Un vétérinaire tchèque récompensé à Paris pour la lutte contre la rage

Oldřich Matouch, photo : ČTK

Le vétérinaire Oldřich Matouch a consacré sa vie à la lutte contre la rage et a contribué, d’une manière significative, à l’éradiquer en République tchèque. Ce dimanche à Paris, il a été récompensé pour ses efforts par une médaille du mérite, octroyée par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE). Il est ainsi devenu le premier Tchèque de l’histoire à se voir décerner ce prix prestigieux.

Oldřich Matouch,  photo : ČTK
Depuis trente ans, l’OIE, la plus grande ONG en matière de santé et de bien-être animal, créée en 1924 et comptant actuellement 180 pays membres, octroie chaque année trois distinctions honorifiques aux scientifiques ayant contribué à faire diminuer différentes infections chez les animaux, et par-là à protéger la santé publique. Cette année, le conseil de l’organisation a choisi, parmi les candidats nominés, notamment un vétérinaire tchèque, Oldřich Matouch, pour ses mérites et sa contribution à la lutte contre la rage.

Cette maladie mortelle qui apparaît chez tous les animaux à sang chaud et qui est transmissible, par la salive des animaux infectés, également à l’homme, cause chaque année des dizaines de milliers de morts notamment en Afrique et en Asie. Il n’y a pourtant pas si longtemps, cette infection virale était présente également en République tchèque. Le vétérinaire récompensé, Oldřich Matouch décrit :

Photo : Barbora Kmentová
« Selon différents documents historiques, la rage était présente sur notre territoire pendant plus de cent ans. La lutte consistait pratiquement dans la réduction du nombre de renards qui représentaient la principale source de la contamination. Ce n’est qu’au cours des dernières décennies que nous avons développé des mécanismes qui nous ont permis d’éradiquer cette maladie. »

Le docteur Matouch s’est non seulement engagé dans le développement de cette nouvelle méthode de lutte contre la rage, basée sur la vaccination orale des renards via des appâts contenant des ampoules du virus affaibli qui permettent, après leur ingestion, de protéger l’animal, mais il est aussi devenu l’un des principaux initiateurs de la distribution massive de ces petites boîtes de vaccins en République tchèque. Lors de sa carrière plus tardive, ce vétérinaire de Liberec, une ville située en Bohême du Nord, a également vivement fait la promotion de la coopération internationale dans ce domaine et a publié de nombreux articles sur le sujet.

L’actrice Jana Brejchová dans le film « Jehla »  (« L’Aiguille »),  photo : ČT
Dans les années 1980 où la situation était la plus grave, un film intitulé « Jehla » (« L’Aiguille »), tourné pour la Télévision tchécoslovaque et réalisé par le cinéaste Jiří Svoboda d’après le scénario d’un célèbre écrivain tchèque, Jan Otčenášek, a même présenté l’histoire et le travail de ce scientifique. Comme l’ajoute Oldřich Matouch en souriant, pour rendre l’histoire plus intéressante, l’auteur du scénario a néanmoins décidé de transformer le personnage principal en une femme de sciences, mère célibataire, incarnée par l’actrice Jana Brejchová, qui essaie de gérer son temps qu’elle doit partager entre son enfant et son travail.

Un virus de la lutte,  photo : United States Department of Health and Human Services,  Public Domain
Les recherches effectuées sur ce virus dangereux n’ont pourtant pas toujours été faciles et couronnées de succès. Oldřich Matouch revient sur un accident au cours duquel il s’est vu lui-même menacé de contamination :

« Cela s’est passé pendant l’une de mes expériences. La seringue, à l’époque fabriquée en verre, s’est bouchée et quand j’ai essayé de la dégager, elle a craqué. Même si je portais un masque, la matière contaminée a pénétré derrière mes lunettes et jusqu’à mon œil. On ne pouvait pas exclure que l’infection ait atteint les muqueuses de l’œil. J’ai été obligé de subir tout le traitement, les vaccinations… C’était donc une situation assez dramatique, presque comme on l’évoque dans le film. On attendait, chaque jour, de voir si la maladie allait se déclarer ou non. Finalement, elle ne s’est pas déclarée. »

La vaccination antirabique,  photo : ČT
M. Matouch a participé personnellement à la remise de la médaille du mérite qui s’est tenue ce dimanche à Paris, à l’occasion de la cérémonie d’ouverture de la 84e session générale de l’Assemblée mondiale des délégués nationaux des 180 pays membres de l’OIE :

« C’est une récompense pour tous les efforts d’une vie et je peux dire que j’en ai été dans une certaine mesure quelque peu surpris car il y a d’autres maladies que l’on essaye d’éliminer, qu’il s’agisse de la maladie de la vache folle, du virus Ebola, du virus Zika, de la grippe aviaire ou d’autres encore. Mais la commission attend peut-être de voir si cette élimination est efficace. Depuis 2002, la rage n’est pratiquement plus apparue sur notre territoire, la méthode a donc fait ses preuves. »

Le programme de vaccination lancé par Oldřich Matouch s’est étalé sur vingt ans, de 1989 à 2009, et a permis d’éradiquer la rage du pays. Le dernier cas d’un renard enragé sur le territoire tchèque a été enregistré en avril 2002. Bien que la République tchèque ait obtenu, en 2004, le statut mondialement reconnu du pays indemne de la rage, des examens préventifs contrôlent chaque année quelque 3000 animaux pour confirmer que cette maladie a disparu à jamais.