Robert Badinter, militant de la Cour pénale internationale
Robert Badinter, dont le nom est associé à l’abolition de la peine de mort en France en 1981, a prononcé, lundi 7 avril à l’Institut français de Prague une conférence intitulée « Juger les criminels contre l’Humanité ». L’ancien ministre français de la Justice a formulé une véritable plaidoirie pour la Cour Pénale Internationale, dont il est l’un des inspirateurs. Robert Badinter est aussi co-Président d’une association franco-tchèque de juristes, l’association Masaryk.
« Nous avons fondé, mon ami [Otakar] Motejl et moi, cette association très peu de temps après la révolution de velours parce que nous considérions qu’ enfin, le temps de la démocratie et donc de l’Etat de droit était venu, et qu’il était bon que des juristes tchèques et des juristes français participent ensemble et aient des relations constantes. Nous faisons des voyages fréquents. Des juristes tchèques, qui sont de très haut niveau, viennent à Paris, font des conférences. Nous avons eu des conférences faites par des membres tchèques de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Nous avons un public français très attentif. Nous venons aussi de Paris pour faire des conférences sur la Justice européenne, sur la Justice internationale, parfois sur la Justice française. Il se crée comme cela en Europe une communauté de juristes qui fait penser à ce qui est advenu justement à la grande époque où on fondait l’Université Charles, c’est-à-dire l’époque où parlant tous latin, les professeurs de Droit allaient à dos de mule enseigner à Oxford, ici en Bohême, ou s’en allaient à Heidelberg ou de là à Salamanque. C’est un peu ça qui se recrée à travers l’association Masaryk : une communauté de juristes. »
Vous avez parlé ce soir de Justice Internationale. Est-ce que l’association Masaryk travaille dans ce sens et qu’est-ce qu’elle fait concrètement ?
« Concrètement, elle oeuvre, elle fait des colloques, nous écrivons des articles. M. Motejl est un grand militant, et moi aussi, de la Cour pénale internationale. Bref, nous faisons notre modeste travail de juristes engagés. »
J’ai été très surprise d’apprendre que la République tchèque n’était pas membre de la Cour de Justice internationale que vous défendez. Quelles sont les raisons ou quelles explications pouvez-vous donner ?
« L’explication, seules les autorités tchèques ont qualité pour la donner. Ce qui en tout cas est vrai de ma part, moi qui suit si attaché à la République tchèque et tellement conscient de ce que l’Europe lui doit. Je dis que de constater que c’est le seul Etat à l’intérieur de l’Union européenne qui ne soit pas membre laisse stupéfait. Il est bien évident qu’entre la République tchèque et le crime contre l’Humanité, il ne peut y avoir, de la part de la République tchèque et des Tchèques qui en ont tant souffert si longtemps dans leur tragique histoire, d’autre démarche que celle de vouloir que les criminels soient châtiés. On ne peut pas s’abstenir de cette grande cause. »