Vladimír Šmicer : « Nous n’avons fait que défendre en Espagne, mais c’était malheureusement notre maximum »
Contre l’Espagne et le Lichtenstein, l’équipe de République tchèque de football a disputé, la semaine dernière, les deux seuls matchs de qualification à l’Euro 2012 figurant à son calendrier au printemps. Logiquement battus en Espagne (1-2) et laborieux vainqueurs à domicile du Lichtenstein (2-0), les partenaires de Petr Čech et Tomáš Rosický occupent provisoirement la deuxième place du groupe I, loin derrière l’Espagne, pratiquement assurée de se qualifier directement, et avec cinq points d’avance (mais un match disputé de plus) sur l’Ecosse et la Lituanie, ses deux concurrents pour la place finale de deuxième et de barragiste. Le lendemain de la difficile victoire contre le Lichtenstein, le manager de l’équipe nationale, Vladimír Šmicer, est revenu au micro de Radio Prague sur ces deux rencontres pour en faire le bilan :
« Pour ce qui est du deuxième match contre le Lichtenstein, nous aurions voulu en montrer un petit peu plus. Nous avons certes gagné 2 à 0, mais d’une manière qui ne me plaît pas trop. Je pense que nous devrions être beaucoup plus réguliers et plus forts techniquement. Nous avons fait trop d’erreurs et perdu trop de ballons au milieu de terrain. Le Lichtenstein a d’ailleurs eu deux ou trois occasions dangereuses qui auraient pu lui permettre de marquer. Bien sûr, nous sommes contents de la victoire, mais il faudra que la manière soit différente la prochaine fois. »
On sait que les matchs contre les « petites équipes » comme le Lichtenstein sont toujours difficiles à aborder pour les joueurs. On peut également supposer qu’il n’a pas été facile pour eux de se remotiver après avoir perdu de cette manière en Espagne. Malgré tout, comment expliquez-vous la différence de qualité entre les deux matchs ? Car, même si elle ne s’est procurée aucune occasion en Espagne, on avait vu là-bas une équipe courageuse, accrocheuse, puis très décevante contre le Lichtenstein.
« Nous sommes quand même une équipe qui, traditionnellement, sait mieux défendre qu’attaquer. En Espagne, nous n’avons fait que défendre. Notre objectif était d’abord de ne pas prendre de but. Contre le Lichtenstein, nous sommes bien rentrés dans le match en marquant d’entrée. Je pensais alors que l’équipe serait plus tranquille, qu’elle allait faire le jeu. Mais, sans que je sache pourquoi, les joueurs ont été très nerveux et ont perdu beaucoup de ballons. Pour moi, c’est d’abord un problème technique : nous avons raté trop de gestes. Peut-être les joueurs n’étaient-ils pas assez concentrés non plus, car je ne pense pas qu’ils étaient fatigués. Ils ont eu quatre jours de récupération après le match contre l’Espagne. Je pense surtout que les joueurs doivent être plus costauds dans leur tête. »En Espagne, après le match, le sélectionneur Michal Bílek a estimé que son équipe aurait mérité d’obtenir un meilleur résultat que cette courte défaite. C’est un point de vue, parce que si on regarde le contenu du match, les Tchèques ne se sont procurés aucune occasion et ont marqué sur une frappe de 30 mètres un peu miraculeuse. N’est-ce pas inquiétant quand même ? Si les Espagnols avaient marqué sur une de leurs premières occasions, le match aurait pu être déjà plié au bout de cinq minutes ?
« Oui, c’est vrai, nous avions choisi une tactique très défensive. Et peut-être avons-nous été trop défensifs. Mais on peut aussi penser que si nous avions joué plus offensivement, nous aurions encaissé plus de buts. Nous avions tout misé sur la défense en espérant avoir un peu de chance. Mais, de toute façon, on ne peut pas comparer notre équipe à l’Espagne, qui a vraiment une génération de joueurs exceptionnels. Malheureusement pour nous, c’est peut-être le maximum de nos possibilités que nous avons montré en Espagne. »
Autre chose, lors de vos cinq matchs de groupe depuis le début des éliminatoires, dont deux contre le Lichtenstein, vous n’avez marqué que six buts. Ce n’est vraiment pas beaucoup, surtout que vous avez également reçu la Lituanie (défaite 0-1) et l’Ecosse (victoire 1-0), deux équipes qui n’ont quand même pas proposé grand-chose au niveau du jeu lors de vos affrontements…
« Oui, ce n’est assurément pas assez… Surtout que nous avons marqué quatre de ces buts contre le Lichtenstein. Et en trois matchs contre la Lituanie, l’Ecosse et l’Espagne, nous n’en avons donc mis que deux... Notre premier match contre la Lituanie, perdu 0-1, pourrait nous valoir beaucoup de regrets : nous avons malheureusement manqué un penalty et de nombreuses occasions. Cette défaite d’entrée pourrait nous coûter très cher. On pourrait s’apercevoir à la fin que ce premier match a été décisif pour la deuxième place, d’autant plus que nous nous déplacerons en Lituanie pour notre dernier match de groupe. Ce sera très dur là-bas, comme en Ecosse d’ailleurs.Vous avez maintenant six mois devant vous pour penser à ce déplacement en Ecosse. Ce sera en septembre, avant de recevoir l’Espagne à Prague en octobre et d’enchaîner avec un dernier match en Lituanie. Aujourd’hui, quand vous regardez le classement du groupe, comment appréhendez-vous ces échéances à venir ? Etes-vous plutôt optimiste ou inquiet par rapport à ce que vous avez produit jusqu’à présent ?
« Ce sera difficile, c’est clair ! Mais l’Ecosse et la Lituanie sont des adversaires directs, c’est bien. Je ne pense que ça fasse une grande différence de jouer à domicile ou à l’extérieur. A l’extérieur il faut être solide défensivement, et en contre-attaque nous avons des joueurs capables de poser des problèmes aux Ecossais et aux Lituaniens. Le premier match en Ecosse sera très, très important. Il nous faudra ramener au moins un point. Si nous faisons match nul là-bas ou gagnons, nous pourrons jouer contre l’Espagne avec l’esprit libéré, en n’ayant rien à perdre. Mais je pense que la deuxième place se jouera de toute façon lors de notre dernier match en Lituanie. »
Le public tchèque a été longtemps gâté avec votre génération, la génération des Nedvěd, Poborský et autres Koller. Aujourd’hui, on a le sentiment que les gens ont du mal à se réhabituer au « pain quotidien » en oubliant que la République tchèque est un petit pays. Le renouvellement de générations se fait difficilement actuellement, certes les prestations ne sont pas brillantes, mais le public est quand même très critique. Qu’en pensez-vous ?
« Oui, c’est un problème. Notre public était habitué à voir du spectacle et des grands joueurs. Aujourd’hui, c’est vrai, nous avons une équipe complètement différente. Nous nous efforçons de donner leur chance aux jeunes joueurs, mais les gens critiquent. C’est comme ça. Pourtant, la République tchèque est aujourd’hui 30e au classement de la FIFA, nous ne sommes plus dans les cinq premiers comme il y a quelques années. Ce n’est plus la même chose, mais nos supporters attendent toujours du beau jeu et beaucoup de buts. Malheureusement ça ne se passe pas comme ça. Si nous avons la chance de nous qualifier pour l’Euro, les gens seront toujours derrière nous. Mais c’est aussi à nous d’en montrer plus. Car nous ne sommes pas contents de ce que nous avons montré jusque-là, il faut aussi le dire. Il faut que les joueurs soient plus responsables, qu’ils réfléchissent à leur jeu et qu’ils donnent plus. »
Comprenez-vous ces critiques du public ? Ou alors avez-vous plutôt tendance à être tolérants avec les joueurs en disant : ‘Voilà, on fait jouer ce qu’on a de mieux actuellement et il faut savoir l’accepter’ ? Il y a d’autres pays, comme l’Ecosse dans votre groupe, où le jeu proposé par l’équipe n’a vraiment rien de formidable, on l’a vu lors du match ultra-défensif de l’Ecosse contre vous à Prague, et où malgré cela, les supporters sont toujours derrière leur équipe…« Oui, ces équipes ont un avantage certain. Mais nous concernant, je dois dire que si le public n’est pas content, moi non plus je ne le suis pas. Et j’espère que les joueurs ne sont pas contents d’eux non plus et qu’ils sentent qu’ils peuvent donner plus. Si je savais que ce qu’ils montrent sur le terrain est leur maximum, je dirais : ‘OK, je comprends’. Mais je pense qu’ils peuvent donner plus et que l’équipe peut faire nettement mieux. »
Que manque-t-il alors ? Ce n’est quand même pas une question de motivation en équipe nationale ?
« Non, c’est un travail pour le sélectionneur, pour moi le manager, pour tous ceux qui sont autour de l’équipe. »
On l’a dit, votre prochain match officiel est programmé en Ecosse en septembre. Avant cela, en juin, vous devriez disputer un tournoi au Japon. Etant donné l’actualité et les circonstances, entendez-vous vous y rendre ?
« C’est une grande interrogation pour nous. Nous sommes bien conscients de ce qui se passe là-bas. Nous ne sommes pas sûrs de participer à ce tournoi. Si ce n’est pas le cas, nous chercherons un adversaire pour un match amical vers la mi-juin. Mais si le Japon tient à ce que nous jouions ce tournoi, il faudra discuter car beaucoup de joueurs ne sont pas enchantés à l’idée d’aller là-bas. Il faut que l’on trouve une solution tous ensemble. »