Jiří Dienstbier : l’homme qui a coupé les barbelés est parti
Jiří Dienstbier, premier chef de la diplomatie tchécoslovaque après la chute du régime communiste en novembre 1989, est décédé ce samedi à l’âge de 73 ans.
« C’était un homme particulièrement généreux, c’était un type vraiment bien. J’oserais même dire que c’était un charmeur très audacieux. »
Journaliste, dissident, homme politique. D’abord communiste, ensuite une des figures emblématiques de l’opposition contre le régime. Le parcours de Jiří Dienstbier semble typique pour toute une génération d’intellectuels tchèques et slovaques, dans la deuxième moitié du XXe siècle, et qui sont généralement étiquetés comme des communistes réformateurs.
Issu d’une famille de médecins, Jiří Dienstbier a travaillé comme correspondant à l’étranger pour la radio, avant de s’engager activement, en 1968, dans le mouvement du Printemps de Prague. Persécuté dès le début des années 1970, il a travaillé notamment comme chauffagiste et gardien nocturne. Il a été un des premiers des 250 signataires de la Charte 77 avant d’en être son porte-parole. Pour ses activités au sein du Comité pour la défense des personnes injustement poursuivies, il a été condamné à trois ans de prison.
Après la chute du régime communiste, il est devenu ministre des Affaires étrangères. Son mandat ministériel une fois terminé, il s’est engagé uniquement dans la politique internationale, est devenu envoyé spécial de la commission de l’ONU pour les droits de l’homme dans l’ex-Yougoslavie. Son come-back dans la haute politique, il l’a réussi en tant que sénateur sous les couleurs de la social-démocratie, son mandat devant prendre fin en 2014. Parmi les nombreuses distinctions que Jiří Dienstbier a obtenu, on rappellera la Légion d'honneur qui lui a été attribuée en 2005 à l'ambassade de France à Prague. Jiří Dienstbier, Européen convaincu et amoureux de la France, a alors dit ce qu'il pensait du « non » français lors du référendum pour la ratification de la Constitution européenne.« Le problème est que les élites politiques ont disparu dans une sorte de ghetto et elles ont oublié de discuter avec les gens de leurs décisions. Par exemple, on ne devrait pas soumettre la question de la Constitution au référendum. »
Pour beaucoup de Tchèques, Jiří Dienstbier restera dans l’histoire comme celui qui, peu avant Noël 1989, a coupé avec le chef de la diplomatie allemande de l’époque, Hans-Dietrich Genscher, les barbelés entre la République tchécoslovaque et l’Allemagne. Une façon symbolique de confirmer la chute du Mur de Berlin et d’augurer l’ouverture du pays vers l’Europe, une ultime satisfaction à la fois pour celui qui a fait de la lutte pour la liberté un des moteurs de sa vie.