« Jiří Kolář m’a apporté l’éthique en art »

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Du 22 mars au 26 avril, le Centre tchèque de Paris accueille l’exposition « La liberté est un collage – Hommage à Jiří Kolář ». Organisée par l’artiste collagiste et poète Pierre Jean Varet, à l’origine du tout premier musée du collage en France, cette exposition collective revient sur le travail de l’artiste tchèque et ses influences sur les collagistes actuels. Pierre Jean Varet est revenu au micro de Radio Prague sur la genèse de cette exposition :

« L’idée de l’exposition, elle vient de loin. J’ai eu la chance de connaître Jiří Kolář et le considère comme le ‘Maître’. J’ai été longtemps en relation avec lui, puis il est décédé. Pour moi, il est le grand personnage de l’art du collage. Je ne fais pas une conférence, pas un stage sans parler de ‘Maître’. Cela me semble être un devoir évident, d’autant plus qu’il est mal connu généralement, et dans l’art du collage par rapport aux nouvelles générations. Donc pour moi il était normal qu’un jour ou l’autre, moi qui édite des livres sur le collage, je fasse un livre en hommage à Jiří Kolář et que ce livre se transforme en exposition. C’est une suite logique… »

Précisons que le vernissage de l’exposition aura lieu le 21 mars, et que l’exposition commence le 22 mars pour s’achever fin avril. Vous avez invité de nombreux artistes collagistes à répondre aux collages de Jiří Kolář…

« Tout-à-fait. Dans le cadre de l’exposition, 40 toiles sont exposées. Ce sont 40 artistes qui rendent hommage à Jiří Kolář par un collage et qui ont écrit un texte pour expliquer leur affection, l’influence qu’ils perçoivent sur leurs propres travaux. Ces textes seront en-dessous des tableaux. »

Vous êtes fondateur de l’association Artcolle et du Salon international du collage contemporain. Quelle est l’importance de Jiří Kolář pour cet art somme toute particulier…

Photo: Česká centra
« C’est un technicien et un philosophe du collage. Il a inventé plein de techniques, ça tout le monde le sait. Mais je pense qu’il a beaucoup de travaux en suspens qui doivent intéresser tous ceux qui font de la recherche sur l’art du collage pour continuer la voie qu’il a lancée, notamment le lien entre la poésie et le collage, la poésie visuelle. Quand on relit Jiří Kolář ou qu’on revoit ses œuvres, on se rend compte qu’il est d’une modernité incroyable. »

Vous disiez qu’il reste, étonnamment, peu connu. Comment expliquez-vous cela ?

« Parce qu’il est dans deux domaines : dans la poésie qui n’est pas très bien considérée en ce XXIe siècle, à notre époque libérale, et dans le collage qui n’a jamais été très bien considéré dans les arts académiques. Il est un peu la star de deux mondes hors lumière. Il n’y avait aucun livre contemporain en français sur Jiří Kolář. A travers mon ouvrage ou mes conférences, les gens peuvent s’intéresser à Kolář, ils font des recherches pour en savoir plus… Je crois que la seule rétrospective en France sur Kolář remonte à celle de Dijon en 2002 ou 2003, ce qui est peu par rapport à l’immense artiste qu’il est. »

Vous disiez que vous aviez connu Jiří Kolář personnellement. Quels sont les souvenirs de vos rencontres ?

Photo: NG Praha
« Il était adorable. Comme tous les grands bonhommes. J’ai rencontré les plus grands maîtres de l’art du collage et ils ont tous un point commun, ce sont des gens charmants… Il m’a accueilli alors que j’étais un jeune artiste, il a eu confiance en moi, il m’a exposé. Il a été le premier grand artiste à soutenir mon idée de créer un musée sur l’art du collage. Et parfois, quand j’écrivais une petite biographie sur Jiří Kolář, je me posais la question : qu’est-ce qu’il m’a apporté à moi, dans ma vie ? En fait, ce ne sont pas trop les techniques. Je crois qu’il m’a apporté l’éthique en art. »