Festival de la musique ancienne : de la Prague baroque au Paris classique
La 15e édition du festival de la musique ancienne à Prague est sur le point de se terminer. Ce mercredi, le dernier concert sera consacré à un projet franco-tchèque intitulé « Grâce et majesté ». L’ensemble tchèque Collegium Marianum accompagnera le baryton Alain Buet et la mezzosoprano Isabelle Druet. Au programme : l’apogée de la musique baroque centre-européenne et des pièces de Jean-Philippe Rameau dont l’année 2014 marque le 250e anniversaire de la mort.
« C’est intéressant d’avoir les deux parties du programme, de voir et comparer les styles d’écriture, et puis, pour nous, de découvrir car je n’ai jamais chanté une seule note de Fux, donc cela sera une première pour moi. C’est très beau, cela fait penser à Haendel, Scarlatti, ça pourrait aller vers Haydn. Puis, je suis fan de Zelenka dont j’ai déjà chanté les lamentations. »
Isabelle Druet est mezzosoprano avec un parcours peu ordinaire dans le monde de l’opéra et de la musique classique, car elle a commencé par le théâtre et la musique plus moderne. Les deux interprètes sont pour la première fois à Prague, mais ils ont déjà coopéré plusieurs fois ensemble. Récemment, ils se sont retrouvés dans un opéra d’André Campra, « Tancrède », joué en Avignon et à Versailles. Par rapport à sa découverte de la musique centre-européenne, Isabelle Druet remarque :
« J’ai peu chanté de Zelenka, mais j’en ai entendu. ‘Le Miséréré’ fait partie des œuvres qui m’ont vraiment touchée et m’ont donné envie de chanter cette musique. Fux, par contre, est un compositeur que je ne connaissais pas. L’air que j’ai à chanter est très beau. On sent qu’il y a une influence très forte des musiques françaises, et puis, dans cette période classique, on sent qu’il a voyagé beaucoup, qu’il y a ce phénomène des cours princières qui font que les musiciens voyagent, s’entendent et s’influencent. »Pour Alain Buet, Jean-Philippe Rameau représente l’apogée du baroque. Mais il s’agit également d’un grand novateur, ce que confirme Isabelle Druet :
« Il y a aussi ce rapport avec Rameau que je n’ai pas énormément chanté, j’ai beaucoup plus chanté Lully, Campra ou Destouches. Rameau est un peu plus tardif et, au niveau des voix, il commence déjà à faire une classification. Il y a vraiment les personnages avec les voix aigues. Il commence à y avoir des fossés entre les différents rôles. Donc, c’était intéressant de se pencher là-dessus et de voir avec Jana Semerádová (dramaturge du festival, nldr) quel rôle je pouvais chanter, tout en sachant que je suis mezzosoprano. Il fallait donc prendre des airs dans une tessiture un peu plus grave, ce qui fait que l’on se retrouve avec les personnages un peu plus dramatiques. »
Pour se préparer, les deux interprètes se renseignent sur la pièce, sur l’auteur ainsi que sur le contexte historique de sa création. Ils s’accordent sur l’importance de la bonne déclamation :« Maintenant, on répète assez peu, souvent pour des raisons économiques. Donc, il faut arriver bien préparé. On travaille chez soi. Pour la musique baroque, les notes ne sont pas difficiles à apprendre. C’est la déclamation qui est importante, c’est-à-dire savoir ce que l’on dit, dans quel contexte, et puis comment le dire. C’est un peu comme écrire le texte en chantant pour que les gens voient le texte et pour aider le public à être plus intelligent avec l’histoire, le texte, etc. »
La salle espagnole du Château de Prague accueille le dernier concert du festival de la musique ancienne ce mercredi soir.