Akademie Versailles : des étudiants de toute l'Europe réunis à Prague pour célébrer la musique baroque
Une trentaine de musiciens affinent depuis mercredi leur pratique de la musique baroque au cours de masterclass proposées par le Collegium Marianum et le Centre de musique baroque de Versailles. L’occasion pour des musiciens venus de toute l’Europe d’en apprendre plus sur la musique de chambre française.
Baptisée « Akademie Versailles », cette formation express et bien remplie, organisée pour la quatrième année consécutive, s’inscrit dans le cadre des Summer Festivities of Early Music qui auront lieu à Prague en juillet et août prochains. En attendant, elle se conclura par un petit concert ce dimanche.
Une trentaine d’étudiants ont été sélectionnés pour cette formation. Tous présentent des parcours relativement différents et possèdent une connaissance plus ou moins fine de la musique baroque. Un problème qui n’en est pas vraiment un, selon Benoît Dratwicki, directeur artistique du Centre de Musique baroque de Versailles et co-initiateur du projet :
« C’est précisément ce que je trouve très intéressant : avoir différents niveaux et différentes cultures. Par mimétisme, les gens s’imprègnent ainsi les uns des autres. Parfois, c’est plus facile d’avoir un très bon étudiant qui connaît le style au milieu de gens qui ne le connaissent pas. Il sera plus utile qu’un professeur qui ne fait que parler. »
L’autre aspect important de ce programme est qu’il est ouvert à toutes les nationalités européennes. L’Akademie Versailles cherche à montrer que, par-delà les différences culturelles et linguistiques, tous les participants finissent par parler le même langage de la musique. Cette rencontre produit aussi d’autres effets intéressants. Cette année, Vojtěch Semerád, violoniste et membre du Collegium Marianum qui a participé à l’organisation des masterclass, suit également les cours de chant. Si le français ne lui est pas étranger, puisqu’il a étudié à Paris pendant un an, chanter en français, en revanche, est une autre paire de manches.« C’est comme une langue complétement différente. Il y a tous ces détails, ces changements de voyelles. Il faut chanter ce qui est muet dans la langue parlée. Ca, c’est ce qui manque beaucoup aux chanteurs non français. Ce n’est pas vraiment la technique, c’est la langue. Et cette langue forme une culture. »
Benoît Dratwicki, qui dispense des cours de diction à ses élèves, note même que la langue française en dit long sur la culture française…
« A force de voyager et d’enseigner le chant français baroque et romantique à des étudiants de tous les pays, on se rend compte que la langue est totalement le reflet de la société et de la culture, et inversement. Le placement de la langue, que celle-ci soit projetée devant ou derrière, et le bruit de la langue vont générer tout un univers dans la perception qu’ont les gens de la nationalité française, simplement à travers le bruit de la langue quand on chante. Et c’est très intéressant parce que ça crée parfois des distorsions, et les gens ont un avis sur la France juste à travers sa langue et sa poésie. Mais parfois, c’est l’inverse : c’est en apprenant l’aspect stylistique de la langue qu’on comprend mieux le pays. »
Les étudiants n’ont pas le temps de chômer. Chaque jour, un programme chargé les attend : cours de chants, de danse, de musique, de diction, en compagnie de spécialistes de leur domaine. Pour Benoît Dratwicki, la musique de chambre est en effet d’abord pluridisciplinaire :« La musique n’est qu’une partie d’un tout : soit elle est liée à un cadre liturgique, soit à l’opéra, à la danse… Si on se contente de regarder les partitions, on se trompe doublement parce qu’on pense d’abord que la partition est un objet absolu, alors que c’est un élément d’un tout. Ensuite, pour la comprendre, il faut comprendre son contexte : la danse, le théâtre, l’art de la peinture et de l’architecture à la française. C’est seulement avec ce contexte que la musique française prend tout son relief. »
De quoi rendre les cinq jours de formation particulièrement intenses, d’autant que les élèves donneront un petit concert ce dimanche 24 mars, à 14 heures, à l’HAMU.