Carnet tchèque, une chaîne YouTube pour découvrir l’histoire des pays tchèques
Depuis sa création sur YouTube il y a quelques mois, la chaîne Carnet tchèque permet à ses abonnés de se plonger de manière didactique et amusante dans l’histoire des pays tchèques. Pour en savoir plus, Radio Prague a invité dans ses studios Damien Audaire, son créateur :
Un vidéaste vulgarisateur d’histoire
Qu’est-ce qui vous a donné envie de créer cette chaîne YouTube sur l’histoire des pays tchèques ?
« En fait, c’est un truc tout bête. Très vite quand je suis arrivé, j’ai une amie qui m’a parlé de Daladier, curieusement… C’est très amusant parce que, avant de venir, je pensais bien que, peut-être, un Tchèque me parlerait à un moment de Munich. Cela correspond à 2015, parce qu’il y avait le film Lost in Munich (de Petr Zelenka, ndlr), qui est sorti à l’époque au cinéma. C’est un film qui raconte l’histoire d’un journaliste qui vole un perroquet qui aurait appartenu à Edouard Daladier, le président du Conseil qui a signé pour la France, en 1938, les accords de Munich, lesquels ont donné les Sudètes au Troisième Reich.
Je pense que c’est à partir de ce moment que j’ai voulu en savoir plus. C’était juste une envie peut-être d’être un peu l’avocat du diable, pour voir si Daladier était directement la personne responsable, sur qui on pouvait tout mettre sur le dos. Et plus je creusais, plus j’ai découvert qu’on pouvait remonter vraiment très loin cette histoire.
Surtout, quand j’ai commencé à chercher des documentaires sur l’histoire des pays tchèques, je sais qu’on en trouve quelques-uns, mais je me suis dit qu’il était dommage qu’il n’existe pas des synthèses un peu plus poussées pour savoir pourquoi finalement on a certains événements et pas d’autres. Et peut-être aussi essayer d’expliquer d’une autre manière que les académiciens, même s’ils font tout de même pas mal d’efforts pour essayer d’être accessibles. Mais sur YouTube, c’est un public qui est un peu plus jeune et qui a besoin de bien reprendre certains concepts. »
C’est une mission de vulgarisation de l’histoire, de passeur d’histoire que vous souhaitez endosser…
« Tout à fait. C’est vrai que si je me définis, cela serait comme un vidéaste vulgarisateur d’histoire, comme beaucoup. D’ailleurs, je n’ai pas de formation académique en histoire, ni même en audiovisuel. Il a donc fallu apprendre tout cela. Concernant l’histoire, heureusement j’ai eu la chance de pouvoir parler à deux vidéastes vulgarisateurs d’histoire assez connus, Frédéric, de la chaîne Herodot'com, et Antoine, de la chaîne Histony, qui m’ont encouragé à faire cette chaîne, et je leur en suis très reconnaissant, et qui m’ont aussi donné des conseils, tels que de bien mettre les sources sous les vidéos, ça c’est la base, et d’essayer de rester le plus neutre possible, même si malgré tout on importe toujours un peu de soi dans ses vidéos. »Comme tous les Français de France, j’entendais « Vaklav Avel »
Avant de venir en République tchèque en 2015, étiez-vous déjà familier de l’histoire des pays tchèques ? Qu’en connaissiez-vous ?
« Avant de venir, j’étais en Irlande et les pays tchèques étaient loin. Je me souvenais justement de la conférence de Munich. Je dois dire que quand j’étais en troisième, cela m’avait un peu frappé. C’est vrai que c’était de l’histoire scolaire et cela devait aller vite. C’était vraiment l’événement qui m’avait le plus marqué. Par contre, le Printemps de Prague, j’en avais vaguement entendu parler. J’avais aussi entendu parler de Václav Havel, même si, comme tous les Français de France, j’entendais ‘Vaklav Avel’… »
Depuis que vous avez créé votre chaîne YouTube, quel lien avez-vous créé avec l’histoire tchèque ? Pourquoi vous plaît-elle tant ?
« Je pense que ce qui me fascine, c’est que les Tchèques sont vraiment coincés entre deux grands ensembles linguistiques, entre les Russes, mêmes s’ils sont un peu loin, et les Allemands, littéralement si l’on compte l’Allemagne et l’Autriche. Il y aurait pu avoir beaucoup de raisons pour lesquelles ils auraient pu disparaître en tant que communauté linguistique et culturelle, et pourtant ils sont encore là. »
Des semaines de travail
Pour l’instant votre chaîne YouTube en est à ses débuts. Il y a quelques vidéos qui traitent de sujets comme les Sudètes, le Printemps de Prague ou bien la place des Tchèques dans l’Autriche-Hongrie avant que n’éclate la Première Guerre mondiale. Comment sélectionnez-vous les sujets que vous allez traiter ?
« Dans mon idée, au départ, ce qui était dans les cartons, c’était de faire toute la période 1918-1920, la Constituante de la Première République tchécoslovaque. Cependant, je me suis bien rendu compte que si je n’expliquais pas l’Autriche-Hongrie et comment les Tchèques se sont retrouvés sous la domination des Habsbourg, cela allait être compliqué. »Dans vos vidéos, il y a une mise en scène, vous avez une sorte de code graphique, vous utilisez des petits personnages qui représentent certains pays. Comment réalisez-vous concrètement vos vidéos ?
« Concrètement, il y a déjà la phase de recherche. Je vais soit à l’Institut français de Prague et je vais complètement écumer tout leur rayon sur l’histoire des pays tchèques. A côté de cela, sur internet, on trouve aussi pas mal de ressources. J’aime bien le site persee.fr, qui permet d’avoir accès à des publications académiques. Cela se voit beaucoup dans mes sources, le professeur Antoine Marès revient très souvent, même si j’essaie d’avoir des sources un peu plus variées, parce que, autant que faire se peut, il faut avoir plusieurs sources pour pouvoir parler du sujet. Ensuite, il y a l’écriture. Au début, c’était très laborieux. Ma première vidéo a nécessité une semaine avant que je ne sois vraiment content du texte, et même au moment de l’enregistrement, il y a des moments où je refaisais des coupures pour réécrire et retenter des trucs, car je n’étais pas satisfait. Une fois qu’on a la phase d’écriture, on a la phase d’enregistrement, qui peut être assez folklorique. Ensuite, quand j’ai fait tout cela, que j’ai nettoyé la bande et que je l’ai mise en stéréo, je vais faire tout ce qu’il y a autour, c’est-à-dire les plans et les petits personnages. »
Cela prend combien de temps entre le moment où vous décidez de faire la vidéo et le moment où vous pouvez la poster ?« Les premières fois, cela prenait deux mois. Maintenant, en quelque chose comme quinze jours, cela peut être vite plié, une fois que j’ai bien le sujet en main. »
Faire des vidéos sur toutes les « osmičky »
A la fin de certaines de vos vidéos, par exemple celle sur le Printemps de Prague, vous annoncez que vous souhaitez vous pencher plus longuement sur cette période, sur l’année 1918. Vous nous annonciez aussi que vous envisagiez de travailler sur la Première Guerre mondiale et sur la Première République tchécoslovaque. Quelles sont les vidéos que vos abonnés pourront découvrir prochainement ?
« Prochainement, j’aimerais bien faire le Coup de Prague, car j’aimerais bien avoir terminé toutes les ‘osmičky’ comme disent les Tchèques, c’est-à-dire toutes les dates en 8, donc 1918, 1938, 1948, 1968, toutes les dates clefs du XXe siècle en Tchécoslovaquie. Si je fais 1948, je pourrai revenir sur la Première Guerre mondiale, parce que je ne peux pas expliquer la création de la Tchécoslovaquie sans expliquer la Première Guerre mondiale. »
Pour l’instant, ce sont uniquement des vidéos sur des sujets liés au XXe siècle. Envisagez-vous de revenir plus loin dans le temps sur l’histoire des pays tchèques ?« Je vais vous faire une petite confidence. Avant de faire ma première vidéo sur la place des Tchèques dans l’Empire austro-hongrois, juste pour mes amis et pour rigoler, j’avais fait une vidéo qui concernait Jan Hus, de façon très simplifiée. C’était vraiment pour rigoler, je faisais dire des bêtises à Jan Hus. Je crois qu’elle est montée à quelque chose comme 200 vues très rapidement. C’est là que je me suis dit qu’il y avait peut-être quelque chose à faire. »
La chaîne Carnet tchèque est disponible à l'adresse suivante : https://www.youtube.com/channel/UCdEPWcO3hkkuZXMQAA7m_2Q