Loi sur le logement social : mieux vaut tard que jamais

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Alors qu’un rapport du ministère du Travail publié ce mardi estime que le nombre de quartiers ghettoïsés a doublé ces dix dernières années, la République tchèque ne dispose toujours pas d’un système de logement social. Cela pourrait évoluer à l’avenir avec le plan présenté ce lundi par le gouvernement tchèque. Le texte est critiqué par l’opposition de droite, qui regrette l’effort demandé aux communes, mais salué par des militants du logement social, qui craignent cependant que la loi, qui a pris du retard, ne voit pas le jour avant l’échéance électorale de l’automne 2017.

Michaela Marksová,  photo: ČT24
« La grande majorité des municipalités ont privatisé la totalité de leurs biens et ces gens, les personnes âgées ou bien les mères seules, n’ont personne vers qui se tourner pour trouver de l’aide. Je pense que la République tchèque, au cœur de l’Europe, est un pays relativement riche et qu’il est tout simplement scandaleux que nous n’ayons pas de loi sur le logement social. »

Voici près de 20 ans qu’il est question en République tchèque d’une telle loi et Michaela Marksová, la ministre du Travail et des Affaires sociales, qui s’exprimait après le conseil des ministres de lundi, entend qu’elle devienne enfin réalité avec la conception sur le logement social adoptée par la coalition gouvernementale. Pour cela, elle souhaite s’appuyer sur l’expérience des rares communes qui se sont déjà emparées du sujet.

Sur le modèle de la loi SRU en France, les municipalités tchèques devront réserver un certain pourcentage de leur parc habitable, taux qui reste à déterminer, pour le logement social. Celui-ci se déclinera en trois variantes, le logement de crise prévu pour les personnes sans-abri ou dont la vie est menacée, des appartements sociaux pour les personnes prises en charge par les services sociaux, et des appartements dits accessibles, principalement destinées aux retraités, aux personnes handicapées, aux familles monoparentales ou encore aux victimes de violences domestiques. Une aide doit être apportée aux ménages qui consacrent plus de 40% de leurs revenus à un logement adapté à leurs besoins.

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La conception table sur la mobilisation des investisseurs immobiliers pour construire de nouveaux logements, dont l’usage pourrait être mis à la disposition des municipalités. Selon le quotidien Mladá fronta Dnes, cela ne plait guère aux professionnels du secteur qui ne savent pas encore si les biens construits seront vendus, loués ou bien tout simplement donnés aux communes. L’opposition de droite n’est pas satisfaite non plus. Pour Lenka Kohoutová, du parti ODS, le logement social devrait être pris en charge au niveau de l’Etat et les allocations logement et sociales conditionnées à l’exercice d’un travail. Au contraire, les militants de longue date du logement social saluent le pas en avant que constitue cette conception. C’est le cas de Vít Lesák, de la Plateforme pour le logement social, interrogé par la Radio tchèque :

« Cette conception dit clairement la façon dont devraient se répartir les tâches entre les communes, l’Etat, le ministère, le Bureau du travail et la façon dont devrait fonctionner le système d’allocations. Les communes qui essaient de trouver des solutions constructives à la question du logement social ont besoin de savoir de la part de l’Etat sur quoi elles peuvent compter, à quoi servira l’argent mis sur la table et ce que l’on attend on non des municipalités. Et c’est précisément ce que propose cette conception du logement social : des instructions claires pour les communes et un soutien financier relativement significatif. »

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Seul bémol et pas des moindres du côté de la Plateforme : le retard pris par le gouvernement, qui a déjà par deux fois, en avril et en juin derniers, repoussé l’étude du texte. Même si Michaela Marksová assure que la loi pourra être appliquée dès 2017, les associations craignent que la coalition gouvernementale ne prenne pas de risques sur ce sujet jugé délicat à l’approche des élections législatives prévues à l’automne de cette même année.

D’autant plus qu’il y a urgence si l’on en croit le document publié ce mardi par le cabinet de la ministre sur les quartiers socialement exclus en République tchèque. En dix ans, leur nombre a doublé et 115 000 personnes, souvent peu qualifiées, au chômage, endettées, vivent dans ces localités. Plus nombreux, ces quelque 600 quartiers sont aussi plus petits et plus dispersés ce qui a pour effet de compliquer la tâche des travailleurs sociaux.