Supprimer les limites d'extraction de lignite : quelles conséquences pour la Bohême du Nord ?
Supprimer ou non les limites d’extraction de lignite en Bohême du Nord ? La question revient de nouveau sur le devant de la scène. Les partisans de l’élargissement des mines à ciel ouvert défendent l’emploi dans la région ainsi que la compétitivité du secteur énergétique tchèque. Autant d’arguments que ses opposants rejettent pour préférer préserver l’environnement, empêcher la disparition de plusieurs communes et dénoncer la pression du lobby énergétique.
Depuis, cependant, ces limites sont régulièrement remises en cause par les syndicats des mineurs, les sociétés d’exploitation du lignite, ainsi que par certains politiques. En octobre dernier, le président de la République, Miloš Zeman, s’était ainsi prononcé en faveur de l’abolition des limites :
« Si nous n’abolissons pas ces limites, jusqu’à 8 500 emplois seront supprimés. Dans le district de la ville de Most – qui connaît le plus grand taux de chômage de toute la région d’Ústí nad Labem –, un tel chiffre constituerait une tragédie. »Jiří Rusnok, le chef du gouvernement démissionnaire, a pris le relais du chef de l’Etat quelques semaines plus tard. En visite à Most la semaine dernière, le Premier ministre a déclaré qu’il considérait « obsolète » l’arrêt de 1991. De peur que le gouvernement prochain ne partage pas cette opinion, les syndicats ont eux aussi appelé, mercredi, à la suppression, le plus rapidement possible, des limites.
Selon la loi minière en vigueur, la société d’exploitation Litvínovská uhelná se doit de proposer une compensation appropriée aux propriétaires des terrains sous lesquels se trouve le lignite. La majorité des habitants d’Horní Jiříkovice, une des communes concernées, sont toutefois contre l’ouverture même de négociations. C'est ce qu’affirme Jan Rovenský, chef de la campagne Climat et Energie de Greenpeace :
« En réalité, seuls 30 % des habitants, selon nos calculs, sont disposés à trouver un accord avec la société minière. Le reste est essentiellement contre. De plus, 50 % des propriétaires des terrains et des biens immobiliers ont signé une déclaration dans laquelle ils refusent de vendre leur maison. »Vice-président du syndicat des employés des mines, de la géologie et de l’industrie du pétrole, Jaromír Franta ne partage pas l’avis des « spéculateurs verts », comme il surnomme les adversaires de l’abolition des limites :
« Je reste persuadé que les gens normaux, avec des opinions normales, ceux qui ont une vision réaliste de la situation, ces gens-là trouveront un accord avec la société minière et quitteront volontairement leur domicile. »
Parmi les « spéculateurs verts » figurent également, au côté des écologistes, les représentants des communes. Maire de la petite ville de Litvínov, Milan Šťovíček est fermement opposé à l’élargissement des extractions. Les mines à ciel ouvert atteindraient la proximité immédiate de sa ville, qui compte 25 000 habitants.
« Les habitants de cette région – et je suis là pour les représenter – savent qu’il y a quelque chose qui cloche. Ils vivent depuis des années dans une région dont les caractéristiques sont un environnement dévasté, le niveau d’éducation le plus bas du pays, le taux de chômage le plus important, de fortes tensions sociales, une durée de vie moyenne inférieure de plusieurs années à celle du reste de la population tchèque... Devant ces problèmes, l’Etat défend la nécessité de poursuivre l’exploitation pour maintenir la compétitivité du pays sur le marché énergétique. Mais ces gens ne tirent aucun profit de cette présumée compétitivité, il n’en résultent, pour eux, que des problèmes ! »Reste à savoir si la République tchèque, un des plus grands exportateurs au sein de l’Union pour la coordination du transport de l’électricité en Europe (UCTE), a réellement besoin de renforcer sa production de charbon au détriment de son environnement.