Une visite de la citadelle de Josefov, en Bohême de l'est

La citadelle de Josefov

Aujourd'hui, nous nous rendrons dans la région de Hradec Kralove, à une centaine de kilomètres à l'est de Prague. La cible de notre visite, la ville de Josefov, l'une des très rares en Tchéquie édifiées comme des citadelles.

La citadelle de Josefov

Aujourd'hui, nous nous rendrons dans la région de Hradec Kralove, à une centaine de kilomètres à l'est de Prague. La cible de notre visite, la ville de Josefov, l'une des très rares en Tchéquie édifiées comme des citadelles. Non seulement le système bastionné, mais toute la partie résidentielle de Josefov a été conçue dans cet esprit. L'aspect sobre des maisons édifiées pour soldats et employés civils de l'armée, faisant penser à une caserne, est compensé par le style empire dans lequel elles sont édifiées. La valeur de Josefov réside justement dans le fait qu'elle forme un ensemble urbanistique et architectonique parfaitement homogène et uni, conservé sans interventions ultérieures quelconques, qui fournit un témoignage de l'art du bâtiment de la fin du XVIIIème siècle. Le style empire et du classicisme n'est perturbé que par le bâtiment de la mairie, en style de néo-renaissance. A quelles fins la ville était édifiée, qu'est-ce qui y attire, aujourd'hui, les touristes? C'est la directrice du musée de Josefov, Olga Mertlikova, qui nous le dira.

A l'entrée principale du sous-sol des fortifications, la directrice du musée et notre guide nous accueille en uniforme de l'armée autrichienne. Nous apprenons que c'est l'empereur d'Autriche, Joseph II, fils de Marie-Thérèse et frère de Marie Antoinette, qui a fait construire, en 1780, la citadelle de Josefov portant à sa mémoire son nom. Les fortifications devaient protéger les frontières de l'empire austro-hongrois contre la Prusse expansive. Notre guide explique que la tactique de siège faisait à l'époque partie intégrante de la stratégie militaire de chaque armée européenne.

Les travaux de construction de la citadelle de Josefov ont été confiés à l'ingénieur français, le général Duhamel de Querlonde. En 7 ans, il a bâti au-dessus du confluent de l'Elbe et de Metuje un puissant système bastionné, alors le plus moderne dans l'empire, capable d'abriter jusqu'à 12 000 soldats. Le vaste labyrinthe souterrain mesurant 45 kilomètres est l'un des plus longs au monde. Les couloirs sont une preuve du niveau technique élevé d'ingénieurs militaires et de mineurs, spécialistes hautement appréciés à l'époque. Les murailles ont été édifiées selon les doctrines françaises du 18e siècle. L'impressionnante épaisseur des murailles a été une garantie de ce que les boulets ennemis pouvaient s'enfoncer et se perdre, sans provoquer trop de dégâts. Or la citadelle de Josefov n'a jamais été assiégée. Ni les guerres napoléoniennes, ni la guerre entre la Prusse et l'Autriche, ne l'ont touché.

Avec notre guide, nous entrons dans les couloirs obscurs, une bougie à la main. L'ambiance est loin d'être romantique: les couloirs de mines sont froids, humides, serrés. Dans certains secteurs, un peu de lumière pénètre à travers les ouvertures pour canons. A l'intérieur, tout noir, se sont conservés les anciens dépôts de poudre. Les soldats n'habitaient pas ici.

La citadelle a été en état de siège le 8 juin 1866. Sept mille soldats en uniformes autrichiens, dont beaucoup de Tchèques, ont été concentrés dans les couloirs de mines, prêts à la défense: une armée prussienne de 100 000 soldats passait devant, se dirigeant sur Hradec Kralove, où la bataille décisive de la guerre prusso-autrichienne allait être livrée et dans laquelle l'Autriche allait être battue par la Prusse. Après cette bataille, les fortifications de Josefov ont servi d'hôpital militaire. En 1888, Josefov a perdu son statut de citadelle. A cette occasion, les 4 portes des fortifications ont été démantelées. Heureusement, c'était l'unique intervention de ce genre. Le reste - les bastions, les ravelins, les retranchements, est resté intact.

Pendant la Première Guerre mondiale, Josefov a été transformé en camp de réfugiés pour des milliers de Russes, Serbes et Italiens. Un cimetière militaire se trouve ici. Lors de l'occupation nazie, les Allemands y tenaient garnison. En 1968, l'armée soviétique d'occupation s'est implantée à Josefov.

Depuis 1948, Josefov fait partie de la ville de Jaromer. En 1971, elle a été classée réserve municipale. Par son caractère, elle ressemble beaucoup à la ville de Terezin, édifiée parallèlement par Joseph II, au nord de la Bohême, mais aussi à d'autres villes européennes, dont Verdun et Neuf-Brisach, en France, Palmanova en Italie ou Konigstein en Allemagne.

Le labyrinthe souterrain de Josefov est devenu la principale attraction recherchée par les touristes qui y viennent aussi pour assister à des reconstitutions des manoeuvres militaires d'unités autrichienne et prussienne, en uniformes historiques... Une société qui s'appelle "Retranchement" a vu le jour en 2001. Elle réunit les amateurs de l'histoire militaire et des systèmes bastionnés, en particulier.

Il n'est pas sans intérêt non plus de dire qu'un vocabulaire spécifique tiré du français est entré dans l'usage lorsqu'on parle de fortifications: ainsi, le tchèque a été enrichi de plus de 200 mots d'origine française, tels que déblai - la masse de terre qu'il faut enlever pour creuser les fossés, escarpé - pente raide de la muraille d'un rempart, galerie majeure, glacis, ou oreillon - massif de maçonnerie à l'angle d'une face et d'un flanc de bastion.

C'est tout juste ce week-end que Josefov vivait à l'heure des démonstrations d'art militaire, à la mémoire du 8 juin 1866, jour "J", lorsque les soldats autrichiens étaient en état de siège, prêts à livrer avec les Prussiens une bataille qui n'a finalement pas eu lieu ici, mais près de Hradec Kralove.

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