Une réforme pour rendre les soins psychiatriques plus humains et efficaces
Si la société tchèque a vécu de profonds changements depuis la chute du régime communiste en novembre 1989, ceux-ci n’ont presque pas touché le domaine de la psychiatrie. Ainsi, le ministère de la Santé prépare une vaste réforme qui vise à transformer l’organisation des soins psychiatriques, par ailleurs sous-financés par l’Etat, en les rendant plus modernes et plus accessibles, bref, plus efficaces.
En République tchèque, la situation est toutefois particulière. Selon les spécialistes, le système de soins, dont les piliers sont les grands hôpitaux psychiatriques disposant actuellement d'environ 9 000 places, existe sous une forme presqu’inchangée depuis sa mise en place au XIXe siècle. Le projet de réforme entend décentraliser le système, au profit de petites structures d’accueil, telles que les centres communautaires, mais dont la capacité n’est pour l’instant que de 200 places… Néanmoins, l’objectif n’est pas de supprimer, du jour au lendemain, les lits dans les hôpitaux, comme le suggèrent les critiques de la réforme. Martin Hollý, directeur de l’Hôpital psychiatrique de Prague-Bohnice explique :
« Cette réforme vise l’ensemble des besoins des patients. Car une maladie psychique influence non seulement leur état de santé, mais également tous les domaines de leur vie. C’est donc l’individu et sa qualité de vie qui sont au cœur de cette transformation. L’objectif est la mise en place d’un système qui s’appelle ‘balanced care’, donc un système de soins équilibré, et non pas la suppression de lits ou d'hôpitaux en tant que tels. Celle-ci peut être la conséquence du processus de transformation, au moment où un réseau d’autres structures susceptibles de prendre en charge les patients sera suffisamment développé, mais elle ne sera pas son objectif principal. »Si, pour certains patients souffrant de maladies graves ou de longue durée, il n’y a pas d’alternative à l’hospitalisation, d’autres malades pourraient être pris en charge par plusieurs dizaines de centres communautaires qui devraient être créés progressivement dans toutes les régions du pays. On écoute le psychiatre Martin Hollý :
« Ce qui est important pour un patient psychiatrique, c’est surtout l’accessibilité aux soins en terme de la distance et du temps. A la base, les troubles psychiques détruisent les liens entre le malade et son entourage. Si, en plus de cela, nous le déplaçons loin de son lieu d'habitat, son retour à la vie normale devient très compliqué, du simple fait que le personnel soignant ne peut pas être en contact direct avec les institutions et services de sa ville ou de sa région. Cette situation n’aurait pas lieu s’il y avait un réseau de centres d’accueil locaux. »Ces centres d’accueil, mis en place pour des agglomérations d’environ 100 000 habitants, seront créés avec le soutien financier de l’Union européenne : la République tchèque devrait recevoir, entre 2014 et 2020, quelque 6 milliards de couronnes (plus de 230 millions d’euros) destinées à moderniser le système des soins psychiatriques, subventionnés jusqu’à présent par seulement 3,5% du budget de la Santé publique, la moyenne européenne étant de 8%. Le projet de la réforme pourrait être finalisé d’ici juillet prochain.