«Rusalka » au festival de Salzbourg, une première historique
Pour la première fois de son histoire, le prestigieux festival de Salzbourg a présenté l’opéra Rusalka d’Antonín Dvořák. La première, qui a eu lieu dimanche dernier dans « Haus für Mozart (Maison pour Mozart) », a été retransmise en direct par la Radio publique tchèque. Le tandem composé des metteurs en scène Sergio Morabito et Jossi Wieler a proposé au public de Salzbourg une relecture moderne de ce vieux conte sur une ondine qui se sacrifie pour l’amour d’un homme.
C’est au chef d’orchestre autrichien Franz Welser-Möst et à l’Orchestre symphonique de Cleveland qu’a été confiée cette première apparition de Rusalka au festival. Il semble que cette décision ait quelque peu froissé les membres de l’Orchestre philharmonique de Vienne dont beaucoup ont des racines tchèques et se considèrent comme mieux prédisposés à saisir les beautés musicales du chef-d’oeuvre de Dvorak. C’est une cantatrice finlandaise, Camilla Nylund, qui a incarné Rusalka lors de la première, le Prince a été campé par le ténor polonais Piotr Beczala et l’Ondin par la basse américaine Alan Held. Selon la critique musicale Helena Havlíková, qui a écouté la retransmission à Prague, bien que la voix de Camilla Nylund ne manque pas de volume, elle se rétrécit dans les aigus et ne possède pas les couleurs et la plasticité nécessaires pour ce rôle. Helena Havlíková a aussi formulé quelques objections vis-à-vis de la conception musicale de cette production :
«Je trouve en somme que le chef d’orchestre Franz Welser-Möst met l’accent plutôt sur l’aspect dramatique de l’opéra. Les passages lyriques manquent de douceur et les tempos souvent très lents nuisent un peu à la cohésion de l’ensemble. En écoutant cette retransmission on a l’impression que l’orchestre est un peu trop bruyant. Comme il s’agit du célèbre Orchestre de Cleveland, il faut constater des fautes d’intonation inexcusables, notamment dans les cors. »
Quant à la musicologue Jana Vašatová, qui a assisté à la première de l’opéra à Salzbourg, elle apprécie la conception des metteurs en scène. Elle a évoqué ses impressions, par téléphone, encore pendant l’entr’acte de la représentation de ce dimanche :
«Je ne sais pas si une telle production pourrait s’imposer chez nous, mais je crois que oui. Les conflits dramatiques de l’oeuvre sont très exacerbés et la conception des metteurs en scène part de la situation de l’époque où l’opéra a été créé. Ils se réfèrent toujours à Freud et à ses idées qui, à leur avis, se reflètent dans cette oeuvre. Il s’agit surtout du rôle de la femme dans la société et de son émancipation.»
Et Jana Vašatová de constater que cette production de «Rusalka» est dramatique, intéressante et impressionnante. Le festival de Salzbourg durera jusqu’à la fin août et «Rusalka» d’Antonín Dvořák y est donnée dans une série de cinq représentations.