Brexit: mon royaume pour un passeport tchèque!
« Une place spéciale en enfer » a été promise cette semaine par le président du Conseil européen Donald Tusk à tous les partisans du Brexit incapables d'en prévoir les conséquences. Venant d’un Polonais, la menace est à prendre au sérieux… En tout cas les citoyens britanniques installés à l’étranger commencent sérieusement à prévoir les conséquences d’un Brexit dur le mois prochain. A Prague aussi, où ils sont de plus en plus nombreux à faire les démarches nécessaires pour obtenir un passeport tchèque...
Traducteur installé à Prague depuis une quinzaine d’années en tout, Andrew vient tout juste d’entamer les démarches pour obtenir un passeport tchèque.
« C’est un peu compliqué et long administrativement. On m’a donné une liste de 24 documents à fournir ; il faut que je montre que je suis à jour sur les paiements de sécurité sociale et des impôts, que j’ai des ressources financières, que je n’ai pas de passé de criminel non plus… »
Un test de langue aussi ?
« Oui, on m’a dit que le test de langue tchèque était la première chose à accomplir, ce qui est un problème parce que les centres de test sont surchargés, apparemment à cause du nombre croissant de ressortissants britanniques. Il y a une attente de plusieurs mois à Prague et on m’a conseillé d’aller passer le test dans un centre de province… »
« Allez-y, reprenez mon passeport britannique! »
D’autres sujets de sa Majesté installés ici ont davantage anticipé et ont déjà un passeport tchèque en poche. C’est le cas depuis avril pour David, un prof d’anglais qui vit à Prague depuis vingt ans :« Ça ne m’a pas coûté très cher. Entre 6 000 et 7 000 couronnes, ça fait peut-être 280 euros en tout. Quand je vois dans les journaux que par exemple ceux qui ont demandé la nationalité allemande se félicitent de n’avoir payé que 1 200 euros, je pense que j’ai fait une bonne affaire en plus… »
L’hymne tchèque a retenti à la mairie lors de la petite cérémonie officielle de la naturalisation de David. Au printemps dernier, il y avait avec lui surtout des ressortissants de pays de l’ancienne URSS dans la salle remplie de nouveaux citoyens tchèques.
Si les députés tchèques ont récemment voté une loi garantissant aux citoyens britanniques leurs droits actuels jusqu’à l’année prochaine même en cas de Brexit dur, mieux vaut prévenir que guérir pour certains des 8 000 officiellement installés ici, d’autant que Londres comme Prague autorise de posséder la double nationalité.
Et si d’aventure il fallait faire un choix, ce serait rapide pour David, qui est – précisons-le – d’origine écossaise :
« C’est une décision qui ne serait pas banale et plutôt sentimentale parce que c’est une chose qui fait partie de votre identité, mais j’ai vécu davantage d’années à l’étranger qu’au Royaume-Uni et s’il me fallait renoncer à un passeport maintenant je dirais ‘allez-y, reprenez mon passeport britannique!’. Je suis aussi conscient - et très content - que mon nouveau passeport tchèque me permette d’exercer mon métier de prof dans tous les pays de l’UE. »Quant à Andrew, sa future naturalisation va au-delà des soucis administratifs qu’elle permet de régler :
« Pour moi, c’est plus important qu’un acte simplement administratif. J’habite ici depuis longtemps et me suis très bien intégré dans la société tchèque mais je ne me suis jamais particulièrement intéressé ni à la politique ni à la vie publique locales. Du coup pour moi le fait de devenir Tchèque c’est l’occasion de m’y intéresser davantage, ainsi qu’à la culture du pays. »
En l’état actuel des choses, qui sont susceptibles d’évoluer, le Brexit deviendra une réalité le 29 mars prochain.