Le Caméléon de Jean-Paul Salomé : histoire d’un imposteur

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Le réalisateur Jean-Paul Salomé, dont on connaît notamment les grosses productions telles que « Belphégor, le fantôme du Louvre », « Arsène Lupin » et « Les Femmes de l’Ombre » est venu à Prague pour présenter au 13e Festival du film français son nouveau film « Le Caméléon ». Un drame psychologique qu’il a tourné avec un petit budget, en Louisiane, aux Etats-Unis, avec des acteurs américains et canadiens, tels que Famke Janssen ou Marc-André Grondin. Le film raconte l’histoire d’un jeune homme qui a pris l’identité de plusieurs personnes, de plusieurs enfants. Une histoire vraie dont Jean-Paul Salomé s’est inspiré à la suite de la lecture d’un article de journal.

Jean-Paul Salomé
« Il y avait eu un article dans le journal français Libération il y a quelques années sur ce jeune homme, qui évoquait également un livre écrit par un journaliste. J’ai lu ce livre qui est un récit journalistique et pas un roman. A partir de là j’ai découvert le cas de ce garçon, Frédéric Bourdin qui, il y a une dizaine d’années, s’était fait une spécialité de prendre l’identité d’enfants disparus. Il l’a fait à travers la France et l’Europe. A un moment donné, il a failli se faire coincer par Interpol, c’est pourquoi il a choisi de partir aux Etats-Unis. Il est allé sur un site d’enfants disparus, il a trouvé un gamin qui lui ressemblait un peu et il a tenté le coup. Là, commence le film : c’est l’histoire de ce voyage aux Etats-Unis. Contrairement aux autres expériences, ce coup-ci, il va être accepté par la famille et la famille va le reconnaître comme étant son fils. »

Ce qui n’était pas le cas dans les autres familles ?

« Non, dans les autres familles ça durait très peu de temps. Ou le processus ne marchait pas totalement. Là, curieusement, il a tenté le tout pour le tout et curieusement la famille l’a reconnu comme étant son propre enfant. En gros, il avait disparu à l’âge de 12 ans, il a reparu à l’âge de 16 ans. Il avait changé physiquement mais ils se disaient que ça devait être lui. A l’époque, il avait déjà plus de 20 ans et jouait un adolescent de 16 ans. C’est donc un personnage trouble qui a vécu quatre mois dans cette famille américaine. En fait, c’est un acteur né, dans ce rôle de composition. J’ai trouvé cette histoire très émouvante, fascinante, ce personnage noir m’a fasciné. »

Psychologiquement, peut-on dire pourquoi cette famille l’a accepté ? C’est une famille assez particulière...

« Oui, tous les personnages du film sont particuliers. Cela se passe dans une frange de la société, des laissés-pour-compte aux Etats-Unis, ce qu’on appelle les ‘white trash’, le Quart-Monde blanc : ce n’est ni les blacks, ni les porto-ricains, ni les minorités qu’on a l’habitude de voir dans les films américains. C’est vraiment des blancs, ‘type caucasien’ comme ils disent là-bas, qui vivent dans des espèces de mobile-homes, dans des zones urbaines. Le film a été tourné à Bâton-Rouge en Louisiane où il y a justement tout autour de la ville ces ‘trailer parks’. Cette misère humaine déteint sur les rapports sociaux, affectifs. Et il est tombé dans ce panier de crabes, dans cette famille disloquée, cette espèce de horde sauvage. Je ne peux pas en dire trop parce qu’après il y a beaucoup de révélations. C’est un peu le bal des paumés. Avec l’arrivée de ce jeune homme, c’est peut-être une seconde chance pour les autres personnages, ils décident de prendre cette chance et de grâce à lui, reconstruire quelque chose. »