Eternel Karel Kryl
Le 3 mars 1994, le chanteur et compositeur tchèque Karel Kryl décédait d’une crise cardiaque à Munich. La cité bavaroise l’avait accueilli en 1969, lorsqu’il avait fui la Tchécoslovaquie normalisée après l’invasion soviétique d’août 1968. Le 25e anniversaire de sa disparition est l’occasion de se pencher sur la carrière et de réécouter quelques-unes des plus belles chansons d’un des chanteurs tchèques les plus populaires.
Comme souvent chez Kryl, le texte poétique exprime sous forme de métaphore sa réflexion sur une situation donnée. Karel Kryl a commencé à composer et à écrire dans les années 1960 : dès 1966, ses chansons sont jouées à la radio.
Son tout premier album, où se trouve justement « Bratříčku, zavírej vrátka », sort en 1969 et est très vite cloué au pilori par le régime communiste. A l’occasion d’un festival de musique en Allemagne de l’Ouest en septembre de cette année-là, le chanteur contestataire choisit l’exil, persuadé qu’au retour l’attendent la censure et/ou la prison.
A Munich, il travaille pour Radio Free Europe, mais continue de créer. Ses compositions, truffées d’allégories et de messages politiques ou d’espoir, inspirées par des motifs bibliques, sont copiées et se passent sous le manteau derrière le rideau de fer.Si la révolution de Velours en 1989 suscite en lui de grands espoirs, Karel Kryl, rentré au pays, déchante rapidement et très vite la situation politique du début des années 1990 le déçoit, et notamment la séparation de la Tchécoslovaquie. Les dernières années de sa vie, il les passe de plus en plus à Munich où il meurt soudainement le 3 mars 1994.
Le style de Kryl est simple à la manière de George Brassens, reposant uniquement sur des textes forts accompagnés à la guitare. Malgré cette apparente sobriété, le chanteur réalise le tour de force surprenant de donner l'impression, dans nombre de ses morceaux, de jouer avec un orchestre. Aujourd’hui encore, les chansons de Kryl ont une portée universelle incontestable, malgré le contexte dans lequel elles ont été créées. Ses textes politiques, exprimés le plus souvent sous forme d’allégories, peuvent correspondre à d’autres formes d’oppression que le régime communiste auquel ils faisaient référence. Et ses chansons d’amour ou d’inspiration biblique, faisant appel à des valeurs humanistes restent tout aussi nécessaires aujourd’hui qu’elles l’étaient au moment de leur création.