Cinq ans de prison pour le député qui a sauvé le gouvernement
Il n’aura été député qu’un mois et quelques jours. Roman Pekárek du parti de droite ODS a vu sa culpabilité dans une affaire de corruption et d’abus de confiance confirmée en appel par la Haute-cour de justice de Prague qui l’a condamné à cinq années de prison et à une amende de près de 10 000 euros. Sa nomination à la députation en urgence a tout de même permis au gouvernement de sauver sa peau lors d’un vote de confiance et d’adopter une série de lois controversées, qu’il s’agisse du « paquet de stabilisation financière » ou des restitutions des biens aux Eglises expropriés par le régime communiste.
Lors de sa nomination de dernière minute début novembre, en remplacement d’un membre « dissident » de l’ODS, l’opposition sociale-démocrate soupçonnait le groupe parlementaire civique-démocrate d’avoir demandé la loyauté à Roman Pekárek en échange de quoi son immunité parlementaire le protègerait des poursuites auxquelles il faisait face. Le nouveau député a pourtant été très vite totalement abandonné par sa famille politique. Il n’a ainsi été membre du groupe parlementaire ODS que durant un jour et demi. Surtout, le 4 décembre dernier, 158 députés sur les 161 présents ce jour-là ont considéré que Roman Pekárek devait répondre de ses actes devant la justice et ont donc levé son immunité parlementaire. Les partis du gouvernement auraient cependant préféré qu’il quitte son poste de son propre chef mais ont été contraints de le pousser vers la sortie. Petr Gazdík, le président du groupe parlementaire TOP 09 :
« Il s’agit malheureusement de sa décision personnelle. Aucune force au monde n’est capable autrement de lui faire abandonner son mandat de député. »Il faut dire que Roman Pekárek était devenu plus qu’embarrassant. La médiatisation grandissante de cette nomination pour le moins sujette à caution a pu jouer un rôle, tout comme la relative maladresse de l’ancien adjoint au maire de la ville de Kolín. Une maladresse qui s’est exprimée par exemple dans un entretien à la Radio tchèque, le lendemain de sa prestation de serment de nouveau député, où il a produit un discours totalement incohérent, ne parvenant ni à se souvenir des évènements ayant amené à sa nomination pourtant intervenus 24 heures plus tôt, ni s’il avait promis de voter en faveur des projets gouvernementaux, ni même en quels termes la question de sa condamnation avait été évoquée. On l’écoute :
« Comprenez que ce sont des moments où peu de choses restent en mémoire. Au moins en ce qui me concerne, je suis un homme relativement émotif et j’ai déjà fait l’expérience au cours de ma vie d’instants d’émotion dont je ne parviens pas à me souvenir par la suite. Je me rappelle plutôt d’un sentiment, d’une humeur, d’une situation mais je n’imprime vraiment pas les mots qui ont pu être dits. »La coalition gouvernementale s’est donc débarrassée d’un député gênant qui lui a pourtant sauvé la mise puisqu’il lui a permis d’obtenir la confiance d’une majorité des membres de la Chambre basse et a voté tous les textes sur lesquels le gouvernement semblait embourbé : le projet de stabilisation financière incluant une hausse de la TVA ou encore la restitution des biens aux Eglises, jugée par beaucoup inappropriée en ces temps de vaches maigres. Roman Pekárek ne peut plus exercer de fonction d’Etat durant cinq ans mais semble pouvoir rester député s’il le souhaite. La question se pose cependant de savoir comment il pourrait dans ce cas assurer ses fonctions depuis la prison où il devrait être accueilli dès la semaine prochaine.