A Prague, le discours de Jean-Claude Juncker sur l’état de l’Union est plutôt bien passé
« La Tchéquie occupe une place à part dans mon cœur ». Cette déclaration n’est pas celle d’un étudiant Erasmus quittant le pays à regret après une année passée à bien s’amuser, mais du président la Commission européenne. Jean-Claude Juncker l’assure : il ne veut pas d’une Europe divisée en deux entre l’ouest et l’est, et c’est uniquement aux Tchèques qu’il appartient de décider de l’adoption ou non de l’euro. Au lendemain du traditionnel discours annuel sur l’état de l’Union européenne (UE) prononcé devant le Parlement à Strasbourg par le Luxembourgeois, les réactions à Prague sont nombreuses. Et globalement positives.
Sans ordonner, il a toutefois rappelé l’engagement pris par tous les Etats membres au moment de leur adhésion à l’UE d’adopter l’euro. « Si nous voulons que l'euro unisse notre continent plutôt que de le diviser, il faut qu'il soit plus que la monnaie de quelques. L'euro a vocation à devenir la monnaie unique de toute l'Union européenne. Tous nos États membres, sauf deux, ont le droit et l'obligation d'adopter l'euro dès qu'ils rempliront toutes les conditions », a déclaré le président de la Commission. Malgré ce rappel, qui n’était pas le premier et ne sera pas le dernier, l’adhésion de l’euro est un sujet qui continue de diviser partis politiques, monde des affaires et opinion publique en République tchèque, comme le confirme la réaction du Premier ministre Bohuslav Sobotka, qui, malgré la fin prochaine de son mandat, nage toujours entre deux eaux :
« Nous voyons à travers l’exemple de la Slovaquie voisine que l’adoption de l’euro a été un projet fructueux. Cet exemple slovaque doit nous pousser nous aussi en République tchèque à réfléchir et à discuter davantage de la chose. »Plus globalement, le chef du gouvernement s’est félicité du fait que Jean-Claude Juncker ait mis l’accent sur la nécessité de solidarité entre Europe de l’Ouest et Europe de l’Est, ainsi que sur le refus de la double qualité de certains produits alimentaires, dossier cher aux pays du Groupe de Visegrád (République tchèque, Hongrie, Pologne, Slovaquie). « Les Tchèques ne méritent pas d’avoir moins de cacao dans leur chocolat », a-t-il même lâché, le le tout sans trop insister sur la question qui fâche de la migration.
Comme il ne souhaite pas de travailleurs de seconde classe selon lui en faisant référence, le président de la Commission ne souhaite pas davantage de citoyens de seconde classe. Or, comme l’a rappelé récemment le secrétaire d’Etat en charge des affaires européennes dans un entretien pour Radio Prague, c’est là une des priorités aux yeux des Tchèques. Aleš Chmelař avait expliqué pourquoi :
« On ne voit pas vraiment de progrès au niveau de la convergence des niveaux de vie, alors que nous pensions que l’UE apporterait des possibilités de progresser. Il ne s’agit de vouloir immédiatement le même niveau de vie qu’à l’Ouest, mais on veut voir une tendance. Les Tchèques voudraient avoir devant eux la perspective de devenir d’ici vingt ou trente ans un pays membre de l’UE non seulement institutionnellement et factuellement, mais aussi en termes de niveau de vie. »
Comme l’a dit Jean-Claude Juncker, l’Europe, de Vigo en Espagne à Varna en Bulgarie, d’est en ouest, l’Europe doit respirer avec ses deux poumons. Et cela ne pouvait forcément que plaire en Europe centrale. Par exemple à Prague…