Qualité de l’air en République tchèque, le Sénat examine la loi dite du 'pollueur-payeur'

Les sénateurs tchèques examinent ce jeudi un projet de loi sur la protection de la qualité de l’air. Alors que le gouvernement avait présenté un texte augmentant plus de trois fois, entre 2017 et 2021, la taxe des pollueurs, industriels les députés de la Chambre basse sont favorables à l’établissement d’un moratoire sur la loi dite du ‘pollueur-payeur’ pour les neufs prochaines années; générant des critiques de la part des associations d’écologistes et des responsables des collectivités territoriales où la pollution de l’air est alarmante.

Selon le comité économique du Sénat, la taxe pour les pollueurs industriels devrait rester en vigueur jusqu’en 2016 puis baisser progressivement. Pour le vice-président du conseil économique Karel Šebek (ODS), le projet de loi du pollueur-payeur a une dimension incitative pour les entreprises émettrices de rejets atmosphériques polluants. Le texte prévoit en effet que si les entreprises se rapprochent des normes européennes avant la date qui leur a été fixée, l’Etat pourrait octroyer un allègement fiscal. Cette mesure devrait inciter les entreprises à moderniser leurs moyens de production afin d’abaisser les niveaux d’émissions.

La qualité de l’air est un problème majeur de santé public dans les bassins industriels et les grandes villes, Prague comprises. Avec les villes du bassin minier de la Bílina dans la région d’Ústí nad Labem, la région d’Ostrava est sans aucun doute celle où les taux recommandés d’émission de poussières industrielles sont régulièrement dépassés. Pourtant, à l’opposé du Sénat, les députés de droite (ODS-TOP 09) de la Chambre basse du Parlement souhaiteraient abolir la loi sur la taxation des émissions afin de ne pas pénaliser l’industrie tchèque en période de crise. Petr Kajnar est le maire de la ville d’Ostrava, l’une des villes les plus polluées du pays. Il réagit à cette initiative des députés :

Petr Kajnar
« Nous considérons qu’il s’agit d’une mauvaise décision car nous ne souffrons pas seulement de l’émission des poussières industrielles mais également du rejet dans l’air d’autres particules chimiques. Nous souhaitons tous vivre dans un environnement où l’industrie ne nous contamine et ne nous empoisonne plus. L’objectif est d’avoir une production industrielle qui ne pollue pas. Or, nous ne pourrons jamais atteindre cet objectif si les entreprises ne sont pas sanctionnées »

Soucieux de préserver le niveau de l’emploi industriel, principal secteur d’activité de la région de Moravie Silésie, le maire d’Ostrava estime que la politique d’incitation à la modernisation proposée par le Sénat permettrait de faire avancer les choses dans la bonne direction.

« Je ne pense pas qu’il soit bon d’accabler avec davantage de taxes le secteur industriel en République tchèque qui est actuellement en difficulté. L’idéal serait de trouver un moyen de motivation pour les industriels. C’est-à-dire de proposer de baisser la taxe anti-pollution si une entreprise parvient à baisser son taux d’émission »

Pour le président du comité environnemental du Sénat, Ivo Bárek (ČSSD), l’un des principaux défenseurs de la taxation, le principe du pollueur-payeur devrait être prolongé. La question est de savoir de quelle manière. Il précise, en outre, que des mesures incitatives, devraient être adoptées afin que les entreprises investissent dans des technologies plus propres.

Ondřej Horký est chercheur en sciences sociales. Spécialiste du développement, il est un observateur avisé de la situation environnementale en République tchèque. Il rappelle les enjeux environnementaux des débats sur le principe du pollueur-payeur

« Nous avons des organisations écologiques et évidemment des collectivités locales dans les régions sous pression qui sont très mécontentes du fait que les industries n’ont plus d’entraves à leurs émissions et aucune motivation pour améliorer leurs technologies afin d'améliorer la qualité de l’air et la santé des gens dans ces régions »