« Un autre air » : vingt ans de surréalisme en République tchèque
A partir du 10 février et jusqu’au 4 avril, la galerie de l’ancien Hôtel de Ville de Prague propose une grande exposition consacrée à vingt ans de création surréaliste tchèque et slovaque. De nombreux auteurs étrangers, français notamment, sont également présentés dans le cadre de l’exposition intitulée « Un autre air ».
Depuis, le surréalisme n’a pas cessé d’exister. Bien au contraire. Dans les pays tchèques notamment il est encore particulièrement actif, avec l’un de ses plus grands représentants, Jan Švankmajer, cinéaste, mais aussi expérimentateur tous azimuts de nouveaux types de création. Dans la galerie de l’ancien Hôtel de Ville de Prague, il présentera à partir du 10 février diverses expérimentations dont une œuvre un peu particulière :
« J’ai plusieurs cycles qui sont présentés, mais j’y présente notamment une expérimentation que je réalise en commun avec de la pierre thermale à Karlovy Vary. Je place des objets dans l’eau thermale qui y laisse ses sédiments. C’est ainsi que d’étranges fossiles voient le jour. »L’exposition « Un autre air » (Jiný vzduch) retrace vingt ans de création surréaliste. Elle est la plus grande exposition organisée depuis le premier événement de ce genre dans la nouvelle Tchécoslovaquie libre au début des années 1990. Auparavant, sous le communisme, les choses étaient évidemment bien plus compliquées, comme le rappelle František Dryje, rédacteur en chef de la revue surréaliste Analogon :
« Sous le communisme, la toute dernière exposition collective surréaliste libre s’est déroulée en 1966. Evidemment, après l’occupation de la Tchécoslovaquie en 1968, le Surréalisme a dû retourner dans l’illégalité. Nous n’avions pas le droit d’exposer. Un peu plus tard, dans les années 1980, quelques possibilités d’exposer ont vu le jour. Nous avons pu par exemple installer une exposition au château de Sovinec, mais au dernier moment, la StB, les services de sécurité d’Etat nous ont forcés à l’annuler. » C’est avec le retour de la démocratie en 1989 que les surréalistes peuvent à nouveau exposer librement. Pendant toute la période de la normalisation, les liens entre le groupe surréaliste de Prague et celui de Paris, permettent aux Tchèques et aux Slovaques de s’exprimer hors des frontières de leur pays. Les liens entre les surréalistes tchèques et français sont donc primordiaux comme le rappelle Jan Švankmajer :« Ces relations sont, depuis les années 1970, très intenses. Le groupe de Prague ne pouvait pas publier, s’exprimer. Les Français nous ont permis de publier dans leurs revues. Aujourd’hui, nous leur rendons la pareille et nous publions les surréalistes français dans notre revue Analogon. En outre, des artistes français vont être présentés à l’occasion cette nouvelle exposition. Et l’an dernier, j’ai eu droit à une grande rétrospective de mes films à Paris. »
« Un autre air » est une exposition, mais celle-ci va de pair avec de nombreux événements annexes comme des projections de films au cinéma Ponrepo à Prague, des visites commentées ou encore des soirées littéraires tous les jeudis au café littéraire de la rue Řetězová. Que peut apporter le surréalisme aux vies de chacun ? Réponse de Jan Švankmajer :« Le surréalisme contemporain se définit en contre-pied de la civilisation actuelle. Dès les années 1930, le surréalisme a voulu, selon son adage, ‘changer le monde, transformer la vie’. Même si cela semble aujourd’hui une utopie, je pense que c’est toujours actuel, en tout cas dans la création à proprement parler. Et ce quand bien même cette idée est vouée à l’échec. Je pense qu’aucun auteur ne peut se donner d’autres objectifs que de changer le monde et transformer la vie. »
Plus d’informations sur l’exposition sur : www.analogon.cz