Les Tchèques à Dijon
Ce dimanche 17 novembre est une fête nationale, en République tchèque. Dans la pensée des Tchèques, cette date est à jamais liée au courage dont les étudiants ont fait preuve, à plusieurs reprises, dans le courant du XXe siècle. 1939, 1948, 1968, 1989. Autant de dates marquées par l'opposition des étudiants tchèques à l'arbitraire politique ou militaire, imposé de l'étranger ou du pays. On ne se lassera jamais de se les rappeler... Pour une fois, pourtant, nous n'allons pas porter notre regard sur le passé, mais sur un présent brûlant. Magdalena Segertova a rencontré, récemment, à Dijon, un groupe de jeunes Tchèques qui font des études au Lycée Carnot. Une occasion pour elle de recueillir quelques témoignages sincères, touchants et, d'une certaine manière, comme je l'espère, révélateurs.
Ils sont jeunes, curieux, courageux et ouverts à l'inconnu. A seize ans, ils ont fait le premier grand choix de leur vie : celui de préparer leur bac au Lycée Carnot de Dijon, dans l'est de la France. A peine rentrés des vacances d'été, ces jeunes Tchèques m'ont tout raconté sur leur vie estudiantine, sur leurs expériences, attentes, projets et rêves, accomplis ou pas. Et je vous propose de les écouter, ainsi que leurs professeurs.
Dominik, lui, est en terminale. Mais ses souvenirs des débuts à Dijon sont encore très frais...
Une dizaine d'élèves tchèques viennent suivre, chaque année, un cursus scolaire au Lycée Carnot, financé par l'Etat français. Premier objectif : se perfectionner en français et connaître le pays. Et puis, pourquoi le cacher, un diplôme français ouvre plus facilement les portes sur l'univers de la diplomatie. Pendant trois ans, les élèves tchèques suivent les mêmes enseignements que leurs camarades français. Deux ou trois Tchèques par classe suffisent pour créer une sympathique ambiance multiculturelle.
Surprise, peut-être, pour certains d'entre vous : les premiers Tchèques ont mis le cap sur Dijon bien avant la chute du Rideau de fer. L'histoire de la coopération tchéco-bourguignone commence au début du XXe siècle, explique Alena Bouskova, professeur de tchèque à Carnot...
Kristyna, Lucie, Katerina... Début septembre, elles ont dit adieu à leurs parents, copains et copines, à leurs cinémas et cafés préférés. Pour en trouver d'autres, à Dijon. Les voilà en seconde à Carnot, un peu perdues, les têtes pleines de questions... La discipline à l'internat leur donne des frissons : pas de rencontres entre filles et garçons, pas de tête-à-tête après dix heures du soir, une seule sortie par semaine, des week-ends passés dans des familles d'accueil, tantôt accueillantes, tantôt moins. Mais... pour découvrir le monde, il faut aussi faire des sacrifices. La jeune Pragoise, Kristyna, grince parfois des dents, mais arrive à surmonter les difficultés.
Le diplôme du bac en poche, les anciens élèves du Lycée Carnot ont désormais une possibilité unique de poursuivre leurs études en France. S'ils ont le courage et l'ambition de devenir cadres européens, ils peuvent rejoindre le 1er cycle est-européen de Sciences Po Paris à Dijon. Cette fois-ci, ce n'est pas la discipline, mais la fameuse méthodologie française qui leur posera, probablement, des problèmes. Car pour réussir ces prestigieuses études politiques, il faut savoir bien structurer les idées dans sa tête et les argumenter. Gabriela Rehorova-Crouzet, chargée de mission au 1er cycle est-européen et diplômée, elle-même, de Science Po Paris, essaye d'y préparer les étudiants tchèques.