"La Juive" de Halévy au théâtre d'Ostrava
Le grand opéra, genre qui attirait des foules au XIXème siècle, est aujourd'hui presque oublié. Pourtant le Théâtre national moravo-slovaque à Ostrava a osé, récemment, tirer de l'oubli un spécimen de ce genre, "La Juive" de Jacques Fromental Halévy. Lors de sa création, en 1835, cet opéra monumental (180 minutes de musique), mettait le public parisien en ébullition par de grands airs brillants, des choeurs grandioses, des ballets et des décors coûteux. Sur la scène on voyait non seulement de nombreux comparses mais aussi, par exemple, des chevaux. Le public tchèque aimait, lui aussi, cet opéra, dont l'histoire est située au Concile de Constance en 1414, concile lors duquel on a condamné et livré au feu le réformateur tchèque Jean Hus. Ce dernier apparaît d'ailleurs aussi dans l'oeuvre de Halévy en tant que personnage muet. Le théâtre d'Ostrava a été obligé de procédéer à la réduction de ce drame lyrique. Les scènes de ballet ont été coupées, ce qui a contribué à resserrer la trame de l'oeuvre.
Le metteur en scène Michael Tarant a réussi à saisir et rendre compréhensible l'action compliquée de l'opéra. C'est avec générosité, mais sans grandiloquence, qu'il présente au spectateur l'intrigue de ce spectacle, le conflit entre le marchand juif Eléasar et le cardinal de Brogni. Les décors sont simples et très stylisés, le choeur est animé d'un véritable élan dramatique. Dans les rôles principaux on peut entendre le ténor Leo Marian Vodicka qui campe un Eléasar intrépide, et la basse Vaclav Zivny qui a donné la sévérité nécessaire au rôle du cardinal de Brogni. Maria Andrasovanova est convaincante dans le rôle de Rachel, victime innocente de l'intransigeance des deux protagonistes. En somme un beau cadeau pour les mélomanes tchèques et une preuve que la musique de Halévy n'a pas perdu sa force dramatique.