Triste rapport sur la condition des femmes de ménage étrangères en République tchèque
Diplômées mais avec des droits bafoués : nombre des femmes de ménage, nourrices et autres ménagères étrangères travaillant en République tchèque n’ont pas la vie facile. Pour la première fois, un rapport établi par la Faculté des sciences humaines de l’Université Charles de Prague en collaboration avec l’ONG L’Homme en détresse et l’Association chargée des affaires de migration et d’intégration, met en avant le non-respect des droits de ces femmes souvent employées au noir et dénonce leurs conditions de travail, alors que deux sur trois d’entre elles possèdent un diplôme d’études secondaires et une sur quatre de l’enseignement supérieur.
« D’après les résultats de notre étude, 60% des femmes de ménage étrangères en République tchèque sont originaires d’Ukraine. Mais, bien entendu, on est en présence également de toute une palette d’autres nationalités. On trouve ainsi beaucoup de Philippines qui travaillent souvent dans les services à domicile et habitent directement dans les familles. Il y a aussi des femmes en provenance des anciennes républiques soviétiques : la Moldavie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, etc., et enfin d’autres encore originaires des pays d’Afrique et du monde arabe. »
L’étude, menée sur un échantillon de 104 femmes originaires de seize pays différents, permet également de dégager les principales motivations de ces travailleuses à leur arrivée en République tchèque. Sans surprise, elles sont 63% à déclarer que la raison est avant tout pécuniaire. Pour 45% d’entre elles, le fait d’avoir de la famille en Tchéquie a joué un rôle important. Autres facteurs déterminants pour une large partie des femmes originaires des anciennes républiques soviétiques : le système de santé en République tchèque, un environnement plus sécurisé ou encore une meilleure qualité de vie pour leur famille.
Néanmoins, si la République tchèque est synonyme de revenus plus importants, il en va autrement pour ce qui est du respect des droits de ces travailleuses étrangères souvent exploitées. Ces droits sont en effet largement bafoués. Plus de 40% des femmes de ménage étrangères sont employées illégalement et sans avoir signé le moindre contrat. Une réalité que déplore Magda Faltová:
« Nous devons nous rendre compte que l’absence de formalisme dans les contrats de travail, avec plus de 50% des cas qui n’ont aucun contrat écrit, mène au fait que les droits de ces travailleurs ne sont pas respectés : le droit à des vacances, le droit à une durée fixe du temps de travail et bien d’autres choses encore. Cela entraîne de grands malentendus entre les employées et leurs employeurs, car aucune de ces deux parties ne s’est renseignée sur ses droits et ses obligations. »Cette situation conduit à des abus, notamment en ce qui concerne le temps de travail et les salaires. La majorité de ces femmes travaillent de six à sept jours par semaine à raison de douze à quatorze heures par jour, et ce sans que leurs heures supplémentaires ne leur soient réglées. Pour clarifier cette situation, la présidente de l’Association chargée des affaires de migration et d’intégration souhaite par exemple proposer des contrats rédigés dans la langue maternelle de la travailleuse :
« Je pense que le plus important est que le contrat soit rédigé dans une langue que la femme appelée à être employée comprenne. En tant qu’employeur, je ne souhaiterais pas avoir des employées avec lesquelles je serais incapable de discuter et auxquelles je serais incapable d’expliquer ce sur quoi repose notre accord. Bien sûr il peut y avoir d’autres solutions : la travailleuse peut, par exemple, être accompagnée de quelqu’un qui parle le tchèque afin qu’elle puisse se mettre d’accord avec son employé et s’assurer que le contrat a bien été rédigé en bonne et due forme. »
Pour ce faire, une campagne vidéo a été lancée par l’Association chargée des affaires de migration et d’intégration afin de sensibiliser les employeurs aux droits des travailleuses avec pour slogan « Comportez-vous comme vous aimeriez que vos employeurs se comportent avec vous ». Et pour faire évoluer la situation, Magda Faltová expose les mesures concrètes à prendre :
« Il faudrait que les étrangères soient moins dépendantes de leurs employeurs et que, dans le cas où elles perdraient leur travail pour une quelconque raison, elles puissent bénéficier des trois mois de préavis afin de retrouver un emploi et ainsi pouvoir se maintenir sur le marché légal du travail. Mais il y a une autre mesure urgente qui doit être prise : l’inspection du travail doit être beaucoup plus sévère envers les employeurs. »