au château de Trebon l'une des plus riches bibliothèques en Europe à l'époque de la Renaissance. Mais Petr Vok fut aussi un grand partisan de tous les plaisirs de la vie, bon vivant qui aimait les femmes, « barbare et buveur qui dilapida l'argent familial ». Il est présenté ainsi dans la littérature historique tchèque. Selon une légende, par exemple, le château de Bechyne aurait abrité un harem international avec une Anglaise, femme de chambre de l'épouse de Vok, une certaine Elise de Moscou, une Turque qui lui aurait été offerte en cadeau par l'empereur Rodolphe II' Mais peu de gens savent que ce harem ne remplissait pas sa fonction habituelle. Les femmes qui y habitaient souffraient de différentes anomalies physiques et psychiques et faisaient partie, en effet, d'une collection de curiosités. Petr Vok n'était pas un exemple de la chasteté, il était quand-même un homme Renaissance, mais il est vrai aussi qu'il résista au mariage assez longtemps' jusqu'à ses 41 ans?On parle beaucoup de la lutte de Petr Vok contre les Turcs, de son intervention contre les mercenaires de Passau et de ses activités politiques. Il régla, par exemple, le conflit entre les états tchèques et le gouvernement habsbourgeois qui voulait concentrer le pouvoir entre ses mains. Vok encouragea les courants politiques radicaux et gagna ainsi l'estime non seulement des états tchèques mais aussi ceux à l'étranger. Ce dernier représentant de la famille noble des Rozmberk est mort le 1er octobre 1539 sans postérité.